

Médias : Les vraies choses
Il y a tout juste un an, on s’interrogeait sur l’intérêt marqué pour la télé-réalité, surtout après le succès de Survivor, qui a été suivi religieusement par 50 millions d’Américains.
Frédéric Boudreault
Il y a tout juste un an, on s’interrogeait sur l’intérêt marqué pour la télé-réalité, surtout après le succès de Survivor, qui a été suivi religieusement par 50 millions d’Américains. La suite était prévisible: on a copié cette formule pour profiter de l’engouement. Les clones de Survivor se sont alors multipliés à la télé, avec des concepts de plus en plus minables: le soporifique Big Brother, Love Cruise, Temptation Island (qui sera de retour le 7 novembre), The Mole… Le public se passionnait pour les luttes de pouvoir entre 16 concurrents parachutés sur une île déserte; pour des couples qu’on poussait à se tromper; pour des ploucs enfermés dans une maison infestée de caméras. Vraiment, de la grande télé.
Aujourd’hui, à la suite des attentats du 11 septembre, on semble assister au phénomène inverse: les téléspectateurs décrochent de ces séries où l’on tente de nous faire croire à une certaine réalité. Les cotes d’écoute sont à la baisse, et les téléspectateurs ne voient plus l’intérêt de suivre des zigotos qui dévoilent sans pudeur leur intimité. Signe des temps: même la frénésie autour de Survivor s’étiole dangereusement. Depuis le début de la troisième série, la magie n’est plus là. En plus de sentir que les concurrents ont bien assimilé les leçons des séries précédentes (dès le premier épisode, on commençait déjà à organiser des alliances), on a complètement décroché, et on ne croit plus à son aspect vérité. Quand les producteurs en sont rendus à miser sur le fait qu’on voit des gars en sous-vêtements ou des filles en bikini, et ce, dans un effort désespéré pour ramener les auditeurs, c’est qu’il y a un problème.
Mais l’ennui n’est pas le seul facteur qui explique cette désaffection généralisée. Quand les gratte-ciel sont emboutis par des avions et qu’ils s’effondrent, les petites guéguerres intestines dans un camp africain deviennent plutôt futiles. Et c’est le plus grand fan de Survivor qui écrit ici. Notre dose d’adrénaline, on la retrouve à présent dans les bulletins de nouvelles, qui relatent tous les jours les histoires d’anthrax et d’attentats. En ces temps de guerre, le public a besoin de se détendre, de se changer les idées. Pourquoi pensez-vous que Friends est la série la plus écoutée aux États-Unis? Ce n’est sûrement pas à cause de son côté frénétique. C’est du gâteau, facile à digérer, qui fait oublier la (vraie) réalité dans laquelle on est plongés. Des séries où l’on se bagarre, où l’on doit survivre en montant sur la tête des autres pour gagner une somme d’argent, n’ont pas leur place en ce moment. Qu’on passe à autre chose.
Un citoyen comme les autres
La semaine dernière, on vous parlait de Si la tendance se maintient, la satire politique diffusée à TVA. Dans le même genre, on vous conseille fortement la nouvelle série de CBS, Citizen Baines (samedi à 21 h). Si, dans la série écrite par Martin Forget, le comptable Alain Gagnon devient du jour au lendemain politicien, c’est le contraire qui se déroule dans Citizen Baines, où l’on suit un sénateur (James Cromwell, le fermier de Babe) qui vient de perdre ses élections et qui doit reprendre une vie normale. Et cette situation donne lieu à plusieurs quiproquos mais aussi à des moments plus dramatiques, puisqu’il n’est pas facile pour un homme ayant fait de la politique toute sa vie de redevenir un simple citoyen. Humour fin, textes solides, personnages bien campés: cette série ressort du lot par son intelligence et son regard juste. De plus, elle met en vedette Jane Adams (la jeune femme malchanceuse dans Happiness), dans le rôle d’une des trois filles de Baines. Pour rire et réfléchir en même temps.
Périple africain
Pour deux semaines encore, l’émission 275-allô (lundi au vendredi, à 19 h, à la radio de Radio-Canada) et son animatrice Dominique Payette nous proviennent d’Afrique dans une série de 15 émissions enregistrées au Mali, au Burkina Faso et au Sénégal. Au programme: des reportages et des entrevues qui brosseront un portrait sans complaisance des réalités vécues par les jeunes là-bas. Ce périple est l’aboutissement d’Afrique-Ados, un projet qui permettait, depuis juin, à des Africains de 12 à 17 ans d’écrire à des Québécois. On peut d’ailleurs lire des extraits de l’abondante correspondance à l’adresse www.radio-canada.ca/radio/afrique-ados. De l’anti-National Geographic.
Des pubs de gars
Messieurs, êtes-vous tannés de regarder des publicités mettant en vedette des hommes-objets? Vous avez envie de voir des pubs de chars, de bière et de sport? Au cours des deux premières semaines de novembre, Planète Pub (dimanche, 16 h 30, TQS) a pensé à vous avec son "spécial gars", où l’on diffusera les meilleurs messages s’adressant aux mâles. Âmes sensibles, s’abstenir.
Voix de tête
Parmi les nombreuses sitcoms qui envahissent les ondes des réseaux américains, Will and Grace se démarque vraiment par son humour évitant les clichés d’usage. Même si elle met en scène deux gars ouvertement homosexuels, jamais on ne sent que leur orientation sexuelle cause problème. Une rareté à la télé américaine. Vous espérez vous rattraper en regardant la version française, diffusée à Séries + les jeudis et vendredis à 19 h? Pensez-y à deux fois, puisque Will and Grace dans la langue de Thierry Ardisson, c’est vachement décevant. En plus des nombreuses références franco-françaises, on a affublé d’une voix horrible Karen, le personnage le plus délirant. Dans la traduction, elle perd toute sa saveur à cause de cette voix grave, qui ne sied pas du tout à son caractère effervescent. Encore une fois, on se demande pourquoi les diffuseurs ne commandent pas des versions québécoises! Rabattez-vous plutôt sur la version originale, le jeudi à 21 h, sur NBC.