Si vous lisez les journaux jusqu’à la dernière page, vous avez peut-être remarqué que la Commission de la culture sur la concentration de la presse a remis son rapport il y a deux semaines, et ce, dans l’indifférence la plus totale. Pourtant, le sujet méritait un meilleur traitement, surtout après l’achat des quotidiens de Hollinger Le Droit, Le Soleil et Le Quotidien par Gesca (propriétaire de La Presse); après la fusion de Vidéotron et Quebecor; et après l’achat de TQS par Bell et Cogeco… Le paysage médiatique québécois venait tout à coup de perdre plusieurs joueurs importants, ce qui est très dangereux dans un aussi petit marché.
L’an dernier, à peu près à la même date, le gouvernement avait donc lancé cette grande consultation pour répondre aux interrogations du milieu journalistique, qui s’inquiétait pour la diversité de l’information. Et depuis ce temps, on s’est aperçu que la menace était bien réelle. Les exemples ne manquent pas. Péladeau se sert de ses publications pour faire sa propre glorification; TVA congédie un chroniqueur parce qu’il travaille dans un journal concurrent; Radio-Canada et Gesca s’associent pour lancer un télé-horaire: tout cela n’est que le pointe de l’iceberg.
Malgré la dissension entre péquistes et libéraux, la Commission a quand même accouché de 14 recommandations, qui ne changeront pas grand-chose à la situation actuelle. Parmi les idées les plus marquantes, on propose, entre autres, un partage plus équitable de l’assiette publicitaire gouvernementale, ce qui profitera aux petits médias. On espère aussi la mise en place d’ombudsmans dans les grands conglomérats, une mesure qui plaira sûrement aux magnats de la presse. On est convaincu que les Péladeau, Desmarais et Monty accepteront la venue de ces badauds sur leur terrain. Franchement, depuis quand nos parlementaires croient-ils dur comme fer que le monde de la finance carbure à la bonne volonté…
Et le fer de lance de ce rapport, c’est la création d’une "vigie", qui surveillera l’indépendance des différentes salles de rédaction. Encore une fois, la Commission a mis des gants blancs pour éviter la confrontation. On aurait aimé avoir un chien de garde avec des grosses dents qui aurait pu mordre, le temps venu. On se ramasse plutôt avec un chihuahua qui jappera fort, mais qui ne flanquera même pas la frousse aux voleurs.
Mais on ne peut pas demander à un gouvernement de surveiller d’un côté la concentration de la presse quand, de l’autre, la Caisse de dépôt et placement donne un coup de pouce à Quebecor afin de prendre le contrôle de Vidéotron. On ne sait pas à quoi s’attendaient ceux qui ont demandé cette commission. L’intention était noble de la part du gouvernement, mais celui-ci n’a malheureusement aucun pouvoir de décision dans ce domaine. C’est tout ce que cette commission aura réussi à mettre en lumière.
Le plus drôle dans tout ça, c’est que, selon Luc Lavoie de Quebecor, son patron ne daignera même pas répondre au rapport. De toute façon, pourquoi le faire, les dés étaient pipés à l’avance: on connaissait déjà le constat et les moyens qui seraient proposés bien avant que tout cela ne soit terminé. Un beau gaspillage de temps pour un autre rapport qui sera tabletté. On n’apprendra donc jamais.
Bonne fête, Recto Verso!
Incroyable mais vrai: le magazine Recto Verso fête ce mois-ci son 50e anniversaire, chose rarissime dans le monde de l’édition. Dans le numéro disponible en ce moment dans les présentoirs, on retrace d’ailleurs les 50 ans de la revue. Il faut dire que Recto Verso a connu plusieurs mutations au cours de sa longue existence. À l’origine, c’est la Communauté des oblats missionnaires qui a lancé L’Action catholique ouvrière, l’ancêtre de Recto Verso, qui s’adressait aux membres de la Jeunesse catholique ouvrière et de la Ligue ouvrière catholique. Aujourd’hui, le magazine a pris un important virage à gauche, et s’intéresse particulièrement aux luttes à caractère social. Dans le contexte actuel, on leur souhaite un autre cinquantenaire.
Je me souviens
Parfois, la fiction dépasse la réalité, et c’est ce qui se passe justement dans Warriors – L’Impossible mission, une minisérie britannique en quatre parties diffusée depuis lundi à Radio-Canada. Avec la situation actuelle en Afghanistan, où l’on demande l’envoi des Casques bleus de l’ONU, il est passionnant de suivre l’histoire de cinq jeunes officiers catapultés dans l’enfer de la Bosnie. Ne pouvant tirer sur les belligérants, ces derniers seront témoins de situations horribles, qui les marqueront pour le reste de leur vie. Malgré un rythme plutôt lent, cette série, basée sur des témoignages réels de Casques bleus, est vraiment criante de vérité. Pour ne pas oublier. Lundi, à 21 h.