Les mesures de sécurité
Société

Les mesures de sécurité

Comment faire pour contrer la menace terroriste sans pour autant concéder trop de pouvoir à l’État sur nos vies? Où situer le point d’équilibre entre sécurité et liberté? Ici encore, les avis divergent.

Anne McLellan

, ministre fédérale de la Justice

"Le 11 septembre a fait la preuve d’une nouvelle forme de terrorisme et, surtout, a confirmé l’échec du droit criminel fondé sur la poursuite des coupables. Que faire quand les criminels meurent avec leurs victimes? Vous devez, pour prévenir d’autres actes du genre, donner à vos services de renseignements et à vos corps policiers les moyens de déceler très tôt les activités terroristes.

"Nous avons apporté des amendements à la loi C-36 pour la rendre plus précise, et ceux qui ont toujours peur qu’une manifestation étudiante soit confondue avec un acte terroriste n’ont simplement pas lu la loi. Et puis, il y aura toujours des gens pour faire des scénarios du pire, mais je ne vis pas dans ce monde-là. Mon travail est de faire en sorte que les Canadiens se sentent en sécurité et on a travaillé très fort pour s’assurer de ne pas brimer les droits et libertés. Notre objectif était de concilier l’efficacité et la justice, et la Charte n’empêche pas un gouvernement de protéger ses citoyens contre la terreur. On devra maintenant s’assurer que la population et tous ceux en charge de l’application de la loi, comme la police ou les tribunaux, soient bien informés."

* Le projet de loi C-42 sur la sécurité publique ne relevant pas de ses compétences, la ministre de la Justice a refusé de le commenter.

Gilles Duceppe, chef du Bloc québécois

"Au début de la crise, on s’entendait tous pour dire qu’il fallait renforcer un certain nombre de mesures de sécurité, sans pour autant briser l’équilibre avec la liberté. Mais dès lors qu’est venu le temps de concrétiser ces principes, cet équilibre a été rompu.

"La loi C-36 demeure trop vague quant à la définition d’un acte terroriste. Est-ce qu’un manifestant qui détruirait des biens matériels causant des blessures à une personne pourrait être considéré comme un terroriste? Je ne dis pas que c’est bien de faire ça, mais ce n’est pas la même chose. Aussi, le pouvoir de la ministre de la Justice en matière d’accès à l’information et de protection de la vie privée est trop grand, elle est juge et partie et s’arroge tous les pouvoirs. Nous, on voulait qu’un juge puisse décider de l’application. Ajoutons à cela l’absence d’une véritable clause crépusculaire.

"Quant au projet de loi C-42, sur la sécurité publique, il est encore plus litigieux avec l’absence de recours en justice et la suspension des droits. Lorsque j’ai posé la question à M. Chrétien à savoir si la "zone militaire sécurisée" – à l’intérieur de laquelle les droits peuvent être suspendus – aurait pu être celle du périmètre du Sommet des Amériques, il m’a répondu que j’essayais de faire peur au monde. Or, une haute fonctionnaire fédérale a cité ce cas en exemple aux ministres provinciaux de la Justice deux jours plus tard… Face au terrorisme, il faut parfois intervenir par la force, mais il ne faut pas pour autant abdiquer toutes nos valeurs."