Société

Droit de cité : Là où ça fait mal

Ouch… Elle fait mal celle-là. Le maire Gérald Tremblay avait autant besoin d’une enquête criminelle de la SQ dans son entourage que d’un streptocoque de type A. Déjà, son système immunitaire souffrait de sa trop grande proximité avec les grands bénéficiaires d’aide gouvernementale de ce bas monde, des récompenses aux amis, de l’opinion hautement libérale de son bras droit sur ces questions…

Irving Grundman et René Dussault, deux politiciens et hommes d’affaires bien en vue à Ville Saint-Laurent, feront face à des accusations de corruption de fonctionnaires, d’actes de corruption dans les affaires municipales, d’abus de confiance et de commissions secrètes. Les accusations contre les deux conseillers municipaux de Gérald Tremblay sont très graves.

C’est dans des circonstances comme celle-là qu’il importe d’avoir des politiciens au-dessus de tout soupçon. Des maires, par exemple, qui ne font pas seulement se plier à des règles déontologiques strictes, mais qui les épousent carrément.

Si Gérald Tremblay n’avait pas accordé, dans le cadre d’un appel d’offres bidon, un contrat de 850 000 $ à une organisation qu’il a fondée, la même qui a sous-contracté par la suite avec une entreprise privée, dont les dirigeants sont ses amis; si Gérald Tremblay n’avait pas octroyé d’autres contrats sans appel d’offres à des proches du régime; si son fidèle bras droit n’avait jamais affirmé qu’il est normal de récompenser les amis et les proches avec des fonds publics; si le maire avait eu lui-même l’initiative de se retirer de tous les conseils d’administration où il siégeait, à plus forte raison ceux d’entreprises privées candidates pour d’importantes subventions de la Ville… Si, si si, nous n’en serions pas aujourd’hui à nous demander si nous faisons face à un cas isolé ou si nous assistons à l’expression la plus extrême de toute une culture du copinage et du secret qui régnerait depuis trop longtemps en banlieue.

Encore si, et on se dirait: "Bah! Ce sont juste deux escrocs présumés, et on peut se fier sur le maire pour s’activer sur le torchon et nettoyer ces taches."

Mais là, non, on ne peut pas. Moins d’une semaine après avoir reproché aux journalistes d’exiger de lui l’infaillibilité papale, Gérald Tremblay vient de comprendre pourquoi les gens s’acharnent tant sur lui avec ces histoires casse-couilles de conflits d’intérêts. "Pourquoi moi?" semblait-il nous demander il y a une semaine. Bien, voilà pourquoi vous.

Note à madame la mairesse

Selon monsieur lui-même, vous avez demandé au petit-déjeuner si votre homme devait se séparer de vous, de ses enfants et de sa maison pour s’acquitter de sa job à la satisfaction de la presse.

Ben non, madame Chose, votre mari n’a pas à se séparer de vous, de ses enfants, de sa maison, de son chien, de son chat, de sa perruche et de sa collection d’épinglettes olympiques.

Votre mari siégeait à des conseils d’administration d’entreprises privées susceptibles d’obtenir de l’aide de la Ville? Sachez que pour moins que ça, on a expédié un gros rouge au Danemark. Le petit tough de Berthier s’est liquéfié devant les caméras de la télé nationale. La ministre des Affaires municipales avait envoyé la SQ chez un membre du comité exécutif sous Pierre Bourque, il y a quelques années. Pour moins que ça, il y a eu le Shawinigate.

Au calepin

Bon, qu’avais-je au calepin avant que quelqu’un salisse de brun le parquet ciré de l’hôtel de ville, à la dernière minute? Il devait être question des poursuites judiciaires que pourrait entreprendre Environnement Canada contre la Ville. Montréal ferait preuve de laxisme à propos de l’écoulement de BPC dans le fleuve, en provenance de l’un de ses terrains, le Technoparc, situé le long de l’autoroute Bonaventure. Les concentrations de BPC sur la berge du fleuve qu’a analysées une équipe d’enquêteurs indépendants, mandatés par la Société pour vaincre la pollution, atteindraient des niveaux bibliques: huit millions de fois la limite tolérée! Une affaire, si l’enquête fédérale aboutit par un jugement au pied de la lettre, qui pourrait coûter jusqu’à un demi-milliard de dollars en amendes aux contribuables montréalais. Ouch…

Il y avait aussi cette proposition de l’Agence métropolitaine de transport (AMT) d’ajouter une taxe sur l’essence, sur les immatriculations d’automobiles et sur les stationnements au centre-ville, pour financer davantage le transport en commun. Pas que ce soit une si mauvaise solution que de taxer l’automobiliste au profit du transport en commun; mais de le faire dans un pays où les citoyens sont au bord de la révolte fiscale, et de le proposer à une semaine de l’échéance de l’impôt, ce n’est, comment dire poliment, pas une si bonne idée finalement. Pas plus d’ailleurs que la perspective que ces nouvelles purges dans les poches des contribuables puissent servir à financer un réseau de lignes de métro et de trains de banlieue qui s’étendrait jusqu’au milieu des pacages à vaches et de la campagne blé d’Inde, à mi-chemin de Sorel.

Au seul profit, de surcroît, d’escrocs de la quatorzième couronne de banlieue et de leurs amis les promoteurs de bungalows de fausses briques roses en carton-pâte, construits au noir par des incompétents ramasse-piastres, incapables de faire la différence entre un évier et un lavabo.