Centre en arts actuels dans Saint-Roch? : Temps d’antenne
Les artistes de Québec pourraient recevoir sous peu un nouveau coup de pouce sur le plan des infrastructures culturelles. La construction d’un centre en arts actuels, qui se voudrait une antenne du Musée du Québec, serait sérieusement envisagée à court terme dans le quartier Saint-Roch.
Ainsi, les artistes qui ont vu leur milieu revigoré au cours des dernières années avec la mise sur pied ou la rénovation de nombreux centres et ateliers d’artistes, combinées à l’implantation d’institutions d’enseignement, ont peut-être une autre belle surprise qui leur pend au bout du nez. Est-ce le dernier morceau pour compléter le puzzle? C’est ce que croit Florent Cousineau, artiste très impliqué depuis de nombreuses années en ce qui a trait aux centres d’artistes et qui joua un rôle important sur plusieurs plans dans la relance du milieu depuis 1992. "De beaux efforts ont été déployés depuis 10 ans, mais un centre en arts actuels est crucial pour consolider cette belle synergie qui s’est établie dans le secteur et établir de nouvelles complicités. Cette antenne viendrait boucler la boucle, c’est le dernier coup de pouce dont ont besoin les centres d’artistes; cela renforcerait le rôle stratégique de Méduse ou de la Chambre blanche, entre autres."
Parrainé conjointement par le Musée du Québec et l’Université Laval, le projet est plus fondamentalement issu de la base, du milieu artistique, précise Florent Cousineau. Selon le document de présentation soumis au ministère de la Culture et des Communications et dont Voir a obtenu copie, l’antenne serait construite en plein coeur du quartier Saint-Roch, sur le terrain faisant face à la rue Dorchester, entre les rues Saint-Vallier et Sainte-Hélène. Cette position stratégique, derrière le bâtiment de l’École des arts visuels et à proximité du CNNTQ et des centres d’artistes, ferait du centre le point de rencontre des arts traditionnels, numériques et technologiques. L’antenne logerait ainsi à l’enseigne du métissage, faisant le pari de l’évolution par l’intégration.
Nécessaire à culture
Le directeur du Musée du Québec, John Porter, est formel: une antenne dans Saint-Roch est essentielle afin de combler les lacunes d’espace de l’institution des plaines d’Abraham et d’accroître son rayonnement. L’espace réservé à l’art contemporain, actuellement de 310 mètres carrés, en comparaison aux 2325 au total des salles du Musée d’art contemporain de Montréal, serait largement insuffisant. "Pour présenter l’exposition Le Ludique l’an dernier, nous avons dû placer des oeuvres dans le hall et dans les corridors… C’est donc un très gros dossier que je soutiens dans tout son cheminement car il répond à un besoin de plus en plus criant de la communauté artistique", lance John Porter.
"C’est aussi un projet important pour les artistes des régions. L’artiste qui partirait de Rimouski ou de la Côte-Nord pourrait faire une halte intéressante à Québec et ne serait plus obligé de se rendre à Montréal pour échanger ou exposer. De plus, il serait avantageux d’établir une complicité avec le Musée d’art contemporain de Montréal afin d’amortir les coûts des grandes expositions. En les attirant ici, on pourrait diviser les frais", continue Florent Cousineau.
Avec deux nouvelles salles d’exposition, le Musée du Québec gagnerait près de 1000 mètres carrés d’espace, ce qui lui permettrait par le fait même d’accueillir des tableaux grand format et d’emprunter des oeuvres majeures provenant d’autres musées, souligne John Porter.
Pour Claude Dubé, directeur de l’École des arts visuels de l’Université Laval, l’antenne s’harmoniserait parfaitement avec le milieu et permettrait à la faculté en pleine croissance de concrétiser son rôle de leader dans le mariage des arts traditionnels et numériques. Et surtout, un nouvel auditorium de 350 places comblerait une demande criante de l’Université, très à l’étroit dans ses locaux actuels. "De nouveaux espaces sont essentiels. Ce centre constitue un pôle de développement incontournable pour l’art actuel. En plus de nouvelles synergies, il favorisera un rayonnement national et international fondamental tant pour le Musée du Québec que pour l’Université Laval", soutient Claude Dubé.
Assembler du concret
L’entrée principale de l’antenne serait située sur Dorchester. Le côté est du bâtiment serait occupé par le Musée du Québec. Le côté ouest serait à la disposition de l’Université. En plus des salles d’exposition, le Musée du Québec obtiendrait trois studios d’artistes ainsi que des ateliers didactiques et une salle de conférence. Un café, des boutiques et une librairie compléteraient le tableau. Outre un vaste auditorium, l’Université obtiendrait pour sa part une salle d’exposition et un centre de création en arts électroniques, permettant l’expérimentation et la présentation d’installations numériques interactives, telles des sculptures.
Au total, c’est près de 9000 mètres carrés d ‘espace qui seraient à la disposition des clientèles des deux institutions et, plus largement, de la communauté artistique. Le bâtiment de trois étages serait également pourvu d’un vaste stationnement souterrain. Le coût total du projet est évalué à 38 millions de dollars et serait financé en majeure partie par le gouvernement du Québec.
Par l’effet même
Selon Florent Cousineau, avec ce nouvel outil, l’art actuel et contemporain d’ici établirait des ponts avec des artistes de renommée internationale. L’auditorium favoriserait la réception d’activités d’envergure comme des colloques ou des conférences, devenant ainsi un lieu de convergence pour l’ensemble de la communauté. "On pourra accueillir sans gêne des gens comme Anne Hamilton, Anish Kapour ou Jeff Wall. Les studios seraient à la disposition des artistes étrangers en visite qui pourraient du coup établir des complicités avec les artistes de Québec. Méduse et les autres centres d’artistes font déjà beaucoup d’efforts, mais ils atteignent leurs limites. Il nous faut des structures d’accueil adéquates pour consolider nos acquis", plaide Florent Cousineau.
"J’ai la conviction profonde que ce projet va se réaliser; le plus tôt possible idéalement", conclut John Porter.
"Le dossier est rendu loin. Après avoir donné beaucoup à Montréal, c’est au tour de Québec. De toute façon, ce projet rallie tellement de gens que le gouvernement ne peut pas dire non", conclut de son côté Claude Dubé.
Au ministère de la Culture et des Communications, l’attachée de presse de la ministre Lemieux, Marjolaine Perreault, a opté pour la voie de la prudence au cours d’un bref entretien téléphonique. "Le dossier est toujours en analyse. C’est un projet très intéressant, mais il reste des étapes à franchir avant de rendre une décision finale. Je ne peux faire plus de commentaires pour le moment", a-t-elle soutenu.????