Droit de cité : L'agenda caché du maire
Société

Droit de cité : L’agenda caché du maire

Voilà, ç’a eu lieu. Qui? Quoi? Que? Le début de la saison de pêche à l’alose savoureuse? Le concours de t-shirts humidifiés de Jacques, au Newtown Disco club?

Le Sommet de Montréal, c’t’affaire!

Et puis? J’en sais rien, étant donné le plan machiavélique de l’équipe du maire, pour faire concorder le début du Sommet avec l’échéance rédactionnelle de cette chronique. Et sa fin, avec sa publication.

Alors, pour savoir si l’événement a connu le succès, vous devrez vous débrouiller par vous-mêmes, en grandes filles et grands garçons, en vous posant la question suivante: que s’y est-il passé? Si la réponse est "rien", c’est que le maire Tremblay aura gagné son pari. La dernière chose dont a besoin le maire Tremblay, c’est de l’action. Il en a eu son bol à soupe des péripéties depuis le début de sa mairie.

D’ailleurs, contrairement aux promesses de ses organisateurs, le Sommet n’a pas pour objectif d’établir des standards sur la longueur du gazon dans les parcs, ni le prolongement d’une demi-heure de l’horaire de la ligne d’autobus 55. L’objectif inavoué est qu’il ne se passe rien. Ou si peu, afin de permettre au message que le maire laissera planer sournoisement au-dessus de l’assemblée faire son oeuvre. C’est l’"agenda caché" de ce sommet. Qu’il ne se passe rien, sauf le passage d’une vague, mais très persistante et convaincante, impression que Montréal n’a pas les moyens de ses ambitions, ni ceux que lui prêtent les gouvernements. Qu’importe les plans d’action que les fameux "partenaires" élaboreront pour faire de la Ville une cité de calibre international, prospère, juste et solidaire.

À force de marteler à la fin de chaque atelier "il faut consentir plus de ressources financières…", ça va persister comme un jingle débilitant dans la tête des "partenaires".

C’est d’autant plus ratoureux comme stratégie que le maire a pris soin d’inviter des autobus jaunes de représentants des gouvernements de Québec et d’Ottawa à venir faire l’acte consensuel avec lui. Et qui, candidement, ont accepté. Ils pourront par la suite difficilement rejeter l’opinion qu’il existe un déséquilibre fiscal défavorisant les grandes villes, puisqu’ils y auront eux-mêmes souscrit pendant le Sommet.

On le sous-estime, ce maire.

Indépendance

"Mario Dumont est le reflet d’une génération très individualiste, qui pense seulement à elle. Ma génération à moi, elle était un peu différente. Elle a cette notion de solidarité sociale. (…)"

Ces paroles de Rita Dionne-Marsolais, ministre déléguée à l’Énergie, ont au moins le mérite d’être claires et franches. Même si elle a juré après que ce n’était qu’une analyse sociologique de la vie sexuelle des escargots. Qu’elle ne visait personne en particulier, bien qu’elle ait dit que la génération de Mario, que Mario représentait très bien, était très égoïste.

Alors, tenons pour acquis que c’était vraiment le fond de sa pensée. Individualistes, les jeunes? C’est faire une bien mauvaise lecture de la réalité. Pas étonnant qu’avec de si savantes analyses de l’humeur politique des Québécois, le PQ dévale si rapidement la pente des sondages.

Indépendants peut-être, mais pas individualistes. Pour la ministre, comme chez plusieurs membres de sa génération qui ont connu le Grand Soir, il n’y a pas de solidarité en dehors des institutions; sans les interventions maternelles de l’État, des syndicats, du Québec inc., des grandes organisations conviées régulièrement à la table des consensus.

Or, les institutions, pavées, comme l’enfer, de bonnes intentions, n’ont plus aucune crédibilité aux yeux des moins de 40 ans. Ils s’en méfient comme la peste, des promesses de la main divine. C’est que plus souvent qu’autrement, elle les a abandonnés en cours de route, au passage de clauses orphelin, de précarité, les a conscrits dans des programmes frauduleusement vendus comme de l’insertion en emploi. Alors qu’il s’agissait seulement de barouetter des jeunes chômeurs entre les budgets de Québec et d’Ottawa. Pour bon nombre de jeunes, la solidarité de Rita, ce sont des lois qui se soucient davantage de préserver les appuis à gauche et à droite du gouvernement. Comme la récente réforme du Code du Travail où l’objectif avoué était de n’indisposer aucun partenaire du gouvernement, soit les syndicats et le patronat.

Leur solidarité contourne désormais les institutions. Elle est d’origine individuelle, mais pas individualiste. Une solidarité qui fait moins appel au soutien d’une main divine, mais plus à l’indépendance des individus. Des initiatives personnelles, comme celle d’Équiterre, ce commerce de café équitable né d’une initiative individuelle. Pas de grandes manifestations, ni d’appels à un contrôle gouvernemental, ou à une protection syndicale, juste le projet d’une fille, Laure Waridel, qui a depuis embarqué pas mal de monde dans son aventure commerciale autrement solidaire que celle de Loto-Québec. Même chose pour le Groupe Investissement Responsable de François Rebello, ces investisseurs éthiques dont les valeurs de rendement ne s’expriment pas en grosseur de la caisse de retraite, ou avec la souveraineté économique du Québec par le câble…