Paul Kail est un patriote, un antiterroristes qui vote à droite. Et pourtant, il n’en revient pas.
Paul Kail est aussi directeur de la Fondation pour le respect des animaux.
Il a vu ses compatriotes hurler de colère devant les images diffusées sur CNN du chien gazé, torturé par les membres d’Al-Qaïda.
Il s’est dit que si les Américains s’intéressaient vraiment à ce point au sort des animaux de laboratoire, leurs larmes de crocodile pourraient remplir d’eau salée la piscine des épaulards de Marineland.
Au risque de passer pour un mauvais Américain, Paul Kail raconte ces temps-ci à qui veut l’entendre que pour chaque animal tué par Al-Qaïda, l’Amérique en a liquidé des dizaines de milliers de la même manière. Mais bien sûr, derrière des portes closes, dans l’anonymat de laboratoires aseptisés.
Il cite Donald Barnes, ex-directeur de l’École de médecine aérospatiale américaine, qui regrette, chaque jour que Dieu fait, d’avoir testé l’effet des gaz toxiques sur près de 1000 chimpanzés durant 10 ans. On les enfermait dans des simulateurs de vol afin d’évaluer combien de temps un pilote d’avion de chasse pris dans un nuage de gaz toxiques pouvait demeurer conscient.
Il sait que des chats, chiens et singes sont utilisés à tour de bras par les chercheurs de l’armée américaine pour tester des armes chimiques, biologiques ou pour tester l’effet de certaines radiations.
Il sait aussi que des dizaines d’entreprises respectables, cotées en Bourse, expérimentent et développent leurs produits sur le dos des chiens et chats. Il sait que l’affaire a même provoqué de bons petits business pour le petit délinquant du coin qui, désormais, en plus de piquer vos disques et votre télé, revend votre chien à des fournisseurs de laboratoire.
Il songe aussi à ces animaux sacrifiés dans l’intérêt de la science. Il dit que les animaux chez qui on provoque des cancers meurent lentement dans de terribles souffrances, et pour rien.
Pour rien? Pour sauver des êtres humains, se fait-il répondre.
Faux: Paul prend alors pour exemple le test LD-50. Le LD-50 est une étape obligatoire exigée par la Food and Drug Administration, tout comme par Santé Canada, avant qu’un détergent, un démaquillant, un rince-bouche, une peinture, que sais-je, ne se retrouve sur les tablettes des supermarchés. L’objectif du test LD-50? Évaluer quelle est la dose toxique d’ingestion d’un produit courant. Combien de gorgée de Nitrate d’ammonium faut-il à mononcle Roger avant de danser la lambada en bobettes avec le pape? Demandez-le à Fido et Rex…
Tu parles. Imposé à des milliers de bêtes durant des dizaines d’années pour le bénéfice de la science, le LD-50 sera bientôt supprimé. On a fini par admettre que les réactions aux toxines variaient tellement selon les espèces qu’il était inutile de faire boire de l’alcool à friction ou du colorant bleu à un chimpanzé. Que cela ne permettait pas de mesurer les effets de telle substance sur un humain, encore moins un chien ou un chat. Même chose pour le sida.
Moi, je pense que le bacille de l’anthrax expédié par la poste aux sénateurs et journalistes des USA cet automne, s’il a été cultivé et dérobé en sol américain, comme l’affirme le FBI, a certainement été testé sur des animaux dans un laboratoire d’où n’est sorti aucun cri, aucun gémissement, aucun hurlement à la mort.
Que la seule différence réside dans les apparences; le chien d’Al-Qaïda a eu le malheur de passer à la télévision et de hurler aux oreilles des Américains.
C’est une chance pour les chiens. En supposant qu’au delà de la haine justifiée pour ces crétins de terroristes, nous soyons capables de regarder dans notre propre jardin. En supposant qu’un jour, à force de se cacher la tête dans le sable, nous frappions un os.