Fidèles à leur réputation d’excellence, les glorieuses forces armées russes se sont encore une fois comportées de manière héroïque en fin de semaine en libérant les otages retenus par les Tchétchènes dans un théâtre du centre-ville de Moscou.
Les terroristes auraient tous été tués. Tant mieux. Après tout, qui a besoin de terroristes dans un pays où la police réussit à assassiner près de 20 % de ceux qu’elle vient délivrer en les gazant à mort?
Et encore, 20 %, c’est pour l’instant. Les autres pataugent entre le coma et l’agonie dans des hôpitaux publics avec des chances minimes de s’en sortir. Je dis minimes parce que chez les Ruskofs la médecine n’a qu’une vitesse: celle des riches, de la pègre et du président, ce qui revient au même.
C’est connu depuis des siècles, les Ruskofs font bien peu de cas de la vie humaine. Il y en a pour dire que c’est même là, outre le fatalisme, l’un des traits dominants de l’âme slave telle qu’on la retrouve dissimulée entre les 12 000 pages des oeuvres complètes de Dostoïevsky ou dans le fond du verre de Moskovskaia de Boris Eltsine. Et même dans la parade d’éléphants roses qui défilent dans les rues de Moscou lors de l’anniversaire du fondateur des Alcooliques anonymes.
Moi je pense plutôt que ce je-m’en-foutisme est attribuable aux abrutis de dictateurs que les Russes endurent comme un mal de dents depuis la révolution.
Si on a pu, au cours de la dernière décennie, apprécier du haut du ciel jusqu’au fond des mers, du vol KAL au Koursk, ce mépris de la vie humaine, c’est en Tchétchénie, où l’on mène des zatchistki (opérations de nettoyage ethnique), que les Ruskovs battent des records de pertes humaines jusque parmi leurs propres troupes.
Tout cela sous l’oeil de verre de l’ONU. Car il en va ainsi depuis que tous les dirigeants de la planète, qui ont appris que seul ce qui s’exprime se pense en lisant George Orwell, ont décidé de rayer le mot indépendantiste de leur vocabulaire pour le remplacer par terroriste. Un jour au SCRS, qui sait, on enquêtera peut-être sur les liens possibles de Paul Bégin avec Al-Qaida…
Saluons au passage la mémoire souffrante des dizaines de bidasses ukrainiens de la promotion de 87. Forcés de ramasser avec une pelle à tarte et un masque d’Halloween des barres de plutonium sur le toit de Tchernobyl, ils nous ont tout de même évité de tâter avant la lettre des vertus de l’irradiation des aliments.
Oh! vous me direz que depuis Vladimir Poutine, les choses ont bien changé. Et vous avez raison. Forcé un temps de donner le change en Occident, le président a dû verser une larme sur les marins du Koursk devant les journalistes de la télé qui le traitaient régulièrement de sans-coeur. Mais vite fatigué de faire le smatte pour les amis du G8, il a nationalisé la télévision.
Je me demande bien pourquoi tant de gens cherchent à savoir quel fut le gaz employé pour liquider otages et terroristes. Tout le monde sait bien que cette merde est rangée dans le duty free d’Aeroflot à Moscou juste à côté des barils d’anthrax rouillés entre les virus exotiques et les autres merdes neurotoxiques fabriquées jadis afin de tous nous tuer, de ce côté-ci de l’Atlantique, au nom du prolétariat et de la pseudo-lutte des classes. Pendant ce temps, dans les cégeps de la capitale, les grands-parents des opposants à la ZLEA lisaient En lutte, et criaient: "Faisons payer les riches!" Bande de cons.
Heureusement, à force de dépenser toute leur monnaie de singe en missiles, gaz, tanks et bombinettes, les Russkys se sont retrouvés un jour trop pauvres pour se payer le luxe de continuer à jouer les paranoïaques. Et ils sont repartis faire la file, les jours de diarrhée, pour s’acheter du papier-toilette… C’était la meilleure chose qui pouvait nous arriver.
Depuis, Moscou est devenue la capitale la plus chère d’Europe. Chic du chic et témoignage de son intégration planétaire, des crétins de gauchistes y font même sauter des McDonald’s, comme en Amérique. Et si le niveau de vie des 200 000 enfants sans abri du centre n’y grimpe guère, les solutions appliquées aux actes de terrorisme y font par contre l’envie de tous. Paraît même qu’on aurait entendu un célèbre partisan de la peine de mort reprendre avec un accent texan le vieux slogan de Labatt lancé par Olivier Guimond: "Lui, il connaît ça!"