![Course de tacots du Carnaval : L'orage mécanique](https://voir.ca/voir-content/uploads/medias/2011/07/15347_1;1920x768.jpg)
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Course de tacots du Carnaval : L’orage mécanique
Avis aux amateurs de vitesse et de créations aérodynamiques, la Course de tacots du Carnaval arrive sur les chapeaux de roues. Pour certains, cette descente de la côte de la Fabrique avec un "quatre-roues" de leur cru est une passion qui dure depuis plusieurs années. Nous avons rencontré quatre membres d’une famille de Québec qui se préparaient à y participer pour la septième année de suite. Des mordus du tacot.
Denoncourt Frédéric
Le rendez-vous avait lieu en soirée, dans le garage situé derrière la maison familiale, boulevard Hamel. À l’intérieur nous attendaient Mario Hamel, son fils Simon, sa fille Sabrina et leur oncle Réjean. Quatre sympathiques et plutôt fiers compétiteurs de courses de tacots qu’on soupçonne même d’être un peu mordus. Car figurez-vous qu’ils prennent aussi part aux circuits d’été de la discipline, mais ça, c’est une autre histoire.
Pour le moment, toute leur concentration était dirigée vers la classique annuelle du Carnaval. En cette soirée glaciale de janvier, loin des regards indiscrets, ils mettaient la touche finale à leurs engins de course afin qu’ils soient fin prêts en vue du jour J et dévalent, le plus vite possible, les 100 et quelques mètres de la côte de la Fabrique dans le Vieux-Québec, sous les acclamations des carnavaleux.
Une affaire de famille
Depuis sept ans, chez les Hamel, les courses de tacots, c’est un peu une affaire de famille. En 1997, après un gros accident de moto, le paternel décide d’y aller mollo et de choisir une activité moins risquée qui offre tout de même des sensations; l’aventure des tacots s’amorce et les enfants embarquent. "Au début, on manquait d’expérience, mais depuis quatre ans, on gagne deux ou trois médailles par an", dit Mario Hamel, alors qu’on jette un coup d’oeil aux deux tacots faits d’un mélange d’aluminium, d’acier et de toile. L’un, de taille moyenne, sera utilisé par Simon et Sabrina, l’autre, plutôt grand format, est la propriété de l’oncle Réjean. Tout comme en formule 1, le châssis est tapissé de logos des principaux commanditaires.
Outre certaines limites de poids et de taille imposées au véhicule par les organisateurs, celui-ci doit être doté de bons freins, le plancher doit aussi être entièrement fermé pour prévenir les blessures aux jambes et éviter que certains jouent les Fred Caillou en se propulsant au départ avec leurs pieds. Car, dans ce type de course où le moteur turbo est proscrit, la puissance de propulsion se résume à une loi vieille comme le monde: la gravité. Et gare aux tricheurs ou aux antisportifs, la disqualification vous guette (point 14 des règlements généraux). Alors, c’est le pilote ou le tacot qui fait la différence? "L’important, c’est d’avoir de bonnes roues, bien droites, et un tacot de bonne fabrication, ni trop lourd, pour bien partir, ni trop léger. Et bien sûr, il faut savoir garder sa ligne", ajoute Mario Hamel, qui, visiblement confiant, nous fait une démonstration – plutôt convaincante – de la fluidité avec laquelle tournent les nouvelles roues de fauteuil roulant qui feront dévaler la pente au tacot familial. "Regarde comme ça roule. Ça, ça n’arrête pas."
Quoi qu’on en pense, préparation et stratégie importent en tacot, nous assure-t-on. "On utilise un lubrifiant spécial pour les roues, mais on met du tape sur la canette pour cacher le nom du produit et éviter que les autres concurrents voient le nom", dit M. Hamel. "C’est comme en F1, on cache les ailerons avec un tissu pour que les autres équipes ne connaissent pas nos ajustements", souligne Réjean Hamel. Impossible toutefois d’en apprendre beaucoup plus de ce côté. "On ne peut pas dévoiler tous nos secrets."
Rapides, les courses de tacots? Au mieux, à une vitesse de 50 quelques km/h, une descente durerait 24 secondes et des poussières, et la compétition serait féroce. "Ça se décide aux centièmes de secondes", assure Mario Hamel.
Que le meilleur et… le plus honnête gagne
L’an dernier, papa gagnait l’or en classe adulte tandis que Simon et Sabrina raflaient tous deux l’argent dans les classes 14-17 ans et 10-13 ans (80 concurrents sont admis chaque année, toutes classes confondues).
La meilleure récolte fut celle de l’an 2000, édition marquée par la controverse où la famille Hamel remporta trois fois l’or, à la suite de la disqualification d’un concurrent et de son fils pour tacot non réglementaire. Vraisemblablement, pour certains, l’enjeu est grand et la fin justifie les moyens. "Le gars avait trafiqué son tacot en y installant un mécanisme avec une pédale pour actionner la roue arrière et se donner un avantage au départ." Habités par le doute, ils ne feront ni une ni deux et se rendront inspecter le tacot suspect sur le terrain d’entreposage après le Carnaval. "On a alors découvert le pot aux roses. Ça a brassé pas mal, TQS a tout filmé. Un maudit tricheur! Il est banni à vie du Carnaval", relate Mario Hamel.
Ce mauvais souvenir ressassé, on passe aux espoirs pour l’édition 2003 alors que Simon et Sabrina seront dans la même classe. "On espère une médaille d’or et une d’argent", lance le père, qui se confinera cette année au rôle de manager, le chant du cygne ayant sonné dans son cas. "J’ai pris ma retraite. Il faut laisser la place à d’autres", dit-il, philosophe. "Il est rendu trop vieux!" ajoute son frère. "Cette année, je cours en classe 14-17 ans, ce sera peut-être autre chose…" s’interroge Sabrina, qui se prête avec joie aux caprices de notre photographe. Simon, plus discret, reste à l’écart.
De son côté, l’oncle Réjean espère faire oublier quelques prestations décevantes et promet d’être plus compétitif cette année. "L’an passé j’avais de petites roues à l’avant, cette année Mario va me prêter ses roues de fauteuil roulant pour la course. Ça va être autre chose", jure-t-il, sourire en coin. Comme quoi un frère généreux est parfois aussi important qu’une bonne écurie, de bons ajustements et un bon mécano.
La course se tiendra donc, comme d’habitude, côte de la Fabrique, le samedi 8 février. Les premiers départs sont prévus pour 10 h et on devrait couronner les vainqueurs vers 16 h. Le tacot de Simon et Sabrina portera le numéro 23, celui de tonton Réjean, le 37. Froid polaire ou pas, nous y serons pour les voir descendre et les encourager, eux et les autres. Et vous?