Piratage audiovisuel : À l'abordage!
Société

Piratage audiovisuel : À l’abordage!

Avec la démocratisation des outils informatiques qui facilitent encore plus le processus, surtout en ce qui concerne la recherche et le téléchargement de pièces compressées en format MP3, l’industrie panique et crie au piratage. À moins de changer radicalement ses façons de faire, se retrouve-t-elle devant un combat perdu d’avance?

POUR:
Simon Jodoin
(Simon J. & The Fuckingruvin Virtual Dumb Band, Mort de rire, Association des musiciens autonomes du Québec, www.koolos.com)

"Le partage de documents en réseau, c’est mon terrain et mon principal outil. Grâce à cet outil, des millions de personnes ont accès à des logiciels de production, à des cours sur l’utilisation de ces outils, aux archives des médias internationaux – mais pas au Journal de Montréal, en passant -, à des bibliothèques et à une banque d’ouvres artistiques.Le réseau, c’est un accès instantané à la culture et aux moyens de diffusion. Que le pauvre Corneille ou le triste Wilfred y perdent quelques milliers de copies, c’est bien dommage, mais je demeure persuadé que la permission et la liberté sont plus favorables à la santé culturelle que l’interdiction et la convergence.

500 000 copies vendues de Star Académie, ça vous dit quelque chose? Ils sont là, les 20 albums qui n’ont pas vendu 25 000 copies. Cessez de les chercher sur Internet! On voudrait nous faire croire que si Quebecor débarque pour encourager les gens à sortir leur carte de crédit à chaque clic de souris, la culture s’en trouvera revigorée, cela favorisera la diversité et les artistes vont mieux vivre. Quelle mauvaise sauce.

Si ces néo-altruistes veulent faire quelque chose de positif pour informer le public, ils n’ont qu’à consacrer un cahier Week-end à la SOCAN, la SODRAC, l’ADISQ et aux associations d’artistes concernées pour présenter la problématique dans son ensemble. Leur campagne de "bozos" appelant à la solidarité ressemble plutôt à quelques fous du roi payés pour nous faire rigoler… Ou pour nous faire oublier que la survie des artisans ne passe certainement pas par la convergence des médias.

Les bénéfices financiers de cette technologie, tout le monde sait où ils sont!"

CONTRE:
Yves-François Blanchet
Président de l’ADISQ et gérant d’artistes
"On ne peut pas davantage s’opposer à l’évolution technologique qu’on ne peut s’opposer à la météo. Il y a évolution technologique et c’est souhaitable. Maintenant, nous avons l’obligation d’avoir de nouveaux modèles d’affaires tels que préconisés par l’ADISQ. Entre autres solutions: faire en sorte que les fournisseurs d’accès Internet (FAI) créent un fonds qui va servir à soutenir le développement de talents canadiens. Ce fonds serait constitué en prenant 3 % des revenus des FAI. Ça pose deux questions. Premièrement, les fournisseurs ne sont pas très chauds à l’idée, évidemment, car il s’agit de prendre une partie de leurs revenus, donc leur première réponse n’a pas été favorable à notre demande. Ça soulève aussi la question de l’imputabilité des FAI. Dans les faits, les gens qui naviguent sur Internet ne le font pas pour jouer avec la technologie, ils le font pour accéder à des contenus. Il est donc absolument normal que les gens qui commercialisent les contenus qui appartiennent aux maisons de disques paient pour ces contenus.

Une autre solution qui se développe, c’est une offre légale sur Internet. Une offre légale, c’est le site qu’Archambault est sur le point de mettre en ligne, c’est le site Pure Tracks, également en ligne. C’est l’existence d’une offre légale à 0,99 $ pour le même matériel que les gens téléchargent gratuitement par le biais d’un paquet de sites ou logiciels. C’est essentiel mais on ne sait pas pour le moment à quel point ce sera pertinent ou efficace. Si on prend l’exemple du million de tounes qui sont téléchargées (légalement, au prix de 0,99 $/pièce) par semaine sur Itunes d’Apple, il reste que, transposé à l’échelle québécoise, c’est 40 fois moins, donc on arrive à 25 000 tounes par semaine, soit à peu près 10 000 albums. Dix mille albums, Bruno Pelletier les vend à lui seul pendant cette semaine. Donc, statistiquement, l’offre légale est encore très marginale, mais le simple principe de son existence demeure essentiel.

Nous sommes d’accord: il va falloir développer de nouveaux modèles d’affaires, le CD va à terme devenir désuet et nous sommes dans le processus d’adaptation qui va nous permettre, à titre de producteurs et représentants des interprètes musicaux, de faire en sorte que les droits de tout le monde soient respectés dans l’exercice."

Propos recueillis par Claude Giguère