Agitations : Les intentions barbares, Proprio presto, Mangeons à la quincaillerie
Les intentions barbares
Les Québécois auraient dû être en liesse. Enfin, Denys Arcand a remporté l’Oscar du meilleur film étranger! Mais plutôt que de se réjouir en chœur, nombreux ont été ceux qui ont trouvé le moyen de chialer, de teinter cette fabuleuse victoire d’un léger parfum de déception. "On aurait aimé ça qu’il parle! On aurait aimé ça qu’il dise un mot sur le Québec!" Le cinéaste voyait enfin son rêve se réaliser et l’insoutenable pression médiatique s’estomper. Chacun l’avait entendu mille et une fois spéculer sur ses chances de remporter l’Oscar et s’exprimer sur son extraordinaire aventure hollywoodienne. Le réalisateur s’était fait volubile aux Jutra et aux Césars. La prestigieuse statuette dorée en main, il n’y avait plus rien à dire. Tout avait été dit. Sa compagne Denise Robert s’est chargée de dire le reste, avec esprit en prime. De toute façon, c’est surtout dans ses films qu’Arcand s’exprime. Et ça tombe bien, car Les Invasions barbares sont de retour sur les écrans des cinémas de Sherbrooke.
Proprio presto
La nouvelle a ravi les gens pressés de fuir les aléas de la vie de locataire. Depuis lundi dernier, il est possible de s’acheter une maison sans même déposer une mise de fonds. Dans un contexte où le prix des maisons grimpe en flèche, on pourrait se réjouir de la nouvelle. Le quotidien La Tribune le mentionnait cette semaine: le prix moyen des transactions immobilières en Estrie est passé de 94 300 $ en 2001 à 117 000 $ en 2003. Il devient donc de plus en plus difficile d’acheter une maison dans la région. Mais la Société canadienne d’hypothèques et de logement permettait déjà de "réaliser son rêve" avec une toute petite mise de fonds de 5 %. Pour une maison de 120 000 $, c’est à peine 6000 $. Pour un couple, c’est seulement 3000 $ pour chacun. Qu’est-ce que c’est que de prendre le temps d’amasser ce montant d’argent? D’attendre un an, deux ou même trois avant de devenir propriétaire? Le temps consacré à économiser pour un achat aussi important ne vient que magnifier le projet. Les efforts d’épargne permettraient de peser les pour et les contre de l’aventure, de valider l’idée, de vérifier la solidité du couple. Mais aujourd’hui, on doit tout avoir tout de suite, maintenant, sans attendre. Au diable l’endettement! Les valeurs de l’effort et du sacrifice semblent de plus en plus évacuées en cette ère de "tout cuit dans le bec".
Mangeons à la quincaillerie
Parmi les incongruités du paysage sherbrookois figure le Subway situé dans le Réno-Dépôt. Qui diable passe tellement de temps à la quincaillerie pour qu’il lui faille absolument manger sur place? Le concept "resto-magasin grande surface" n’est certes pas nouveau: l’association Wal-Mart/McDo est bien implantée dans les différentes succursales du géant américain. À la limite, on peut comprendre: les achats se multiplient souvent au Wal-Mart. Les parents amènent leurs enfants pour cette "activité familiale" de plus en plus populaire, si l’on se fie au nombre impressionnant de voitures qui envahissent chaque week-end le stationnement du magasin. Mais engloutir un sous-marin entre l’achat d’un tournevis, d’une pelle et de pots de peinture? Vraiment, je ne pige pas. Le pire, c’est qu’on compte une quinzaine de restaurants Subway à Sherbrooke. Si l’envie de manger un sandwich se fait si pressante, ce n’est pas le choix qui manque. On est tellement occupé à consommer qu’on ne prend même plus le temps de bien manger. C’est pathétique.