La communauté païenne à Montréal : L’aura secours
Ils croient en la réincarnation, invoquent des divinités égyptiennes, puisent à même les forces des éléments et manient la baguette magique. Ils refusent de croire que le monde fut créé par un monsieur barbu qu’on appelle Dieu. Ils sont païens. Et fiers de l’être.
Isahée (Julie de son vrai nom) a 27 ans. Païenne affirmée, elle raconte son cheminement, ses rêves et parle de la communauté païenne de Montréal, au sein de laquelle elle est fortement impliquée. Une communauté timide, certes, mais bien vivante. À l’âge de 5 ans, Isahée était déjà convaincue qu’elle était réincarnée. "Je savais qu’il y avait eu quelque chose avant", dit-elle. Plus tard, elle se lancera à la poursuite d’une spiritualité "autre". Elle dévorera la littérature païenne, en découvrira les rites et s’initiera à la magie blanche, qui, à l’opposé de la magie noire, n’a que des effets bénéfiques.
Aujourd’hui, Isahée pratique le paganisme et fête le cycle des saisons. Ses rituels se matérialisent sous la forme de poèmes et d’évocations prononcés le plus sérieusement du monde à une énergie en particulier. "J’invoque Sekhmet, une déesse égyptienne qui apporte force et courage", explique-t-elle. Un dieu, dans le langage païen, n’est pas un personnage sorti de l’imaginaire, mais plutôt une énergie. "Lorsqu’un amas de personnes croit en quelque chose pendant longtemps, cela crée une énergie qu’on appelle un égrégore." Logique.
Isahée explique que le mot "païen" vient du latin paganus qui signifie "paysan". Cinq mille ans avant l’arrivée du christianisme, les païens étaient probablement de simples paysans, qui croyaient aux forces de la nature, célébraient la fin des récoltes ou le solstice d’été. C’est aussi l’époque faste des druides, chamans et autres faiseurs de potions magiques. Pendant longtemps, l’Église catholique a tenté de discréditer les païens. Durant l’Inquisition, du XIIIe au XVIe siècle, les chrétiens ont brûlé vif un million de païens (des non-croyants). Dans le lot, des Juifs et une belle brochette d’hérétiques et de sorcières.
Le paganisme n’est pas une religion, et encore moins une secte: "C’est un "melting pot" de croyances inspirées de celles qu’on trouvait avant le christianisme", explique Isahée. Si la foi chrétienne perd des plumes au Québec, de nombreuses personnes en quête de spiritualité se tournent vers le paganisme. "Présentement, à Montréal, il y a plusieurs coven (des regroupements de sorciers et sorcières) qui suivent différentes traditions (chamaniques, wiccas), explique Marie-Renée Patry, comédienne et magicienne. Les rosicruciens (adeptes d’une confrérie secrète originaire d’Allemagne), par exemple, font un rituel chaque jeudi soir et demandent aux énergies présentes de les aider à purifier l’aura de la planète. Ils envoient des ondes positives pour que la planète se purifie en termes de pollution, mais aussi humainement parlant."
Une étude réalisée au début des années 90 et citée par Mme Patry indique qu’il y avait à l’époque quelque 20 000 praticiens de la magie à Montréal. C’est du monde à la messe! Enfin, façon de parler… "Ce sont des gens ordinaires, qui haïssent la complexité, adorent la vie, aiment boire, manger, fumer du pot et célébrer la vie", ajoute Isahée.
Marie-Renée Patry, que l’on a pu voir dans le rôle de Térésa, l’ange incarné dans le défunt téléroman La part des anges, pratique la magie blanche "d’une façon douce et naturelle" depuis environ 25 ans. "Je travaille plus avec la magie élémentaliste et avec les herbes. C’est une approche beaucoup plus druidique dans mon cas", dit-elle. "Pour moi, quand quelqu’un dit qu’il ne croit pas en la magie, c’est comme s’il disait qu’il ne croit pas en l’humain. On ne peut pas nier qu’on a des ressources intérieures que la science ne peut pas expliquer."
Lieux païens
La comédienne ne se contente pas de faire ses petites incantations en solitaire, elle a cofondé en mars 2003 la boutique Charme & Sortilège (4933, rue de Grand-Pré). Le sorcier du deuxième millénaire y trouvera différents modèles de baguettes magiques, des herbes, des talismans, des boules de cristal, différents modèles de balais de sorciers ainsi qu’une toute nouvelle gamme d’huiles des sorcières pour accentuer les effets d’un sortilège. Des cours d’initiation à la magie ou à la fabrication de baguettes magiques sont aussi offerts.
Pour les intéressés, la boutique Le Mélange Magique (1928, rue Sainte-Catherine Ouest) est aussi très active dans la communauté païenne.