Société

Ennemi public #1 : Le Département des plaintes (encore!)

Youpelaï, du courrier.

Yves Bolduc écrit, en réaction à ma chronique d’il y a deux semaines, concernant la violence des flics au hockey:

"Trop facile, mon cher Desjardins. Votre texte est proprement tendancieux. Vous servir d’une partie de hockey pour glisser vers la brutalité policière ne fait pas très sérieux. Et surtout, ça banalise ce qui ne devrait pas l’être.

La brutalité policière existe pour de vrai, en dehors des enceintes sportives, dans la rue, chez le dépanneur, dans les salles d’interrogatoires. Et ce n’est pas un jeu. Quand un policier abuse de son uniforme pour humilier un jeune Noir, quand un citoyen se fait molester par un malabar en casquette, quand les gros bras insultent des femmes violentées, tout ça, ce n’est pas un jeu. Car l’adversaire n’a pas la possibilité de répliquer. De donner de la bande et de mettre en échec celui qui se sert de son pouvoir pour intimider."

Certes, la violence que vous décrivez est bien pire encore que celle commise par quelques crétins sur une patinoire, mais il existe un code de déontologie et un système – bien imparfait, j’en conviens – permettant de punir les policiers dans la mesure où ils commettent ces fautes dans le cadre de leurs fonctions.

Il s’agissait ici de montrer que l’autorité morale dont disposent les flics sur les gens ordinaires ne s’estompe pas toujours une fois l’uniforme retiré, et que tant que certaines classes à part de citoyens profiteront de cet ascendant sur leurs semblables, dans quelque circonstance que ce soit, il faudra exposer ce rapport de force inacceptable.

Pourquoi l’écrire?

Parce que cela permet de renverser la situation. Pour une fois, ce sont eux qui se sentent pris au piège, qui ne peuvent pas répliquer comme ils le voudraient. Pour une fois, ce sont eux qui ont peur.

Appelez ça comme vous voulez, moi, j’y vois comme une forme de justice.

Mais c’est si bien parti, on continue tout de suite avec un autre message, en direct de mon répondeur. C’est le genre que je préfère, probablement parce que les lecteurs qui me téléphonent sont les plus pompés.

"Je m’appelle Marco, je viens de la Gaspésie. Ça prend vraiment des préjugés de petit bourgeois pour pas être capable d’admettre que le Québec a commencé en Gaspésie, qu’on voit au fond des rivières à 30 pieds de profondeur… Pis toi, tu me parles de la rivière Saint-Charles qui est d’un brun marde dégueulasse. Tu me parles de la ville et du lac Saint-Jean, tu connais pas grand-chose mon p’tit copain. Le Québec, c’est vrai que c’est beaucoup de contradictions, mais c’est pas avec des petits bourgeois ou des gens qui ont des idées arrêtées comme toi qu’on va aller plus loin. Bonne journée."

C’est vrai, mon p’tit copain Marco, sont belles les rivières en Gaspésie. D’ailleurs, après avoir sillonné la baie des Chaleurs, un bel été, je me suis arrêté quelques jours dans un chalet tout juste au bord de la Petite Cascapédia. Et là, devant cette splendeur liquide, j’ai déprimé. En bon petit bourgeois que je suis, j’ai désespéré de toutes ces plages désertées malgré les vacances de la construction, de ce coin de pays grignoté par l’exode, laissé en plan, de ce que l’absence d’élémentaires règles d’urbanisme peut provoquer, comme cette espèce de boulevard Hamel du pauvre qu’est la 132 aux alentours de Carleton … J’ai chialé de tout ce que j’avais vu d’enfer pour enfin trouver un tout petit coin de paradis.

Sont tellement belles les rivières en Gaspésie, mon p’tit copain Marco, sont tellement pures, qu’on dirait que toute cette eau qui coule, c’est la péninsule qui pleure d’avoir été défigurée.

***

Permettez que cesse ici cet épisode larmoyant du Département des plaintes pour faire place à une plogue? Ou plutôt non, une plogue qui se transforme en plainte, mais de ma part. Vous suivez pas? C’est pas grave.

La plogue, c’est pour une série d’émissions de radio à la Première Chaîne de la SRC, cinq tête-à-tête (Pierre Falardeau et Pierre Foglia, Josée di Stasio et Suzanne Lapointe, Stéphan Bureau et Christiane Charrette, Stéphane Bourguignon et François Avard, Normand Brathwaite et Daniel Pinard), du monde qui parle, qui se marre, des monstres médiatiques qui redeviennent presque de simples humains. Ça s’appelle L’Autre Midi à la table d’à côté, et à part la mise en scène un peu nounoune, c’est vraiment du bonbon. Comment je le sais? Parce que je l’ai déjà écouté, c’est une reprise.

D’où ma plainte: lors de la première diffusion, on a fait parvenir l’information aux journalistes à la toute dernière minute. Seule publicité: des annonces maison sur les ondes de la Première Chaîne. Vous croiriez qu’ils vont mieux promouvoir cet excellent "programme" la seconde fois (en ondes à partir du 2 juillet)? Même pas. Du moins, pas encore.

Au fait, qu’est-ce qu’on dit dans ce temps-là: prêcher dans le désert, ou aux convertis?