Questions de culture, 3e partie
Société

Questions de culture, 3e partie

Cette semaine, Andrée P. Boucher et Pierre-Michel Bouchard répondent à la "Lettre aux aspirants à la mairie de Québec". Ils précisent ainsi leurs visions quant à la place de la culture dans les politiques municipales.

La semaine dernière, les candidats Marc Bellemare et Claude Larose répondaient aux questions posées dans la lettre ouverte écrite par des acteurs du milieu culturel. C’est maintenant au tour des candidats Boucher et Bouchard d’expliquer leurs pensées sur la politique culturelle, le budget, la revitalisation de Saint-Roch, la diversification des industries culturelles et leur projet coup de cœur.

ANDRÉE P. BOUCHER: ACCESSIBILITÉ ET PERSUASION

On lui a longtemps reproché son manque d’intérêt pour la culture. Pour cette élection, Andrée P. Boucher a fait ses devoirs. Jointe chez elle avant la parution des sondages qui la place bonne première dans les intentions de vote, Andrée P. Boucher prend le temps de faire le tour du jardin, de raconter les souvenirs de son règne à Sainte-Foy et, surtout, de partager sa vision du rôle de la culture dans la grande ville de Québec.

D’entrée de jeu, Boucher aborde la question budgétaire. Chiffres du dernier budget de la Ville de Québec à l’appui, elle s’étonne du peu d’argent octroyé à la culture. "En 2005, la Ville a dépensé 10,6 millions pour le service de la culture. À l’époque, on en mettait 6 millions à Sainte-Foy. Ça m’a surprise, surtout quand on pense à ce que ça rapporte dans une ville comme Québec." De là à promettre d’augmenter le budget en question, il y une marge que l’ancienne défusionniste a tôt fait de préciser. "Je pense qu’il faut en mettre plus, mais il ne faut pas oublier que je me présente sans équipe. Ce n’est donc pas moi qui vais avoir la balance du pouvoir à la mairie. Je vais avoir un vote et toute l’influence de ma persuasion. Et c’est certain que je compte augmenter la part du budget allouée aux arts et à la culture."

Du côté des actions à entreprendre, Andrée Boucher se dit frappée par la qualité des orientations de la politique culturelle. Elle relève principalement les axes qui consistent à ramener la culture vers les arrondissements. "Il faut maintenant étendre ce qui a été fait au centre-ville vers les anciennes villes de banlieue. On va rapprocher les gens des artistes pour qu’ils arrêtent de penser que la culture est une affaire de snobs. Pour ça, il faut créer des pôles de diffusion dans chacun des arrondissements. Je pense qu’on peut y arriver en liant ça à notre action sur le patrimoine. Il y a de nombreuses églises sur le point de fermer et on doit absolument préserver leur fonction de lieux de rencontre entre les citoyens. Ça pourrait devenir d’excellents centres de création et de diffusion soutenus par la Ville, un peu à l’image de ce qui a été fait pour l’École de cirque."

En ce qui concerne l’urbanisme, elle se dit satisfaite de ce qui a été fait. "C’est bien, on a empêché la ville de se dégrader. C’est une belle impulsion qui a des répercussions positives dans de nombreux secteurs. Mais ça va malheureusement mourir si on élit quelqu’un qui est prêt à vendre sa ville pour un plat de lentilles."

Au sujet de la gestion des institutions culturelles, elle est très réfractaire à l’idée de les confier au privé. "Les PPP sont à prendre avec des pincettes, tranche-t-elle. Ils vont privatiser les profits et socialiser les pertes. Je pense qu’il faut que le secteur public joue son rôle en permettant la diffusion des arts et de la culture à la grandeur du territoire de la ville."

Advenant son élection, sa toute première ambition dans le domaine de la culture est de terminer la construction du Palais Montcalm. "Il faut que ce soit un projet exceptionnel qui fasse la fierté de la ville. On a déjà investi 19 millions là-dedans, il faut le finir en beauté et surtout ne pas en confier la gestion au privé. Après, je vais faire le tour du jardin et voir les projets qui émergent. Mais ma priorité sera d’étendre le goût de la culture dans l’ensemble des arrondissements."

PIERRE-MICHEL BOUCHARD : ÉMULATION ET RESTRUCTURATION

Pierre-Michel Bouchard: «Ma plus grande ambition est d’instaurer un goût d’élite culturelle dans les arrondissements. Pour ça, il faut rendre la culture accessible à tous.»

Pierre-Michel Bouchard se présente comme un passionné de culture, non seulement comme spectateur, mais également comme administrateur culturel. En plus de sa carrière d’avocat, il s’est impliqué dans de nombreux projets comme mécène et bénévole. Dans son parcours riche en expériences, il a notamment présidé les destinées du Festival d’été de Québec et du Grand Théâtre.

Au sujet de la politique culturelle de la Ville, Bouchard se montre très satisfait: "Je m’attendais à ce que ce soit une affaire de rêveur, mais j’ai découvert qu’elle est bien centrée et que sa réalisation est possible." Il partage notamment les grandes orientations de cette politique qui proposent d’étendre l’action culturelle de la ville vers les arrondissements. "Il y a la culture locale et la culture institutionnelle. Je pense que la culture institutionnelle n’est pas toujours le rôle premier de la ville. Elle doit plutôt offrir la culture de proximité. Plus on va enraciner la culture profondément dans les arrondissements, plus on va être capable de la faire rayonner." Pour y arriver, Bouchard propose de structurer le réseau des bibliothèques de la ville de telle sorte que chacune des succursales devienne un lieu de diffusion culturelle de proximité.

Sur le plan budgétaire, Bouchard annonce ses couleurs: "Notre priorité va être le gel des taxes. Malgré ça, on va montrer qu’il reste de la place [dans les finances de la Ville]. Il faut donc dégager les marges de manœuvre nécessaires à la culture." Au-delà du simple soutien financier de la Ville, Bouchard pense qu’on peut réorganiser les groupes culturels afin de faire des économies d’échelle. "Mon expérience m’a appris que l’argent, qui est rare en culture, doit revenir sur le produit culturel et non pas sur la structure. On pourrait donc regrouper les acteurs culturels pour cumuler les ressources matérielles au lieu de les dédoubler."

Lorsqu’on l’interroge sur la revitalisation du quartier Saint-Roch, Bouchard reconnaît la qualité du travail accompli. Pour l’avenir, il ciblerait d’autres coins de la ville à revitaliser. "Je pense que Saint-Roch a eu sa juste part. Maintenant, il faut s’attaquer à d’autres secteurs, comme le boulevard Sainte-Anne, par exemple, qui ressemble à Beyrouth Ouest."

Du côté de la stimulation des industries culturelles et des grands projets, le candidat pense qu’il faut créer un tissu urbain favorable à la culture pour que les créateurs s’installent ici. "On doit les accompagner dans leur démarche et soutenir ce que fait déjà le service de la culture de la Ville. Mais ma plus grande ambition demeure d’instaurer un goût d’élite culturelle dans les arrondissements. Et pour ça, il faut rendre la culture accessible à tous."

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Pour votre information, vous pouvez consulter nos dossiers sur le sujet:
Lettre aux aspirants à la mairie – 22 septembre 2005
Questions de culture, 2e partie – 29 septembre 2005
Questions de culture, 3e partie – 6 octobre 2005
Questions de culture, 4e partie – 13 octobre 2005