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"Lorsque j’étais jeune, je devais syntoniser la bande AM pour entendre de la musique à la radio. Avec le temps, j’ai dû me diriger vers la FM. Aujourd’hui, les radios FM diffusent de moins en moins de musique et de plus en plus de publicités et d’émissions au contenu parlé. Sans oublier les graves problèmes de diversité musicale qui affligent les principales radios commerciales. L’évolution suit son cours, et les mélomanes se tourneront vers une solution de choix: la radio satellite."

Optimistes, certes, mais loin d’être utopiques, ces propos émanent d’André DiCesare, responsable des chaînes francophones de XM Canada. Tout comme Sirius, XM représente l’un des trois diffuseurs auxquels le CRTC a accordé, en juin dernier, une licence d’exploitation de radio satellite. Si la troisième entité, CHUM Limited, met du temps à entrer dans la course, les compagnies américaines Sirius et XM offrent déjà leurs services aux Canadiens, se livrant une féroce bataille de marché. De gros montants sont dépensés pour obtenir l’exclusivité des droits de diffusion de la NFL, NBA, NHL et MLB, alors que les deux réseaux font la course aux animateurs-vedettes: Howard Stern et Eminem sont chez Sirius; Tom Petty et bientôt Bob Dylan évoluent chez XM. Des ententes sont même signées avec les fabricants automobiles. En option, GM offre XM; Chrysler, Sirius.

LA RADIO SATELLITE POUR LES NULS

Que vous choisissiez l’une ou l’autre des compagnies (un abonnement à XM ne permet pas d’écouter Sirius et vice versa), le mode de fonctionnement demeure le même. Vous devrez d’abord débourser entre 80 et 400 $ pour vous procurer un récepteur numérique, car contrairement à Bell et Vidéotron qui offrent le modem-câble à leurs abonnés, XM et Sirius ne prêtent aucun équipement. Sans contrat à long terme, les frais d’abonnement mensuels s’élèvent à 12,99 $ pour XM et 14,99 $ pour Sirius.

Une fois branché, vous aurez accès à 80 (XM) ou 100 (Sirius) chaînes de qualité sonore numérique, diffusant 24 heures sur 24, et ce, presque sans pauses publicitaires (aucune annonce pour les stations musicales et un maximum de six minutes de pub à l’heure pour les stations parlées). "Je ne crois pas qu’un jour la publicité fasse son entrée sur les chaînes musicales, précise André. Les gens paient leurs frais d’abonnement pour entendre de la musique, rien d’autre."

Autre avantage des radios satellitaires, peu importe votre situation géographique en Amérique du Nord, vous capterez le signal. Des antennes furent même installées dans les grandes villes afin d’éviter les interférences causées par les gratte-ciel. Si les voyageurs, les routiers et les retraités qui s’exilent en Floride six mois par année y trouveront leur compte, les casaniers peuvent déjà écouter de la musique continue via Internet ou le réseau Galaxie offert avec la télévision numérique. Ont-ils vraiment besoin d’un gadget de plus?

"La multiplicité des possibilités qu’offre la radio satellite nous permettra de percer le marché, rétorque Andréanne Sasseville de Sirius Canada. La plupart des récepteurs sont portatifs. L’auditeur peut donc l’apporter dans sa maison, mais aussi dans son auto, son chalet ou son bateau."

"C’est clair que ce nouvel avancement numérique a un avenir, lance pour sa part Jean-Robert Bisaillon, éditorialiste sur Bandeapart.fm et véritable penseur critique en matière de nouvelles technologies musicales. Déjà bien implantés aux États-Unis, XM et Sirius ont dépensé des sommes astronomiques pour établir leur réseau. Ils ne l’auraient pas fait s’ils n’étaient pas certains de l’avenir du produit. Je vois ça comme l’avènement du vidéoclip dans les années 80. Ça coûtait cher, on ne savait pas où ça nous mènerait, mais on ne pouvait pas passer à côté."

L’IMPACT SUR LA CULTURE

Au moment d’accorder ses licences aux radios satellites, le CRTC s’est attiré les critiques de la SOCAN, l’ADISQ, la Guilde des musiciens et l’Union des artistes. C’est que l’organisme gouvernemental exige qu’un mince 10 % des chaînes Sirius et XM soient canadiennes. "Si le CRTC avait mis ses culottes, il aurait exigé un pourcentage plus important, affirme Jean-Robert Bisaillon. Il faut éviter que l’implantation de cette technologie se fasse sauvagement. Les règles du jeu en matière de contenu national et de diversité culturelle se doivent d’être strictes. Du moment où tu as un réseau américain qui débarque ici avec 100 chaînes et que son contenu canadien n’est que de 10 %, j’ai des réserves."

Si les diffuseurs respectent au minimum cette règle du 10 %, ils vont au-delà des autres quotas imposés par le CRTC (85 % de contenu canadien pour les chaînes d’ici et 65 % de contenu francophone pour les chaînes françaises). "Nous le faisons pour soutenir les artistes canadiens, précise Andréanne Sasseville. Notre but est d’aider la relève et de soutenir les talents d’ici."

En ce sens, les deux joueurs se sont également engagés à investir dans des fonds pour le développement de talents canadiens. Si XM a remis 50 000 $ aux Trois Accords et à Stefie Shock pour leur prochaine tournée européenne, Sirius injectera un minimum de 20 millions de dollars dans la culture canadienne sur une période de sept ans, soit 5 % de ses revenus nets estimés pour cette même période. De ces fonds, 50 % ira à la culture d’expression francophone.

"J’espère seulement qu’ils investiront de manière intelligente, poursuit Jean-Robert. Un chanteur sous contrat avec une machine comme DKD ne manque pas de moyens pour se développer. Souhaitons que Sirius et XM connaissent assez bien la scène émergente pour investir aux bons endroits."

CHOISIR SIRIUS OU XM?

Sachez que les deux compétiteurs offrent une grande variété de chaînes musicales au contenu très pointu (pop, country, jazz, hip-hop, dance, musique latine, blues, comédies musicales, humour, classique et musique chrétienne). Cependant, contrairement à XM qui a dû créer ses chaînes parlées francophones de toutes pièces, Sirius compte sur un partenariat avec Radio-Canada, ce qui lui confère une expertise et une notoriété inégalées par XM.

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SIRIUS

Avantages

– Programmation francophone parlée assurée par Radio-Canada qui y diffuse Bande à part ainsi que plusieurs émissions de la Première Chaîne et de RDI.

– Meilleure diversité musicale côté rock avec 18 chaînes spécialisées.

– La chaîne hip-hop Shade 45 est dirigée par un certain Eminem.

Désavantages

– Pas de hockey ni de chaînes sportives en français.

XM

Avantages

– Diffusion des matchs des Canadiens et des Sénateurs en français.

– Compte la seule chaîne francophone axée sur le sport en Amérique: Franc Parler.

– Tom Petty anime une émission hebdomadaire d’une heure sur la chaîne Deep Tracks et Bob Dylan fera la même chose dès mars 2006.

Désavantages

– Aucune chaîne d’information continue en français.

– Comparée aux réseaux d’information de Radio-Canada, la chaîne culturelle Quoi de neuf? manque considérablement de crédibilité avec une heure de nouvelle programmation par jour pour 23 heures de reprises…