Sculpteur : Sculpter sa vie
Société

Sculpteur : Sculpter sa vie

La sculpture s’intègre de plus en plus au paysage: restos, parcs, salons de coiffure branchés… Elle n’a pas de limite! Qu’en est-il du métier?

Le portrait du sculpteur ne se taille pas dans de l’or massif. S’il permet de goûter au plaisir de donner la vie, ce métier demeure terriblement exigeant. De fait, il faut avoir des nerfs d’acier et une patience de fer pour réussir dans ce domaine. Plus d’une dizaine d’années d’expérience sont souvent essentielles afin de pouvoir espérer vivre de son art, et encore. Roger Gaudreau, Marie-Josée Roy et Jocelyne Duchesne, trois sculpteurs de la région, parlent de leur passion.

Roger Gaudreau, dont l’œuvre contemporaine Suspendre le temps est placée à l’entrée de la Maison de la culture de Trois-Rivières, confirme: "Une des qualités qu’il faut avoir pour être sculpteur, c’est la patience. Et il faut aimer transformer les matériaux. Tu sais, ça prend des années avant d’arriver à se faire un réseau dans le milieu." Il raconte que cela a pris près de 20 ans avant que les contrats se bousculent à sa porte, et qu’il arrive encore des moments où la sonnette ne teinte plus. Selon lui, ce ne sont pas nécessairement ceux qui ont le plus de talent qui réussissent à percer, mais bien ceux qui se montrent persévérants. Car les collectionneurs se font plutôt timides dans la région, et même au Québec. Les créateurs doivent donc taquiner le marché anglophone (New York, Toronto, l’Ouest canadien, etc.), qui nourrit un lien un peu plus solide avec l’art. Gaudreau admet qu’il a toujours exercé un autre travail à temps partiel en parallèle. Il est chargé de cours à l’Université du Québec à Trois-Rivières depuis 1984, et il ira prochainement enseigner à Halifax en Nouvelle-Écosse.

Marie-Josée Roy, qui travaille le métal et qui a vendu certaines de ses créations à des entreprises comme l’Embuscade ou l’Orange kaki, va dans le même sens: "Je vois ça à long terme. Tu vois, ça fait 10 ou 15 ans que je fais ça, et ça fait 6 mois que j’en vis. Je nourris mes deux enfants avec ce travail. Mais il faut être hyper-persévérant." Doit-on se prostituer et créer en fonction des besoins du marché pour réussir? La passionnée ne le croit pas, sa production actuelle séduisant une kyrielle d’acheteurs qui viennent autant de la région que de Montréal. Elle aborde la question de la forme physique. Transformer la matière demande beaucoup d’énergie, soutient-elle.

Jocelyne Duchesne, quant à elle, s’intéresse beaucoup au marché "corporatif". Elle fait entre autres le design de trophées. Elle a notamment créé celui du Prix Radisson. " À Trois-Rivières, le marché de l’œuvre unique est plus restreint. Mais, aujourd’hui, il y a les galeries, Internet…" souligne-t-elle. Finalement, le métier de sculpteur n’a de limite que celle de l’imagination.