Fonds de placement éthiques : Contribution éthique
Société

Fonds de placement éthiques : Contribution éthique

Les fonds éthiques gagnent en popularité depuis une quinzaine d’années. Qu’on les perçoive comme des investissements responsables ou comme de l’achat de bonne conscience, il n’en demeure pas moins qu’ils confirment le rôle politique de l’actionnaire.

Hélène Gagné

, directrice de la commercialisation des fonds chez Desjardins, explique l’origine des investissements responsables: "Au milieu du siècle dernier, les communautés religieuses ont été les premières à demander un contrôle sur la nature des portefeuilles d’actions qu’elles achetaient. Elles ont alors exigé la création de filtres pour écarter certains types de compagnies qui ne convenaient pas aux valeurs véhiculées par l’Église."

Avec la responsabilisation des actionnaires par rapport aux pratiques industrielles, l’idée de créer des filtres pour les investissements a engendré ce qu’on appelle aujourd’hui les fonds éthiques. "Il existe deux types de filtres dans les fonds éthiques, précise Hélène Gagné. Les filtres négatifs consistent à écarter complètement un secteur d’activité du portefeuille, l’industrie de l’armement, par exemple. Les filtres positifs, eux, favorisent l’achat d’actions d’entreprises qui, par leurs pratiques, respectent certains principes chers aux investisseurs. Chez Desjardins, par exemple, le Fonds Environnement a été créé dans cet esprit en 1990. Dans ce fonds, on ne trouve que des entreprises qui respectent certains critères environnementaux établis par Desjardins. Comme c’est un geste politique, il est important pour l’investisseur de bien se renseigner sur le contenu des fonds qu’il achète."

Malheureusement, l’effet réel des fonds éthiques sur les pratiques des entreprises semble plutôt mince. Comme le rappelle Jacques Racine, professeur d’éthique des affaires à l’Université Laval, "même si le principe est bon, les fonds éthiques demeurent des masses d’épargne relativement marginales. Étant donné cette marginalité, le levier de pression sur les industries est plutôt inexistant. Les investisseurs sont en train de jouer un rôle éthique très important, mais ce n’est pas par les fonds éthiques qu’ils le font, du moins pas encore".

Dans le domaine de l’investissement, la véritable force de frappe vient bien souvent du nombre. La transformation des grands groupes d’actionnaires en acteurs politiques risque d’entraîner de profonds changements. "L’activisme des actionnaires mobilise de plus en plus de fonds de pension, explique Jacques Racine. Ces groupes, qui possèdent une masse importante d’actions, se dotent de politiques d’éthique en ce qui a trait à leurs investissements. Dès lors, ils cessent d’exiger uniquement du rendement des gestionnaires. Ils demandent que leurs voix servent à poser des gestes de citoyens responsables. On sent d’ailleurs ce changement. Il y a présentement une profonde responsabilisation des grands groupes d’épargne, qui constatent l’immense pouvoir décisionnel qu’ils détiennent. Il leur suffit maintenant de se donner la peine de faire changer les choses."