L’Annuaire du Québec : Radiographie collective

Paru pour la première fois en 1995, L’Annuaire du Québec se veut un ouvrage de référence destiné au grand public et aux experts. Véritable mine de renseignements sur les grandes tendances qui agitent la société dans toutes ses sphères, L’Annuaire peut compter, année après année, sur les lumières des plus grands spécialistes québécois dans leur champ d’expertise.

Depuis 2003, la direction de L’Annuaire est assurée par les journalistes Michel Venne et Antoine Robitaille, en remplacement de Roch Côté qui en était à la tête depuis 1995. Dès l’édition 2004, de nouvelles sections furent ajoutées sur les phénomènes religieux et l’administration publique. Le graphisme fut également modifié.

L’édition 2006, dans laquelle figurent les textes inédits de 115 auteurs, dont ceux des ex-premiers ministres Jacques Parizeau et Pierre Marc Johnson, a aussi connu de petites modifications la rendant plus vivante et plus attrayante, de l’avis d’Antoine Robitaille, éditeur adjoint de L’Annuaire. "Il y a plus d’illustrations et de photos cette année. On est peut-être aussi un peu moins universitaire. Pour ma part, je voulais que L’Annuaire soit plus dynamique, c’est-à-dire qu’au-delà des statistiques et des données, il rende aussi compte des débats de société. Sans réduire la quantité de statistiques, on a donc ajouté une section débat, "2005 en sept polémiques". Dans l’anglophonie, il y a le concept de year book, qui se veut un ouvrage ne contenant que des statistiques, pas de textes. Nous, on fait à la fois year book, annuaire et un peu almanach, avec des débats et de l’opinion."

Parmi les sept grands débats ou polémiques de l’année 2005 retenus par L’Annuaire, notons la grève des étudiants contestant les compressions annoncées de 103 millions $ dans le régime des prêts et bourses, le scandale des commandites, le succès de l’émission Tout le monde en parle et la controverse entourant le futur emplacement du CHUM.

Bien placée en ouverture, une autre nouveauté de l’édition 2005, la section "Les défis du Québec", a fait grand bruit, surtout l’entrevue avec Jacques Parizeau, et a fait en sorte que l’on parle de l’ouvrage dans les médias, poursuit M. Robitaille. "Cette année, L’Annuaire a vraiment fait la nouvelle pour la première fois. On avait du contenu inédit. L’entrevue avec Parizeau a fait beaucoup jaser. Celle avec Pierre Marc Johnson aussi. Les deux disaient entre autres qu’il faudrait faire une certaine place au secteur privé en santé. Cela a attiré l’attention sur L’Annuaire."

Outre messieurs Parizeau et Johnson, 35 leaders d’opinion de tous les horizons et de toutes les générations, identifiés comme étant de gauche ou de droite, souverainistes ou fédéralistes, conservateurs ou libéraux, ont exprimé leurs vues au sujet des grands défis que devra relever le Québec au cours de 2006. Le succès de l’exercice fut retentissant, continue M. Robitaille. "Je suis allé à Bazzo deux fois pour discuter de ces textes. Puis elle a reçu des gens qui ont écrit dans cette section durant une semaine."

L’Annuaire du Québec souligne pour la première fois cette année les anniversaires marquants, comme la naissance du peintre Alfred Pellan en 1906, l’élection du Parti québécois le 15 novembre 1976, le déluge du Saguenay en 1996 ou la naissance de TQS en 1986, souligne M. Robitaille.

Pourquoi un annuaire alors que l’année durant, on est submergé d’information, surtout depuis l’apparition d’Internet? "Pour moi, c’est à la fois notre boule de cristal et notre rétroviseur. Ça sert à faire le point. C’est aussi une espèce de résumé de la recherche actuelle sur le Québec. Quelqu’un qui voudrait se faire une idée générale du Québec serait bien servi en lisant l’ouvrage. On a même parfois des données que l’Institut de la statistique du Québec n’a pas encore! Au fond, L’Annuaire nous permet de voir où est rendu le Québec et vers où il devrait aller. Un livre comme ça est tellement pratique parce que les journaux, c’est l’histoire qui se fait. Or, L’Annuaire, c’est un premier recul face à l’histoire qui se fait. Un peu comme un journal augmenté."

Êtes-vous satisfait de l’accueil que les médias et le public réservent à l’ouvrage? "Cette année, L’Annuaire a fait beaucoup parler de lui. Est-ce suffisant? Non, j’aimerais qu’il se vende autant que L’État du monde! Mais je crois qu’il s’en est vendu plus d’exemplaires que par les années passées. Le problème de L’Annuaire, c’est son titre. Je milite depuis longtemps pour qu’on le change. Annuaire, ça fait annuaire téléphonique! Ç’aurait dû s’appeler L’État du Québec, comme L’État du monde ou L’État de la France", poursuit M. Robitaille.

"Ce que j’aimerais, c’est qu’on puisse avoir des données tellement inédites que ça fasse la nouvelle. D’une part, L’Annuaire doit faire la nouvelle pour se faire connaître davantage. D’autre part, il faut absolument continuer sur notre lancée en le rendant plus dynamique et plus près des débats de société", ajoute-t-il.

Avec les Michel Venne et Antoine Robitaille en tête soutenus par le photographe Jacques Nadeau, le caricaturiste Garnotte et les plumes de Michel David, Jean Dion, Christian Rioux, Robert Dutrisac, Louis Cornellier et Fabien Deglise, entre autres, l’empreinte du Devoir est bien visible dans L’Annuaire. Trop? "On veut élargir, sortir de notre famille immédiate du Devoir. Accueillir des gens d’un peu partout. C’est vrai qu’on a été un peu francophone blanc montréalais jusqu’à maintenant, mais il y a beaucoup de nouvelles plumes cette année. Mario Roy de La Presse a publié un texte. Dominique Garant nous a fait un texte très documenté sur Tout le monde en parle, tout comme Pierre Anctil sur les écoles juives et Éric Bédard sur la grève des étudiants. Et surtout, on a un texte de Jean-Pierre Desaulniers sur TQS. Un beau cadeau juste avant sa mort", conclut Antoine Robitaille.

L’Annuaire du Québec 2006 (Fides – Institut du nouveau monde)
750 p.