Société

Pop Culture : Debout! Et qu’ça saute!

À la fin du spectacle, les artistes épuisés se présentent à l’avant-scène. Main dans la main, ils se penchent avec un geste solennel qui semble les soumettre au courroux du public. Les spectateurs en liesse se lèvent comme un seul homme, font bruyamment entendre leur reconnaissance d’avoir pu vivre cet événement qui restera gravé à jamais dans leur mémoire…

Un regard furtif derrière l’épaule; devrais-je me lever? Léger malaise. Y aura-t-il encore une ovation? C’est toujours avec la même surprise que je vois les gens se dresser à la fin de chaque spectacle en faisant retentir un tonnerre d’applaudissements. Comme si ça allait de soi. Comme si l’ovation n’était qu’une étape à franchir avant de partir – il faut bien se lever pour enfiler son manteau…

Je pense à ce pauvre comédien qui sait pertinemment que son travail n’était pas parfait. Qui a oublié un geste, peut-être. Qu’un bruit venant des coulisses a dérangé pendant son monologue. Sa langue qui a fourché. Élevé jusqu’au triomphe, il aura raison d’être perplexe. De se demander quelle est la véritable motivation de ces gens qui crient au génie.

Ou encore, je pense à ces consommateurs de culture qui ont vu comme moi les foules se lever pour acclamer chaque spectacle. S’ils se trouvent, pour une fois, devant une oeuvre qui les a vraiment fait chavirer… Comment faire pour le signifier? Jusqu’où devront-ils aller pour faire comprendre aux artistes que cette fois, c’est vrai? Qu’ils ont vraiment réussi une oeuvre magistrale?

Encore tout dernièrement, à la fin de la première représentation de Fleurs d’acier, je suis resté bouche bée devant le délire de la petite foule entassée au Centre culturel d’Alma. Qu’on me comprenne bien: il s’agit dans l’ensemble d’un bon spectacle, divertissant à souhait. J’ai été secoué de plusieurs éclats de rire. Certains spectateurs m’auront peut-être même vu m’essuyer le coin de l’oeil en espérant passer inaperçu. C’est que l’émotion provoquée par le monologue déchirant de Jacqueline (Monique Gauvin) était portée à son comble par la bouleversante performance silencieuse de Maud Côté, jouant le rôle d’une Louisette envahie par une tristesse sentie.

Or, humblement, j’oserai affirmer que ce show ne méritait tout de même pas une ovation à tout rompre. Les quelques problèmes techniques survenus lors de la représentation, entre autres les problèmes de sonorisation qui nuisaient à l’effet de réalisme, aussi quelques répliques enchevêtrées dont les comédiennes elles-mêmes auront certainement eu conscience – les gens de théâtre sont souvent de bien pires critiques que moi -, somme toute des détails qui n’ont pas empêché les spectateurs de passer une soirée agréable, mais qui ne permettent tout de même pas de croire à un chef-d’oeuvre…

Il m’en aura pris du temps avant de comprendre ce qui s’était vraiment passé. Ce soir-là, obstinément – comme lors de bien des spectacles auparavant, honni soit qui mal y pense -, je suis resté assis lors de cet hommage qui me semblait démesuré. Avec le recul, j’ai compris que l’événement qui s’était produit allait bien au-delà du simple spectacle. Il ne s’agissait pas de la somme du travail de chacune des comédiennes et des autres artisans ayant collaboré au bon fonctionnement de la pièce. Que je suis bête. Ce que le public a voulu manifester, c’est sa joie de voir à nouveau du théâtre professionnel à Alma. Après la triste disparition du Théâtre populaire d’Alma en 2003, plusieurs attendaient avec impatience que se concrétise le projet de Ricky Tremblay.

Serait-il possible que les ovations ne s’adressent pas au spectacle? Qu’elles encouragent plutôt la vie culturelle régionale pour laquelle chaque événement est une victoire? Qu’elles élèvent ses artisans au rang de pionniers montrant à la face du monde ce dont les gens d’ici sont capables? Pour ma part, ayant une tribune pour promouvoir l’intensité de la vie culturelle régionale, je continuerai de n’offrir qu’avec parcimonie mes ovations. À votre tour de voir ce que ce geste peut représenter pour vous…

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À PART ÇA…

Jorane, chanteuse invitée pour la soirée Chant’appart, donnant le coup d’envoi du Festival de la chanson de Tadoussac.

Le Festival de la chanson de Tadoussac s’en vient à grands pas. Le premier événement, hors programmation, est la soirée Chant’appart, qui accueillera la chanteuse québécoise Jorane et le chanteur français Xavier Lacouture. Cette année, c’est Micheline Simard, présidente du Festival, qui sera l’hôte du spectacle, nous accueillant chez elle pour cette prestation intime, le 3 juin. Il faut aussi surveiller, les 2 et 3 juin, le Bal des bretelles, alors que Vladimir Sidorov, Caroline Meunier et Ryna Wolteger, tous trois liés par leur passion pour l’accordéon, se produiront sur la scène du Côté-Cour.