Société

Pop Culture : Manifestement

Manifestement, la poésie s’en va chez l’diable. On a bercé mon éducation de manifestes illustres qui ont alimenté les rêves les plus fous, qui m’ont permis de voir la place que j’ai dans le monde. Alors quand au lieu de nous exposer un verbe acéré et des envolées percutantes, on se perd en flagorneries de toutes sortes…

La population a raison de garder la tête froide après avoir lu le Manifeste de l’Ashuapmushuan. Je suis toujours un peu frileux quand on cherche à me louanger sans commune mesure. L’abus flagrant d’adjectifs comme les flatteries diverses qui ponctuaient le texte ne pouvaient que donner l’impression de cacher quelque chose.

Chers baby-boomers… Bien sûr, lorsque vous faites le constat désastreux de ce que vous laissez à notre génération, la culpabilité vous étouffant, vous cherchez vraiment à trouver des solutions. Mais les actes que vous avez posés, les décisions que vous avez prises – ou omis de prendre -, ce cul-de-sac au fond duquel vous nous avez accouchés… N’est-il pas normal que nous ayons peine à croire que de véritables solutions puissent émaner de vous?

Vos motifs sont louables. Mais vos suggestions sont marquées de votre fer, signées B-B comme un graffiti saignant la sève de quelque arbre – il y en a combien de milliers "sur le 75 % de notre territoire qui est inaccessible et qui se protège lui-même"? Non seulement vos propositions ne sont-elles pas à la hauteur des attentes de ma génération, mais elles font fi de l’urgence avec laquelle il faut réagir pour panser nos terres brûlées. Et chaque fois, Monsieur Lajoie, que dans votre "manifeste" vous avez écrit "nous avons toujours le choix", vous réussissiez surtout à prouver que vous n’avez pas compris une chose primordiale: nous n’avons plus le choix. Et c’est un constat aussi amer qu’une larme, serrant la gorge des représentants de ma génération, lorsque nous voyons comment est aujourd’hui traitée la question de l’environnement. Toujours à la va-vite, comme si prendre le temps de bien faire les choses pouvait être nuisible.

"À trop crier au loup pour rien, on perd sa crédibilité", avez-vous affirmé. Qu’en est-il de votre propre crédibilité? Le problème, ce n’est pas cet optimisme ahurissant et sans fondement qui vous pousse, dans un élan d’enthousiasme, à annoncer que la route des fourrures serait "l’attrait touristique le plus singulier de la planète qui attirerait l’élite de la classe touristique internationale", ou encore que le parc thématique "sera très achalandé et il deviendra une référence". Vous qui traitez les environnementalistes de "vendeurs de mirages"… Holà! On ne peut pas danser plus vite que le violon, comme dirait l’autre.

L’erreur qui ternira le plus l’éclat de votre projet auprès des jeunes, c’est probablement d’avoir dénigré les études et débats entourant la présence de mercure dans les bassins, alors que vous avez vous-même soutenu qu’"un simple débat n’est pas menaçant". Il est plus facile de choisir son débat, peut-être.

De plus, alors que d’une main vous caressez le projet de ces barrages monstres sur l’Ashuapmushuan comme une solution possible aux problèmes causés par la consommation abusive de pétrole, de l’autre, vous tracez déjà le trajet du plus long sentier de motoneige et de VTT de la planète… Et alors que vous décriez le joug des grosses compagnies étrangères sur le développement de la région, vous pensez vous servir d’un bloc d’énergie industriel pour attirer plus facilement papetières et alumineries…

Vous avez dit de nous, les jeunes, que nous savons "qu’on ne peut pas écarter les impératifs économiques de la vie tridimensionnelle pour la seule protection bucolique de l’environnement". C’est faux. Ce que nous avons compris, c’est qu’on ne peut plus écarter nos préoccupations environnementales des décisions économiques. C’est ça, le développement durable.

Qu’on se comprenne bien. La région doit se prendre en main. La population a le pouvoir de se donner des projets. Mais est-ce à dire qu’il faut foncer tête baissée et se laisser endormir par des hommes d’affaires faisant fi de nos préoccupations environnementales? L’histoire du Saguenay-Lac-Saint-Jean est celle de pionniers qui ont su voir grand, personne ne le dément. Mais voir grand, aujourd’hui, c’est être citoyen du monde.

ooo

Calendrier chargé

Le groupe LéOparleur, qui sera au Café Cambio jeudi et à l’Île-du-Repos vendredi.

Plusieurs spectacles sont au calendrier cette semaine. Parmi ceux-là, le groupe Les Shirley, mon coup de coeur, sera en première partie des Chiens au Côté-Cour le 15 juin et jouera au Vieux Clocher d’Alma le 17 juin. Il faut aussi noter la présence de LéOparleur, un groupe très coloré originaire de Strasbourg et qui fera un saut dans la région après trois concerts aux FrancoFolies de Montréal, au Café Cambio le 15 juin et à l’Auberge Île-du-Repos le 16 juin. Angel Forrest, particulièrement appréciée dans la région, sera aussi à l’Île-du-Repos le 17 juin.