On mange de la fondue!
L’hiver donne le goût des rapprochements et des soupers qui s’éternisent afin de meubler les soirées qui s’amènent bien trop tôt. Pour combler ces besoins, rien de mieux que le repas convivial par excellence: la fondue.
Sophie Marcotte
Photo : southeastdairy.org
Entre les fourchettes qui s’élancent dans le caquelon communautaire, les ustensiles qui s’entrechoquent et les bols de trempettes qui se relaient de main à main, la bonne humeur et l’esprit de partage règnent en maîtres. Rassemblés autour d’un bouillon commun, on festoie, on fait naître de bons moments, parfois provoqués par la coquine tradition qui rend ces repas encore plus sympathiques (quand on perd son morceau de pain dans le fromage ou sa bouchée de viande dans le bouillon, on doit embrasser son voisin de gauche… ou de droite, les opinions varient). Encore mieux, un repas de fondue représente une forme d’éloge de la lenteur, un art qui se perd de plus en plus.
À La Grolla, "le petit café suisse du Vieux-Québec", on fait la part belle à ce savoir-faire: sur le menu se côtoient les fondues suisse, chinoise, bourguignonne, de fruits de mer, Bacchus (bouillon au vin rouge et champignons sauvages), au chocolat, à l’érable, ainsi que la fameuse raclette suisse. La taille modeste de la salle à manger, le foyer et la décoration alpestre finissent de rendre l’endroit chaleureux au possible. "Nos clients prennent surtout de la fondue suisse, qu’ils cuisinent moins", fait remarquer le propriétaire, Jean-Yves Lapointe.
Si votre seule incursion dans l’univers de la fondue au fromage se résume à un triste mélange Swiss Knight acheté au supermarché, il est temps de remédier à la situation, même si ne réussit pas qui veut une fondue suisse au premier essai. "Ça a l’air facile à faire, mais ce n’est pas simple, expose-t-il. L’important, c’est d’avoir de bons produits de base, donc des fromages de qualité – les fromages suisses sont imbattables pour ça! Même si la texture n’est pas parfaite, si le mélange de fromages est bon, ça ne pourra pas être mauvais."
Autre détail crucial: le pain ne doit pas être trop frais, car il aura tendance à se défaire dans le fromage fondu et sera aussi moins facile à digérer, créant une espèce de boule dans l’estomac. "Pour varier, on peut aussi tremper des légumes dans le fromage, et même des fruits. C’est excellent", ajoute M. Lapointe.
La raclette, elle, a été passablement dénaturée au Québec, avec les fours ronds munis de plusieurs poêlons dans lesquels on fait griller des charcuteries, des légumes et du fromage. "Les Suisses n’aiment pas que les Québécois appellent ça de la raclette. Eux disent que c’est de la "raclonette"… Au final, c’est plus du gratiné", rapporte M. Lapointe. Originaire du canton de Valais, la "vraie" raclette consiste à faire fondre lentement un bloc de fromage raclette sur un appareil prévu à cette fin, puis à racler la partie ramollie avec un couteau pour la mettre sur du pain. Le tout est servi avec des pommes de terre, des oignons marinés, des cornichons et des charcuteries – idéalement de la viande séchée des Grisons, une charcuterie suisse à découvrir sans faute, selon le propriétaire de La Grolla. Comment s’en tirer avec les fours à raclette qu’on trouve ici? "On peut faire fondre le fromage en petite quantité dans les poêlons. Mais attention de ne pas le faire griller", prévient-il. Évidemment, on repassera pour l’étape du raclage.
Quant aux traditionnelles fondues chinoise et bourguignonne, varier les aliments "à tremper" permet de réinventer ces classiques: crevettes et pétoncles, viande de gibier, fromage gruyère, etc.
RECETTES TRADITIONNELLES SUISSES, GRACIEUSETÉ DE LA GROLLA
La fondue des amoureux: la moitié-moitié
Ingrédients pour deux personnes
100 g de gruyère suisse premier cru classé
100 g de fromage Montagne blanche
175 ml de vin suisse (Fendant du Valais)
1 gousse d’ail
Poivre et muscade
Maïzena (fécule de maïs)
Râper et mélanger les fromages. Éplucher l’ail et frotter le caquelon avec la gousse (facultatif, mais ça fait partie du rituel!). Verser le vin dans le caquelon, laisser chauffer, puis incorporer le mélange de fromages. Brasser et laisser fondre le fromage. Assaisonner au goût avec le poivre et la muscade. Si la préparation n’est pas assez épaisse, ajouter de la maïzena.
Déguster avec du pain légèrement vieilli et un bon vin blanc sec, pas trop sucré, idéalement suisse.
La raclette suisse
C’est tout simple: vous faites fondre un morceau de raclette suisse d’environ 200 g et vous le dégustez avec des pommes de terre, des petits oignons marinés, des cornichons (vinaigrés, pas sucrés), du pain baguette et de la viande séchée des Grisons. La raclette s’accompagne de vin rouge ou blanc, selon votre préférence.