Pop culture : Oh! Quand j'entends chanter…
Société

Pop culture : Oh! Quand j’entends chanter…

Quand commencent à tinter (toujours trop tôt) les grelots de Noël, tu en as des frissons – que tu ne décrirais pas comme agréables. Ce n’est pas une question de magie, tu te laisses même imprégner sans trop de difficulté par l’esprit des Fêtes, surtout depuis la naissance de ton premier. Mais rien ne t’agresse plus que d’entendre en sourdine l’écho d’une vieille toune de Noël en conserve dont on te bombarde à tous coups, à l’épicerie, à la télé ou à la radio – que tu ouvres non sans une certaine crainte à cette époque de l’année.

À tous coups surgit cette chorale qui hulule avec conviction… Ou alors se fait entendre ce has-been qui cherche à se renflouer en fignolant le même damné disque de Noël – changeant simplement un trémolo de place à l’occasion -, question de gagner de l’argent sur le dos de la tradition… Tu n’iras pas jusqu’à les nommer (la liste serait longue), mais cette pointe de méchanceté te fait sourire. Ça fait du bien, parfois, être simplement méchant.

Même le magasinage du temps des Fêtes ne serait pas si désagréable si ce n’était des damnés grelots convertis en musique de centre commercial et tous ces Adeste Fideles tonitruants étouffés par les haut-parleurs des boutiques encombrées. Il y a de quoi vouloir repousser toujours plus la date ultime de ce bain de foule de l’avent devenu incontournable – il faut bien vivre dans son époque.

Ben oui, toi aussi tu as dans la tête un vieux sapin, une crèche en d’sous. Le problème, c’est que ton beau sapin, cette année, n’a rien de majestueux. Tu as choisi cette petite chose rabougrie qui n’a rien de naturel. Ni de forme, ni de taille, ni de couleur. Un bidule fastoche en plastique, dépouillé de tout attrait, ce genre d’objet qu’on préfère peut-être oublier, qui encombre la vue plutôt que l’appartement.

L’heure solennelle approche, bientôt 23 décembre et sa culpabilité – beau dommage si tu n’as pas trouvé tous tes cadeaux. Soit tu te payes un autre bain de foule – parmi les pires marées humaines, le flot des affolés qui ont comme toi attendu trop longtemps, soit tu abandonnes et t’en mords les doigts. Et tu regrettes qu’il ne descende pas vraiment du ciel, la poche pleine, ce joufflu bedonnant et rigolard un peu freak que plus personne ne remet en question… Tu regrettes qu’il ne suffise pas de commander – pour le pôle Nord, tu peux toujours te laisser à espérer niaisement, mais pour le Web, il est déjà trop tard: ça ne te parviendrait pas à temps.

Minute, crétin. Il suffit. Les angoisses de la procrastination devraient rapidement s’apaiser lorsque sera réunie la famille.

Il paraît qu’on est chanceux d’avoir de la neige, chez nous. Ailleurs, c’est dans la tête qu’il neige pour Noël. Si rien ne change, les Fêtes feront un peu Florida sur les bords. So let it snow! Let it snow! Let it snow…

Mais pas le 24 – il faut bien que tout le monde se rende. Et sur les routes, ce ne sera pas évident: il n’y aura pas que des anges dans nos campagnes. Les défroqués de la région reviendront, comme ils en ont l’habitude, question de jouer de la racine dans notre terreau gelé. Ils traverseront la réserve faunique, comme des troupeaux de caribous sur les hautes, pour veiller toute la sainte nuit.

Tous ensemble: ".mon pauvre sapin, un peu discret/tu manques de parure."
photo: Marie-Josée Hardy

Alors que tu retrouveras les tiens s’effaceront les quelques conflits qui se sont peut-être immiscés entre vous – comme dans les meilleures familles -, trêve qui durera tant que seront tus les sujets à saveur politique… On en fera la plus belle nuit du monde, de cette nuit de Noël – Glory Alleluuuuia! Et on se fera rocker le jingle bell toute la nuit…

So let it snow! Let it snow! Let it snow… Mais pas trop le 25 non plus, question que tout le monde puisse repartir. Coucher trois jours d’affilée au même endroit, comme ce fut le cas pour plusieurs Québécois l’année dernière, ce n’est pas toujours facile. On s’aime bien, mais on aime bien s’aimer avec parcimonie. Et c’est correct ainsi.

Et pour le jour de l’An, avec l’énergie qu’il te restera après avoir défoncé l’année et toutes tes réserves, tu accueilleras les bons voeux hâtivement – puisqu’il faut bien le faire – dans le larmoiement généralisé. Et tu te surprendras à penser que c’est déjà fini. Les grelots se seront tus. Ce n’était pas si mal, au fond. (Ce que tu auras bien sûr oublié au début de décembre 2007, quand les grelots reviendront te hanter.)

D’ici là, tu retournes à ton sapin faiblard, écoutant sans l’avouer (oups!) les complaintes nasillardes du Noël à la campagne de la famille Larin. C’est à sa festive sagesse que tu bois le plus facilement, ses hymnes à l’ivresse t’aidant à renouer un peu plus facilement avec le toc un peu froid du Noël d’aujourd’hui. T’es pas mieux qu’un autre, bonhomme!

ooo

VOEU, VOEU PAS

Toute l’équipe du Voir se joint à ma voix pour vous souhaiter un joyeux Noël aux mille bougies. Soyez prudents sur la route, pa ra pa pam pam, du royaume du bonhomme Hiver. On se retrouve en 2007 pour une année de haute culture, de découvertes, de rencontres et de nouveautés.