Prescription humanitaire
Société

Prescription humanitaire

Après dix ans de lutte, le Dr Réjean Thomas quitte la présidence de Médecins du Monde et passe le relais au Dr Nicolas Bergeron.

"En tant que médecins, notre travail doit commencer par la lutte pour la justice sociale, contre la globalisation de la pauvreté et des injustices", affirme le Dr Réjean Thomas. Témoigner et dénoncer pour guérir: depuis plus de 20 ans, le médecin se bat au Québec et partout dans le monde pour que la santé devienne un droit pour tous et non le privilège de quelques-uns. Militant pour l’instauration de la trithérapie en Afrique ou contre l’exclusion des toxicomanes à Montréal, le fondateur de la clinique L’Actuel, spécialisée dans la détection des maladies sexuellement transmissibles, et du bureau canadien de Médecins du Monde a engagé toutes ses forces dans la lutte contre le VIH et le sida. Après dix années au conseil d’administration de Médecins du Monde Canada, l’organisation dont il a quitté la présidence en octobre dernier lui rendait hommage le 19 mars pour se préparer à continuer son combat aux quatre coins du monde et dans les rues de notre métropole.

"En prenant la suite de Réjean Thomas, je veux lancer un plaidoyer positif: l’humanitaire doit cesser d’être une affaire de gauche ou d’organismes communautaires. S’occuper des autres, c’est s’occuper de soi, c’est l’affaire de tous!" lance le nouveau président de Médecins du Monde, le Dr Nicolas Bergeron. "C’est comme le recyclage ou l’écologie: cela doit mobiliser tout le monde, au-delà des clivages politiques", affirme-t-il. Le jeune psychiatre s’est engagé au sein du conseil d’administration de Médecins du Monde après s’être intéressé à la psychiatrie de désastre, à la suite des attentats du 11 septembre 2001, dans des circonstances particulièrement dramatiques alors qu’il terminait sa formation à New York.

THÉRAPIE MONDIALE

"Je travaille beaucoup à cheval sur la médecine d’urgence et la psychiatrie traditionnelle. En tant que psychiatre, j’ai été attiré par Médecins du Monde car nous construisons des projets à long terme pour un développement durable où le soutien psychologique revêt une grande importance. Je reviens tout juste d’une mission en Haïti. Cela fait cinq ans que nous sommes là-bas à Cité Soleil, un bidonville de Port-au-Prince, avec notre clinique qui compte aujourd’hui 75 employés. C’est seulement maintenant que nous commençons à cueillir les fruits de notre travail: on sent sur le terrain la volonté des bailleurs de fonds et des organisations non gouvernementales de remettre le pays sur les rails, c’est très encourageant et nous allons continuer d’accompagner ce développement."

Missions en Haïti, au Malawi, au Zimbabwe, projets d’interventions au Nicaragua ou au Vietnam, missions d’urgence au Soudan, en Afghanistan ou en Irak, mais aussi actions locales avec les travailleurs de rue de Montréal… Depuis 1999, le bureau canadien de Médecins du Monde mène tous ses projets de façon autonome, regroupant aujourd’hui près de 50 volontaires agissant sur le terrain dans quelque 11 pays grâce à un budget de 3,5 millions de dollars, dont près de 40 % sont recueillis au Canada grâce à l’appui de donateurs particuliers. "Ici ou là-bas, nos priorités sont les mêmes: vaccination, prévention de la transmission du VIH, lutte contre la malnutrition, soins spécialisés pour les mères et leurs jeunes enfants, soutien psychologique… Partout nous soutenons les plus démunis. À l’étranger, on aide à reconstruire les systèmes de soins; à Montréal, on travaille pour ceux qui sont exclus du système: les immigrants illégaux, les toxicomanes, les itinérants", précise le Dr Nicolas Bergeron. Témoigner, dénoncer, guérir: la mission continue!