Mobilisation Interculturelle pour l’Environnement : Environnement raisonnable
L’environnement n’a peut-être pas de frontière, il reste que chaque culture voit vert à sa manière. Malgré le travail acharné des groupes environnementaux, ces derniers peinent à rejoindre les communautés culturelles de Montréal. C’est ce qu’a constaté le dernier-né des organismes verts québécois, Mobilisation Interculturelle pour l’Environnement.
Pas une journée ne se passe au Québec sans que l’on ne parle des changements climatiques. "En Chine, c’est plutôt les enjeux sur la pollution de l’eau et de l’air qui ont la cote, explique Sandra Lee, originaire de Hong Kong et fondatrice de MIE. Je travaille beaucoup avec les gens de la communauté chinoise. Quand je parle d’environnement, je m’entretiens d’abord sur ces types d’enjeux. Ils les connaissent, la plupart les ont expérimentés. C’est donc beaucoup plus facile de me faire comprendre."
Favoriser le développement d’une conscience environnementale propre à chaque communauté culturelle, voilà un des objectifs de MIE. Cela peut facilement laisser entendre que les communautés culturelles soient moins vertes que les Québécois de souche. "Faux, rétorque Lidia Guennaoui, l’une des cinq membres du MIE. Je pense seulement qu’il existe des tas de façons de voir l’environnement. Et pour développer une conscience environnementale, ça prend des références culturelles."
Les Québécois ne font pas exception. Au même titre que les autres communautés, ils ont leurs références culturelles qui contribuent à développer leur conscience écolo. Lidia Guennaoui, qui est née au Québec de parents italien et marocain, lance l’exemple de la forêt. "Au Québec, on est un peuple sensible à la forêt, c’est une fierté. Ça fait partie de notre identité culturelle. Ce n’est pas étonnant que le documentaire de Richard Desjardins, L’erreur boréale, ait touché les Québécois à ce point."
Sandra Lee fait remarquer pour sa part que les références culturelles peuvent aussi être d’ordre affectif. Pour illustrer ses propos, un autre film environnemental choc: An inconvenient truth. "Al Gore joue sur le patriotisme national en disant que les Américains sont allés sur la Lune, qu’ils pourront donc vaincre les changements climatiques. Il s’agit d’une excellente façon d’adapter un message à une culture spécifique."
L’EXPÉRIENCE PERSONNELLE
Les deux femmes n’ont pas besoin de statistiques pour convaincre du bien-fondé de MIE. Leur expérience quotidienne à titre de militante environnementale vaut n’importe quelle étude sociologique. Elles travaillent sur le terrain. Parallèlement à leur implication au sein de MIE, elles sont employées dans des Éco-quartiers de la ville. Dans le cadre de son travail en éducation environnementale, Lidia Guennaoui a rapidement découvert la réalité pas toujours verte du quartier Côte-des-Neiges, reconnu pour sa multiethnicité. Cette dernière a remarqué qu’avec certaines communautés, les outils de sensibilisation ne fonctionnaient pas. C’est le cas notamment des images sur les brochures qui traitent de la récupération. "Il y a des dessins qui représentent des objets recyclables, tel un pot de mayonnaise. Dans certaines communautés, il faudrait le remplacer par un icône mieux ciblé – un contenant de harissa par exemple -, avec lequel les gens peuvent faire un lien plus rapidement. Notre idée est simple: s’adapter à leurs réalités pour bien les sensibiliser."
UNE RESSOURCE MANQUANTE
Le but ultime du nouvel organisme serait d’offrir une expertise autant aux groupes gouvernementaux et aux écoles qu’aux autres organismes environnementaux. Il souhaite être une ressource majeure sur les questions qui touchent les façons d’intégrer les communautés culturelles à la cause environnementale.
Chose certaine, le MIE se défend bien de vouloir dénigrer le travail des autres organisations écolos. Il se voit plutôt comme la pièce du puzzle qui manquait. "Notre conscience environnementale est la même; nous offrons seulement une alternative à ce qui est proposé par les groupes déjà existants. Ces derniers font un excellent travail, ils rejoignent la masse, mais ne parviennent pas à atteindre certaines communautés", explique Lidia Guennaoui.
"J’aimerais que tous les événements, conférences ou salons sur l’environnement accordent automatiquement une place à l’angle multiculturel. On ne peut pas se permettre de laisser de côté une si grande partie de la population. Le Québec est multiculturel, il faut que cela se voit dans chaque domaine, dont l’environnement", conclut Sandra Lee.
Le 12 juillet, le MIE tiendra une discussion publique au Santropol Roulant (4050, rue Saint-Urbain, tél.: 514-284-9335). Info: www.miemontreal.wordpress.com.