Fête Arc-en-ciel : La faute à Québec ou à Internet?
Alors que certains dénoncent le manque de dynamisme du milieu gai de Québec, pour plusieurs intervenants d’ici, la communauté se porte bien et, qui plus est, a réussi à s’intégrer à la vie de la Vieille Capitale.
Le Ballon rouge, le Bar Mâle, le Bar de la Couronne, l’Éveil, le Garage, l’Alterno, l’Amour sorcier… La liste des bars qui ont fermé dans le milieu gai et lesbien de Québec est longue. Assez pour qu’André Gagnon, l’organisateur de l’événement Fierté Québec, qui a été boudé par la communauté les 10 et 11 août derniers, fasse une sortie dans les quotidiens de la capitale. Selon lui, la communauté d’ici n’aurait pas le dynamisme de celle de Montréal, amenant les jeunes gais à choisir la métropole plutôt que Québec. Alors, posons la question: est-ce que le milieu gai à Québec est plate?
"Oui, le milieu gai à Québec pourrait être plus dynamique, oui, la communauté gaie à Québec pourrait être plus visible. Elle a tous les outils pour le faire, il ne manque plus que l’étincelle", note Olivier Poulin, porte-parole de GLBT Québec, l’organisme responsable de la Fête Arc-en-ciel. Selon lui, la comparaison entre Québec et la métropole n’est pas entièrement justifiée. "Si la ville de Québec se compare toujours à celle de Montréal, on n’a pas fini de se trouver plates", lance-t-il. "À Québec, la communauté gaie est dynamique, mais elle est peut-être moins visible parce qu’elle est plus intégrée. Ça ne se compte pas par le nombre de bars, mais par le nombre de personnes qui vivent pleinement leur diversité sexuelle", suggère de son côté Yvan Lapointe, président de la Coalition gaie et lesbienne du Québec.
Il n’en reste pas moins que les fermetures de bars se sont faites à un rythme alarmant au fil des dernières années. Selon les intervenants rencontrés, cela pourrait être dû à un changement au point de vue social. "Internet a changé bien des choses pour ce qui est de la drague", remarque Olivier Poulin. Florent Tanlet, qui anime l’émission Homologue, sur les ondes de CKIA 88,3, partage le même constat: "Plusieurs ne fréquentent plus le milieu gai à cause d’Internet. Et il y a aussi beaucoup de gais qui ne fréquentent pas le milieu. Ce n’est pas parce qu’on est gai qu’on ne sort qu’au Drague." "De plus, c’est normal, dans une société qui devient de plus en plus tolérante et ouverte à la diversité sexuelle, qu’on ait de moins en moins besoin de lieux réservés à la communauté gaie et lesbienne et que, parallèlement, ces lieux-là soient fréquentés de plus en plus par monsieur et madame Tout-le-monde", fait valoir Olivier Poulin.
Cela dit, la fermeture d’un lieu comme l’Amour sorcier a fait mal à la communauté lesbienne de Québec. "Ça a été comme un choc. Ce lieu, c’est comme une institution", souligne Karyne Bilodeau, présidente du magazine Sapho. "On ne sait pas vraiment où aller maintenant. Ça manque vraiment et, présentement, c’est le bon timing pour ouvrir un nouveau bar." Selon elle, sortir au Drague ou ailleurs dans le secteur ne serait pas la même chose. "C’est sûr, je peux sortir avec ma copine dans un bar hétéro, mais à l’Amour sorcier, on était chez nous", poursuit-elle. Mais il ne faut pas sonner le glas de la communauté pour autant, bien au contraire. Selon elle, le lancement – et le succès – du magazine Sapho il y a deux ans, "c’est une belle preuve qu’il y a encore une braise quelque part".
FÊTE ARC-EN-CIEL
Tout ce milieu se prépare tranquillement pour la Fête Arc-en-ciel, qui se veut, selon Olivier Poulin, le reflet de la communauté de Québec. "On fait les choses à notre manière", indique-t-il. L’événement sera ainsi à l’image de cette communauté bien intégrée à la ville, mais qui a toujours un travail d’éducation à faire auprès de la population. "L’homosexualité, c’est plus toléré, mais est-ce que c’est plus accepté? Je ne pense pas", fait valoir Florent Tanlet. "Il reste encore beaucoup de petites choses à régler, et il faut les régler, car autrement on risque de les voir perdurer", ajoute Yvan Lapointe.
On prévoit ainsi un aspect communautaire, plus engagé, qui côtoiera, du 31 août au 2 septembre, des événements à l’esprit plus festif. Le tout s’ouvrira avec un brunch contre l’homophobie qui sera conclu par le lever du drapeau arc-en-ciel à l’hôtel de ville par Philippe, le jeune gai qui s’est fait tabasser à place D’Youville le 30 juin dernier. Par ailleurs, on annonce le retour du party de filles organisé par Sapho ainsi que celui de l’événement Encore. Côté spectacles, on attend notamment les Lesbians on Ectasy de même que Réglisse et son équipe de personnificateurs féminins qui offriront leur spectacle De Paris à Broadway. Pour plus d’information: www.fetearcenciel.qc.ca.