Gaspillage aveugle des ressources : Fini le gaspillage
Dans Arrêtons de pisser dans de l’eau embouteillée, Jean-Sébastien Trudel nous invite à réduire le gaspillage aveugle des ressources. Il ne fait pas que s’insurger contre les absurdités, il propose des solutions.
À qui votre livre s’adresse-t-il?
"Je l’ai écrit en pensant aux gens d’affaires, mais je réalise, par la pratique de mon métier, que les vrais agents de changement dans les entreprises, ce sont souvent les employés. Il est rare que les hauts dirigeants présentent de nouveaux modes de fonctionnement. Donc, je m’adresse autant à Monsieur et Madame Tout-le-monde qu’aux entreprises."
Idéalement, qui devrait agir en premier: est-ce aux entreprises de proposer des changements ou aux citoyens d’être plus exigeants?
"Ce qui caractérise le mieux le développement durable, c’est qu’il faut apprendre à travailler ensemble. Et les entreprises le savent de plus en plus. Ce ne sont plus seulement les actionnaires, les fournisseurs ou les clients qui comptent. Maintenant, tout le monde est inclus, le gouvernement et la communauté aussi. Même ceux qui n’achètent pas le produit. Car si la production d’une marchandise émet des GES, ça touche tout le monde. Quand les dirigeants d’entreprises arrivent avec de nouvelles solutions, c’est parce qu’ils ont été influencés soit par leurs actionnaires, soit par la demande des consommateurs. Ensuite, il y a un effet domino."
Vous dites que nous fonctionnons sur le pilote automatique. Est-ce que l’engourdissement général est l’aspect le plus inquiétant de la situation actuelle?
"Ce que je dénonce surtout, c’est que nous nous sommes habitués à être entourés de "mauvais design". Est-ce normal de manger en cinq minutes un yogourt dont le contenant va mettre 400 ans à se dégrader? Dans le même ordre d’idées, je crois qu’il est absurde de gaspiller chaque jour des dizaines de litres d’eau en utilisant de l’eau d’aqueduc pour nos toilettes. Cette eau est la même que nous buvons et qui est embouteillée par Dasani, par exemple. C’est ridicule."
En quoi votre livre est-il différent des autres ouvrages sur le développement durable?
"Il y a beaucoup de livres qui dénoncent le piteux état de l’environnement, mais on entend très peu parler de solutions. J’ai écrit ce livre pour en proposer. Quand je rencontre des dirigeants d’entreprises, je me rends compte qu’ils sont des citoyens, des parents, des gens qui recyclent à la maison. Ils ont les mêmes préoccupations que la communauté en général. Ils voient la détérioration de l’environnement, mais ne savent pas comment faire différemment. Je tente, avec ce livre, de répondre à ces questions-là. Je parle des nouvelles pratiques d’affaires que les entreprises les plus proactives ont mises à l’essai avec grand succès."
Le développement durable peut donc aller de pair avec une meilleure productivité?
"Ce n’est pas une question de savoir si c’est possible ou non. La meilleure productivité est simplement essentielle. On ne pourra pas être durable si on continue à gaspiller comme on le fait. Jusqu’à maintenant, l’idée était de produire plus avec moins. Il faut maintenant apprendre à produire mieux avec moins."
Si on produit plus et mieux avec moins, n’est-ce pas nocif pour le marché de l’emploi?
"Généralement, quand on produit mieux avec moins, on crée des emplois qui demandent moins de ressources et qui impliquent plus de gens. Je prends l’exemple d’une étude que j’ai lue, qui démontre que pour un mégawatt d’énergie économisé, on crée de deux à trois fois plus d’emplois que dans le cas d’un nouveau mégawatt produit. Donc, plutôt que d’embaucher des gens pour construire une nouvelle centrale électrique, il faut embaucher des gens pour isoler les maisons, pour fabriquer les isolants et ainsi de suite. Il s’agit souvent d’emplois locaux. Et ça, ce n’est pas nocif pour l’économie."
N’est-il pas contradictoire de publier un guide sur le développement durable aux Éditions Transcontinental, une multinationale?
"Premièrement, il faut se dire que si les grosses entreprises font partie du problème, elles font aussi partie de la solution. Au début des négociations, les Éditions Transcontinental n’étaient pas en mesure de me garantir que mon livre serait imprimé sur du papier 100 % recyclé. Je me suis dit que je devais faire quelque chose qui irait avec le discours du livre. C’est pour ça que j’ai décidé de mettre le dernier chapitre sur le Web. Et d’ici quelques années, publier des livres entiers sur Internet sera chose commune. J’en suis certain."
Arrêtons de pisser dans de l’eau embouteillée. Comment individus et entreprises peuvent contribuer au développement durable, Jean-Sébastien Trudel , Les Éditions Transcontinental, 2007, 190 p.