Vélo : Circulez svp!
Les intervenants du milieu du vélo à Québec sont clairs: le réseau de transport utilitaire de la capitale n’est tout simplement pas adéquat. D’est en ouest ou du nord au sud, il est presque impossible pour les cyclistes de se déplacer sans heurts.
Pas de cyclistes à Québec? Bien au contraire, leur nombre augmente depuis quelques années. "Ça fait environ 12 ans que je suis à Québec et j’ai constaté la hausse du nombre de cyclistes utilitaires, et cela, même en hiver. C’est dans l’air du temps", remarque Christian Savard, directeur d’Accès transports viables. Toutefois, il déplore que Québec ne soit malgré tout pas en voie de devenir une ville de vélo. "C’est en raison du manque d’infrastructures pour le vélo utilitaire", explique-t-il. Et pourtant, selon lui, ce type de transport serait d’autant plus pratiqué s’il y avait plus de ressources disponibles. "Il y aurait une plus grande demande si les cyclistes étaient plus en sécurité", lance-t-il.
Jeanne Robin, responsable de l’organisme Promo-Vélo, partage cet avis: "Le vélo de loisir a une belle situation à Québec, mais pour se déplacer quotidiennement, c’est plus difficile, parfois même périlleux." Actuellement, l’organisme travaille au recensement des problèmes du réseau de la Vieille Capitale. Pour ce faire, un atelier de réflexion a été organisé le samedi 22 septembre, sur inscription seulement. "On veut avoir une trentaine de cyclistes qui nous donnent une journée de réflexion sur la situation." Mais, pour le moment, le constat demeure clair pour Mme Robin: "Les cyclistes sont laissés à eux-mêmes. On leur dit: "Débrouillez-vous.""
Pour sensibiliser les gens à la cause du vélo utilitaire, Guy Wera, de son côté, participe à l’organisation de "VéloMobilisations" le premier vendredi de chaque mois, départ à partir de la Bibliothèque Gabrielle-Roy. "C’est pour amener la population à prêter attention au fait qu’il y a des vélos, qu’il y en a énormément. En fait, il y en a beaucoup plus que ce qu’on voit", souligne-t-il. Côté mobilisations, il ne faut pas oublier la journée En ville sans ma voiture, qui aura lieu le vendredi 21.
Et il faut dire que faire du vélo utilitaire à l’année longue, c’est chose possible. Pierre Bernier, propriétaire du MuséoVélo de la rue Saint-Jean, l’a bien démontré. "Ça va être ma 30e année de vélo non stop", lance l’homme qui possède sept vélos utilitaires, pour toutes les occasions. Pour inciter la population à pratiquer régulièrement le vélo utilitaire, il faut, selon lui, d’abord sensibiliser les gens aux bienfaits du vélo, leur donner de l’information, mais surtout, améliorer le standing de ce moyen de transport. D’ailleurs, M. Bernier n’hésite pas à citer le poète Jacques Faizant: "Le cycliste n’est pas un automobiliste déchu, c’est un piéton miraculé."
DE NOMBREUX MANQUES
Pour avoir un réseau utilitaire viable à Québec, il faut d’abord, selon les intervenants, améliorer les liens entre les différents secteurs: présentement, il n’y a pas moyen de se déplacer de Sainte-Foy à Duberger, de la haute-ville à la basse-ville ou encore entre Sainte-Foy et le centre-ville. Et il faudrait idéalement des voies en ligne droite, avec suffisamment d’espace pour permettre les dépassements. Certes, certains liens existent, mais ils demeurent incomplets. "On a des bouts de pistes cyclables. On roule sur une piste et elle s’interrompt", observe Jeanne Robin. Pour régler le problème, il ne faudrait pas nécessairement une piste cyclable: une bande utilitaire, 10 fois moins chère, pourrait suffire. De tels liens devraient également être utilisables à l’année.
De son côté, la Ville de Québec élabore actuellement son plan directeur pour le développement du réseau cyclable et préfère ne pas émettre de commentaires sur le dossier. "Pour l’instant, il serait prématuré de s’avancer là-dedans", note Jacques Perron, conseiller en communications. Cela dit, beaucoup ne comprennent pas pourquoi, dans le cadre des nombreux aménagements routiers actuels, la Ville n’a pas inclus des infrastructures cyclables. "C’est complètement fou. On ne comprend pas la position de la Ville", lance Jeanne Robin. "Ils se rient de nous", ajoute Guy Wera.
Au-delà du réseau cyclable lui-même, pour le cycliste utilitaire, il faut aussi penser à l’arrivée au travail: vestiaires, douches, rangement sécuritaire pour vélos. L’organisme Mobili-T se spécialise dans l’évaluation de ces besoins. "On travaille avec les entreprises pour voir comment le vélo peut s’intégrer", explique le directeur Pascal Laliberté. En parallèle, des vélos en libre service sont aussi distribués aux entreprises qui en font la demande. Cette année, plus de 4000 prêts seront réalisés, avec une cinquantaine de vélos en circulation. Et Mobili-T évalue la possibilité de rendre ce service ouvert à l’ensemble de la population. Quant au vélo utilitaire, M. Laliberté est catégorique: la demande est là. "C’est comme n’importe quoi, dit-il. Quand tu construis une autoroute, elle se remplit. Si tu offres un réseau de qualité et des mesures connexes, les gens se tourneront de plus en plus vers le vélo utilitaire."