Designer industriel : Le designer humanitaire
Société

Designer industriel : Le designer humanitaire

En août 2007, le pied artificiel créé par Sébastien Dubois a valu à celui-ci le premier prix d’Index, prestigieux concours de designers basé au Danemark. Portrait d’un designer industriel talentueux à l’âme humanitaire.

Si un bon designer industriel doit être à l’écoute des utilisateurs du produit qu’il conçoit, nul doute que Sébastien Dubois en est un. Son idée de prothèse lui est venue durant ses voyages dans le tiers-monde, notamment en Amérique du Sud et en Afrique. "J’ai remarqué que les gens amputés se débrouillaient sans prothèses, ou alors celles qu’ils avaient étaient inadaptées et de mauvaise qualité, tellement que personne n’en voudrait ici, raconte-t-il. Je me suis alors demandé ce que je pouvais faire, techniquement parlant, pour améliorer la qualité de vie de ces gens-là."

Son projet Démocratisation du pied à retour d’énergie, conçu dans le cadre d’un travail de fin de baccalauréat en design industriel à l’Université de Montréal, est une prothèse qui emmagasine l’énergie du marcheur et propulse sa jambe vers l’avant, lui permettant même de courir. Ce pied artificiel procure donc aux amputés une satisfaction exceptionnelle.

Étonnamment, même si le jeune homme de 29 ans a remporté le prix et la bourse de 100 000 euros qui l’accompagne, il n’a rien inventé! Ce type de prothèse existait déjà depuis des années. Ce qui a séduit le jury, c’est l’accessibilité du produit, dont les coûts de fabrication s’élèvent à environ 10 $ pièce, alors que les prothèses similaires offertes sur le marché se vendent entre 1500 $ et 4000 $. Depuis, Sébastien Dubois fait parler de lui partout dans le monde.

L’APPEL HUMANITAIRE

Le jeune designer se démarque par son altruisme. "C’est plaisant de travailler à élaborer des objets de consommation, mais améliorer des produits ordinaires, comme des crayons, n’est pas toujours passionnant. Disons que lorsque je me consacre à un projet comme celui de ma prothèse, ma motivation ne diminue jamais!" Son attirance pour les causes humanitaires l’a d’ailleurs mené à faire des choix difficiles. "Au départ, je me suis associé avec l’organisme Handicap International, qui m’a beaucoup aidé. Malheureusement, je ne travaille plus avec lui, car nous avions des objectifs différents. Moi, je voulais faire partie du projet à long terme, mais ce n’était pas possible, car les gens de Handicap International ont déjà une équipe en place. Donc, je n’aurais été qu’un consultant. Ça ne plaisait pas, car mon but, c’est de travailler dans le domaine humanitaire."

DESIGNER ET ENTREPRENEUR

Afin d’avoir les coudées franches, Sébastien Dubois a choisi de faire le saut dans l’univers entrepeunarial. "L’idée de départ, c’était de concevoir une technique de fabrication. Aujourd’hui, je vais plus loin en montant ma propre entreprise. Je veux être capable de maîtriser tous les aspects de mon projet. Je n’ai pas envie que des gens créent des entreprises en s’inspirant de mon idée." Du coup, le designer est contraint de laisser le volet création en suspens, du moins pour un temps. "En ce moment, je me consacre à 100 % à mon projet d’entreprise. Outre la prothèse que j’ai créée, je m’intéresse à d’autres types d’aide technique, comme les orthèses et les béquilles." Pour un créateur, le monde de l’entrepreneuriat n’est pas facile, et peu osent s’y aventurer. "Beaucoup de gens travaillent à leur compte en tant que designers indépendants, mais ça n’a rien à voir avec la gestion d’une entreprise, surtout que je vise aussi bien l’Amérique du Nord que du Sud. C’est une démarche assez difficile, mais nécessaire. On ne peut pas être bon dans tout. Moi, ma force, c’est la création. Je suis donc à la recherche d’une équipe!"

Pour étudier :

Technique de design industriel
Cégep du Vieux-Montréal
255, rue Ontario Est
Tél.: 514 982-3437
www.cvm.qc.ca

Baccalauréat

Université de Montréal
Faculté de l’Aménagement
École de design industriel
Tél.: 514 343-7556
www.din.umontreal.ca

LE DESIGNER INDUSTRIEL

Un designer industriel conçoit des produits de consommation fonctionnels, au look agréable. Il doit tenir compte des techniques de fabrication industrielle qui serviront à la production des objets qu’il a conçus et baser ses créations sur les besoins de la clientèle visée. "Souvent, le designer s’imagine qu’il y a un besoin et crée un objet à partir de ce qu’il croit, sans prendre la peine d’aller parler aux utilisateurs potentiels. Il fait ça tout seul dans son coin. Finalement, il se rend compte que ce qu’il a créé ne correspond pas aux besoins réels et que ses efforts auront été inutiles", souligne Sébastien Dubois.

L’EXEMPLE IPOD

L’autre qualité intrinsèque d’un bon designer industriel, c’est sa capacité à synthétiser. À ce titre, le iPod constitue une référence. "L’appareil a seulement quatre boutons. On n’a pas besoin de lire tout le livret d’instructions pour savoir comment il fonctionne, explique le jeune designer. Apple a tenu compte de l’usager en créant un produit facile à utiliser."