Marie Demers : Pourvu que ça marche
Société

Marie Demers : Pourvu que ça marche

L’aménagement urbain nord-américain n’en a que pour l’automobile. Marie Demers, auteure du livre Pour une ville qui marche, aimerait que les piétons reviennent à la mode.

Voir: Vous prônez une politique urbaine qui multiplierait les lieux favorisant la marche et qui protégerait le piéton. Pourquoi?

Marie Demers: "Mon livre porte sur les causes et les conséquences du déclin de la marche en Amérique du Nord. On voit que depuis les années 50, l’automobile a changé complètement le paysage urbain. Les villes ne sont pas adaptées à l’espèce humaine, mais à l’automobile. Tout est développé en fonction des déplacements en voiture et cela crée beaucoup de torts, tels des problèmes de pollution atmosphérique et de gaz à effet de serre, qui causent notamment des problèmes respiratoires. Et puisque les gens ne marchent pratiquement plus, on parle aussi de problèmes cardiovasculaires et d’obésité, par exemple."

L’idéal serait peut-être de changer nos habitudes et de prendre moins souvent la voiture. Il reste que l’on peut difficilement faire fi des structures urbaines déjà existantes. Quelle est la solution?

"Le changement le plus important est d’ordre sociétal. Il est entre les mains des élus municipaux qui, eux, peuvent aménager la ville actuelle pour qu’elle soit plus favorable aux piétons. L’étalement urbain se traduit par des distances de plus en plus grandes et l’on ne peut aller nulle part à pied. On devrait dézoner les quartiers résidentiels pour permettre l’implantation de services de proximité, ce qui permettrait aux gens de s’y rendre en marchant. On devrait élargir les trottoirs, accorder plus de temps aux piétons aux feux piétonniers, taxer les commerces qui veulent s’installer le long des autoroutes. Il y a une foule de solutions."

Que pensez-vous du projet de modernisation de la rue Notre-Dame qui prône une plus grande accessibilité des automobiles à proximité des quartiers résidentiels?

"On ne devrait jamais élargir les routes. Plus on les agrandit, plus on incite les gens à prendre leur automobile. Des projets comme la rue Notre-Dame aident la fluidité pendant six mois ou un an, mais après, le problème revient et empire. Il faut réduire l’espace accessible aux autos et élargir celui pour les piétons. Ça fait dix ans que les urbanistes le disent."

Est-ce que l’automobile est la pire ennemie de l’homme?

"Je n’ai pas écrit un ouvrage contre l’automobile. Le but n’est pas de choisir un mode de transport pour en dénigrer un autre, mais plutôt que la ville soit adaptée à chacun des modes de transport. Le problème, c’est que l’on n’a pas réussi à les faire cohabiter, on a préféré privilégier le transport automobile. Il faudrait arriver à les agencer de manière harmonieuse."

Pour une ville qui marche – Aménagement urbain et santé
de Marie Demers
Éd. Écosociété, 2008, 288 p.