Festival de films sur les droits de la personne de Montréal : Engagez-vous, qu'ils disaient
Société

Festival de films sur les droits de la personne de Montréal : Engagez-vous, qu’ils disaient

Le Festival de films sur les droits de la personne de Montréal se fait le témoin d’un monde qui ne tourne pas toujours rond. Survol de la programmation de ce rendez-vous essentiel.

La Déclaration des droits de l’homme célèbre ses 60 ans cette année. Pourtant, en Afrique, en Asie, au Moyen-Orient, en Amérique aussi, la dignité humaine est encore trop souvent foulée aux pieds. La programmation du Festival de films sur les droits de la personne de Montréal en témoigne. Se retrouvent à l’affiche de cette troisième édition 60 oeuvres regroupant fiction, documentaires, courts, moyens et longs métrages en provenance de 21 pays. Cinquante et un d’entre eux seront en compétition pour le Prix du public – du lot, neuf convoiteront le Grand Prix du documentaire FFDPM. Par ailleurs, cette année, le Festival clôturera la neuvième Semaine d’actions contre le racisme. Petit tour d’horizon en attendant la première projection.

L’ÉTOILE DU SOLDAT, DE CHRISTOPHE DE PONFILLY

Basé sur des faits vécus, le long métrage de fiction du regretté Christophe de Ponfilly a pour toile de fond l’"autre guerre" en Afghanistan, celle des années 1980. Le récit démarre le 11 septembre 2001, alors que le journaliste français Vergos (Patrick Chauvel), de retour en terre afghane, vient d’apprendre les attentats contre le World Trade Center. La nouvelle replonge l’homme dans ses souvenirs. Il lui revient en mémoire l’histoire de Nikolaï, un jeune soldat russe qu’il avait rencontré, en 1984, quelque part dans les montagnes où se cachaient les combattants de la Résistance…

Parachuté dans un pays étranger pour livrer une guerre qu’il ne comprend pas, Nikolaï découvre à la dure les règles de sa nouvelle existence. Un jour, au cours d’une mission délicate, il est fait prisonnier par un groupe de moudjahidines se réclamant du commandant Massoud. Peu à peu, le captif tisse des liens avec ses "ennemis". Au bout d’un temps, un rapport d’amitié, de respect même, s’établit. Vergos, qui documente la mission des résistants, accompagnera Nikolaï, libéré, sur la route menant au Pakistan.

Après un premier quart d’heure un peu carré, façon téléfilm, L’Étoile du soldat trouve son ton et sa facture. Les péripéties de Nikolaï, malheureux conscrit, oscillent entre le tragique et le comique. Comme la vie… Les séquences de combat, plutôt sobres dans l’ensemble, réservent tout de même quelques moments chocs. À la guerre comme à la guerre… Au final, on gardera en tête quelques scènes – une fillette fauchée par une balle, un soldat qui périt par le glaive… – composant autant de tableaux impressionnants.

Dans le rôle de Nikolaï, Sacha Bourdo est particulièrement attachant. Avec sa dégaine rappelant un mini-Adrian Brody, le comédien qu’on avait aimé dans Western, de Manuel Poirier, confère à son personnage la sensibilité et la solidité nécessaires.

Leçon d’humanisme évidemment partisane, L’Étoile du soldat n’en demeure pas moins très pertinent. On sait de quel côté penchait le coeur de Christophe de Ponfilly. Il y a 10 ans, l’auteur, journaliste et cinéaste français avait déjà réalisé Massoud l’Afghan, portrait du célèbre commandant de l’Alliance du Nord afghane, assassiné le 9 septembre 2001.

En tournant un film de fiction, de Ponfilly souhaitait "dire avec plus de force encore" ce qu’il avait observé à l’époque et que les événements du 11 septembre avaient exacerbé. L’Étoile du soldat secoue en tout cas quelques idées reçues. Son portrait tranche avec l’image des moudjahidines construite par les médias occidentaux, tenue le plus souvent pour acquise.

C’est là l’ultime témoignage que nous aura laissé l’auteur qui s’est enlevé la vie en 2006. (Film d’ouverture, 27 et 29 mars)

EN COMPLÉMENT DE PROGRAMME…

Côté courts métrages, on aura droit à une douzaine de titres repêchés à l’internationale. Relevons-en trois. Do-It-Yourself, du Belge Éric Ledune, est une oeuvre d’animation drôle et caustique s’inspirant d’un manuel de torture distribué aux dictatures sud-américaines par la CIA…

Offrant une perspective historique éclairante, A Human Request, des Allemandes Barbara Falkner et Barbara Simmler, rappelle que huit États avaient dit non à l’adoption d’une charte des droits de l’homme en 1948…

Le très dur et angoissant The Bridge, de Haris Bilajbegovic, recrée un fait réel survenu durant la guerre de Bosnie-Herzégovine, en 1992. Le grand-père du réalisateur y tient un rôle.

Primeur québécoise, Killing Time, de la Suédoise Annika Gustafson, se penche sur le destin de la minorité hindoue du Bhoutan, contrainte à l’exil à la fin des années 1990. La plupart des réfugiés sont parqués dans des camps au Népal voisin. Regard éclairant sur un sujet peu médiatisé.

Enfin, la sélection officielle québécoise regroupe neuf oeuvres réalisées et produites chez nous. Sans réserve, de Patrick Pellegrino, s’intéresse au sort des Algonquins de Kitcisakik, en Abitibi. Cet émouvant documentaire est à rapprocher du Peuple invisible de MM. Desjardins et Monderie. On pourra aussi voir ou revoir les excellents Americano, de Carlos Ferrand, De l’autre côté du pays, de Catherine Hébert, et Un coin du ciel, de Karina Goma.

Du 27 mars au 3 avril
www.ffdpm.com