La gauche politique, partie 1 : Arrêt sur l'image
Société

La gauche politique, partie 1 : Arrêt sur l’image

L’image qu’on a de la gauche politique n’est pas nécessairement toujours très positive. Bas de laine. Chanvre. Look grano tout droit sorti des années 1970. Entre cette image "traditionnelle" et l’image que la gauche d’aujourd’hui projette, y a-t-il décalage?

Le cas exemplaire: Québec solidaire. La seule formation politique à se réclamer de la gauche, en évitant la voie du centre. Premier contact visuel: les affiches. Visage des deux chefs. Couleurs. Positionnement pour et contre. Réussies, ces affiches? La question a été posée à Thierry Giasson, professeur au Département d’information et de communication de l’Université Laval, ancien journaliste et spécialiste de l’image. La réponse? Intéressante.

Alors que l’idée des deux chefs en agace certains, elle n’est pas rébarbative pour l’enseignant. "C’est Françoise David qui est la porte-parole la plus visible. C’est elle qui a fait le gros de la campagne de Québec solidaire en 2007, au cours de laquelle Amir Khadir avait fait quelques apparitions. En 2008, on revient avec le duo. Certes, certains peuvent juger ça comme non recevable, mais pour d’autres, c’est quelque chose de très porteur: un homme issu de l’immigration, une femme québécoise de souche. Ça évoque quelque chose de très positif." Une image forte pour une formation parapluie qui projette également un bel esprit d’unité. "Il n’y a pas de dissension dans ce parti-là. Le programme a été négocié de près. Ils ont bien composé avec les éléments avec lesquels ils doivent composer, les contraintes liées à leur base militante. Et ça, il faut le respecter", poursuit M. Giasson.

Mais c’est à cette base qu’est lié le noeud du problème: l’image médiatique. "Tout ce qui joue pour eux dans l’axe militant joue aussi contre eux dans la sphère médiatique et, par ricochet, dans l’électorat en général. Les gens se font une idée à partir de la couverture médiatique. Ce qui est véhiculé dans les médias a un impact sur la réflexion des citoyens", explique Thierry Giasson.

Cela, Québec solidaire semble le comprendre. Et sa plate-forme le reflète. "Certes, dans leur programme, il y a des axes où leurs propositions sortent de l’ordinaire, mais à l’image du NPD, ils souhaitent projeter une image réaliste, recevable, pour répondre à l’argument de cette gauche mal arrimée à la réalité." Un professionnalisme lié à une image plus léchée et à des thèmes unificateurs: environnement, parité, solidarité. "On sent qu’il y a un exercice de réflexion derrière leur campagne visuelle." En définitive? "Dans la mesure de leurs moyens, dans leur capacité à occuper l’espace public, ils sont allés au bout de leur message", tranche le professeur.

Et que faire, selon Thierry Giasson, pour pousser encore un peu plus loin? Revoir des éléments jugés plus fondamentaux par les militants, à l’image du PQ qui a mis la souveraineté en veilleuse. Ou recruter des candidats vedettes comme Léo-Paul Lauzon, par exemple. Ou, plus simplement, modifier leur discours. "Ils ont un propos qui est hyper important, mais qui n’est pas toujours agréable à entendre. Ils ont un discours chargé de problématiques, mais qui, à travers les médias, ne parle pas suffisamment des solutions envisagées." Bref: prouver qu’on veut remplacer le gouvernement plutôt que l’influencer…