Secteur D'Estimauville : No man's land?
Société

Secteur D’Estimauville : No man’s land?

Des projets pour le secteur D’Estimauville, l’administration municipale en a: revitalisation, quartier vert… On pourrait presque parler d’une "version 2.0" du secteur. Des perspectives réalistes? Ou rêve-t-on tout simplement en couleurs?

Édifice fédéral. Quartier vert. Commerces. Tout cela n’est pas nécessairement suffisant pour renverser la vapeur et relancer D’Estimauville, estime le géographe Rémi Guertin. "Ce n’est pas le projet qui fait le contexte, mais le contexte qui fait que ça marche ou non. Si on fait un investissement majeur dans un contexte de décroissance, on prend le risque que ce projet n’ait pas de portée."

En ce sens, selon l’auteur d’une thèse de doctorat sur la logique du développement urbain de la capitale, il vaudrait peut-être mieux, à court terme, laisser le secteur en dormance. "Il faut voir l’espace comme une ressource en soi. Si on le bouche à tout prix, peut-être qu’on va perdre la possibilité d’y faire quelque chose de plus intéressant." Un terrain inoccupé, c’est l’expression d’une dynamique urbaine. "Présentement, D’Estimauville s’érode au profit d’autres secteurs. Je ne pense pas que le souhait de limiter le développement ailleurs permette de développer le secteur. La ville ne se développe jamais équitablement. Il y a des zones qui se développent toutes seules. D’autres qui ne se développent jamais."

Son emplacement même représente un défi: D’Estimauville se trouve entre deux pôles importants, Québec et Beauport. Et se développe au fil des débordements. D’ailleurs, Rémi Guertin estime que la présence de Robert-Giffard dans le secteur est symptomatique de cette perception. "Les activités qu’on voit comme dévalorisantes, on les met dans la frange. On n’a pas mis l’Assemblée nationale à D’Estimauville: il doit y avoir une raison!" La solution? Prendre son temps. Développer sur une longue durée. "À D’Estimauville, il y a des indices qui laissent croire qu’il faut être prudent", prévient-il.

En fait, peut-être vaut-il mieux commencer par y établir une population, note de son côté le géographe Marc Boutin. "Si on a une population résidente, alors on a une base pour développer." Et voir également quels sont les besoins de la ville. Ne pas dupliquer une offre qui existe ailleurs et reproduire un schéma s’apparentant aux power centers qu’on trouve en bordure des autoroutes. "Dans une ville, il faut mettre de l’avant des projets différents, qui vont intéresser des clientèles différentes."

Alors, qu’est-ce que ce développement devrait offrir? Quartier piéton. Accessible par le transport en commun. Commerces de petite taille, de proximité. Voilà, pour M. Boutin, les perspectives qui permettraient une véritable relance pour D’Estimauville. "Si on tente tout de suite d’en faire un gros centre régional, on risque de se casser la gueule. Mais si on débute avec des commerces plus humbles, plus petits, si on laisse le quartier grandir, on diminue les risques qu’il y ait des ratés. Et surtout, il faut commencer par le monde, par les commerces. Mettre les boeufs devant la charrue."