Architecture contemporaine à Sherbrooke : Architecture et moeurs sherbrookoises
Société

Architecture contemporaine à Sherbrooke : Architecture et moeurs sherbrookoises

Les chantiers de construction prolifèrent sur le territoire sherbrookois, mais la reine des Cantons-de-l’Est demeure frileuse par rapport à l’architecture contemporaine. Discussion franche avec deux architectes.

Dans les bureaux de Cimaise, devenu récemment Cimaise-FBA, nous rencontrons Marc Dufour et Jean-François Brosseau, deux architectes de cette firme d’environ 50 employés. Cette fusion, c’est une bonne chose pour la région. "Ça permet d’aller chercher de plus gros contrats", explique Dufour. "On a maintenant une plus grande équipe à l’échelle régionale, poursuit son collègue. On va conserver plus de projets en région, donc plus de jobs."

Plus il y aura d’architectes à Sherbrooke, mieux la profession se portera. Pour l’instant, la population ne compte pas une masse importante de gens aptes à apprécier les nuances de l’architecture contemporaine. Or, pour son salut, Sherbrooke se doit d’être au diapason des tendances actuelles. "À part monsieur et madame Tout-le-monde, personne ici ne critique l’architecture, souligne Dufour. Malheureusement, il n’y a pas de théoriciens, et les praticiens ont d’autres choses à faire…"

VISAGE URBAIN

Plusieurs réalisations de Cimaise-FBA ont changé le visage urbain de Sherbrooke: le Centre de développement des biotechnologies, l’Institut de pharmacologie, l’agrandissement de l’Hôtel-Dieu ainsi que le réaménagement de l’Hôpital Saint-Vincent-de-Paul. "Quand nos collègues d’ailleurs viennent ici, ils jugent que le pavillon Saint-Vincent est l’une des belles réussites architecturales de Sherbrooke." Ce projet est une source de fierté au sein de l’équipe, même s’il n’a pas fait l’unanimité, au dire de Brosseau: "Cette intégration par contraste a beaucoup fait jaser, mais maintenant, le bâtiment de Saucier+Perrotte nous a volé la vedette. (Rires)"

L’architecte fait référence au Centre des arts de la scène Jean-Besré, qui a reçu bon nombre de critiques depuis sa construction. "Pourtant, c’est un bâtiment qui a beaucoup de qualités", selon Dufour. Ce tollé a mis en évidence une réelle incompréhension de l’architecture contemporaine. "Il y a un fossé important entre la perception des gens et l’état réel de l’architecture."

En ce sens, le marché très conservateur qu’est Sherbrooke représente-t-il un réel problème? "Ça pourrait en devenir un, répond Dufour. Le passé, c’est le passé. Les anciens bâtiments qu’on a encore autour de nous, ils ont été construits dans le style de l’époque. Nous, il faut faire pareil."

Son collègue en rajoute: "Construire du néo-victorien, c’est absurde. C’est presque un sacrilège. On aime l’architecture de toutes les époques, mais l’authentique."

JASONS ARCHITECTURE

Pour Sherbrooke – "une ville avec l’une des meilleures bases sur le plan patrimonial au Québec", selon Dufour -, la solution passe par la sensibilisation. "Parler d’architecture demeure ce qui est le plus important, confirme Brosseau. Les gens doivent comprendre que l’environnement bâti a une grosse influence sur leur santé mentale et physique."

"Malgré tout, on a une liberté immense dans notre travail, surtout lorsque les clients ont voyagé, précise Dufour. Lorsqu’ils ont vu de grandes villes, ils sont plus ouverts à l’architecture contemporaine. Ils veulent y participer." Après Paris et Barcelone, Sherbrooke? On peut toujours rêver.