Twitter : To tweet or not to tweet
En marge du prochain WebTweet-Montréal, premier rassemblement du genre au Canada, on se demande en quoi Twitter pourrait changer la donne pour l’industrie culturelle québécoise.
Ne vous demandez pas ce que Twitter peut faire pour vous, mais ce que vous pouvez faire pour Twitter. Le député libéral Denis Coderre a, semble-t-il, compris le message: il est suivi sur le réseau social par plus de 10 000 abonnés, accros, entre deux de ses coups de gueule à Ottawa, à ses nombreux et tonitruants commentaires durant les matchs du Canadien. D’un seul coup, l’homme politique a troqué le costume deux-pièces contre celui du guy next door, et pris du galon chez les électeurs de tous poils.
Loin de la colline, les organismes culturels et artistes québécois commencent timidement à rejoindre le réseau social dont on dit qu’il a lancé Barack Obama: "Il n’y a personne à qui je pense immédiatement", affirme Jean-Robert Bisaillon, gérant d’artiste (Iconoclaste) et technophile, quand on lui demande quels sont les artistes québécois qui se distinguent par une utilisation intelligente du chouchou de la Toile. "Daniel Bélanger, finit-il par concéder. Parce qu’il utilise Twitter pour véhiculer ses émotions et ses idées, partager avec le public son processus créatif."
Mais on est loin, dit-il, des Trent Reznor (chanteur de Nine Inch Nails) de ce monde: "Il a utilisé Twitter dès le départ, non seulement pour parler de son travail, mais aussi de ce que faisaient les autres, David Bowie, Arcade Fire. Je ne m’intéresse pas aux Twitter des artistes qui se contentent de balancer leur calendrier de tournée. De ce point de vue-là, nous accusons un réel retard par rapport aux Américains."
Donner pour recevoir
En fait, nombre d’artistes québécois sont bien là, de Simple Plan à David La Haye, en passant par Ghislain Poirier, Patrick Watson, Mes Aïeux ou Émilie Proulx. Les grandes institutions culturelles ont elles aussi emboîté le pas dans un contexte où, selon un sondage Branchez-vous datant de décembre 2009, seulement 2 % des adultes québécois ont rejoint la communauté Twitter.
Pas mal, oui mais: à peu d’exceptions près, les pages Twitter de l’Opéra de Montréal, du Conseil des arts ou du Musée des beaux-arts n’ont pas grand-chose à envier à leurs sites Internet: liste des événements à venir, opérations promotionnelles, peu d’hyperliens, et un nombre souvent rachitique d’abonnements (le nombre de pages que l’institution ou l’artiste suit sur Twitter): on est loin de l’esprit de communauté et d’échange qui sous-tend le principe du réseau.
"Ça fera partie de la réflexion menée lors de WebTweet", dit Martine St-Victor, organisatrice de l’événement. "Le fait de pouvoir retwitter un message ou un lien donne à Twitter une force de frappe extraordinaire: l’information est diffusée de manière exponentielle, très rapidement. On l’a vu avec le dernier clip de M.I.A. ou, plus proche de nous, avec la vidéo scandale d’Erykah Badu, artiste R&B, qui a fait les manchettes de Radio-Canada grâce au réseau. Pour s’assurer d’un impact, il faut surtout savoir donner pour recevoir. En ce sens, nous devrions nous inspirer de ce qui se fait ailleurs. Le musée Smithsonian de Washington, par exemple, nous met en lien sur son Twitter avec la Biennale de Venise comme avec le travail de petits artistes."
Molière vous parle
Le milieu culturel montréalais a quand même été le théâtre de quelques initiatives bien senties. Dernière en date, l’opération marketing rondement menée par le Théâtre du Nouveau Monde, avec l’agence Phéromone, pour le lancement de la pièce Le Malade imaginaire: la création de pages Twitter identifiées à trois personnages de la pièce, et entretenues par des personnes engagées pour endosser ces rôles durant toute la durée du processus. Un succès. "Nous voulions créer une communauté autour de ces personnages, explique Annie Gascon, directrice des communications et du marketing. L’opération visait à attirer une clientèle plus jeune, et ça a permis d’échanger avec eux sur Molière, sans qu’il y ait d’obligation. Au final, nous avons reçu 50 d’entre eux au Théâtre. La plupart n’avaient jamais mis les pieds ici."
WebTweet-Montréal
Le 26 mai se tiendra à Montréal, parallèlement à l’événement webcom-Montréal, une conférence sur le site de microblogging et phénomène pop culturel Twitter. Médias, politique, nanolittérature, musique, actualité, des panélistes viendront discuter de l’influence du média depuis sa création. Jeff Pulver, fondateur de Vonage et instigateur des conférences "140 Characters", sera conférencier d’honneur. Parmi les invités: Denis Coderre, Agnès Maltais, Herby Moreau, Anne-Marie Withenshaw, ou encore des représentants du Conseil des arts de Montréal, Deloitte Canada, MusiquePlus, Radio-Canada, Marketel, Tourisme Montréal et de La Vitrine culturelle. www.webcom-montreal.com