Gaëtan Dostie : Poètes, vos papiers!
Manuscrits, correspondances, éditions originales, textes rares ou non, célèbres ou inédits… Gaëtan Dostie a passé sa vie à recueillir les joyaux de notre littérature, qu’il offre désormais au public dans un musée aux allures de caverne d’Ali Baba.
L’histoire débute en 1952, lorsque le poète Alfred DesRochers donne à Gaëtan Dostie un exemplaire de son recueil À l’ombre de l’Orford, avec ces mots: "Garde-le précieusement, notre littérature est menacée de disparaître." Gaëtan Dostie n’a alors que 6 ans et, sans le savoir, il vient de se faire inoculer le virus de la poésie. Par la suite, il deviendra lui-même poète, puis éditeur, entre autres. Et côtoiera une vie durant les plus grands noms de la poésie québécoise, de Gaston Miron à Denis Vanier, en passant par Anne Hébert et Hubert Aquin.
En septembre dernier, il ouvre la Médiathèque littéraire Gaëtan Dostie, rue de la Montagne, dans un magnifique bâtiment prêté par la Commission scolaire de Montréal. Porté par cette idée que "la littérature se regarde autant qu’elle se lit", il y expose photos, manuscrits, dessins, peintures et, bien sûr, quelques centaines d’imprimés. "Ce projet est une folie, dit-il en contemplant l’étendue de ses trésors, et pourtant je n’ai jamais douté qu’il aboutirait parce qu’il répond à une nécessité pour notre culture: exposer la littérature."
Il y a aussi que l’homme, en fin connaisseur, sait que le nombre et la valeur de ses pièces en font une collection inestimable. "Tout ça me dépasse de beaucoup, commente-t-il humblement, ça nous dépasse tous." Or c’est bien connu, ce qui nous dépasse nous grandit.
Une vie de trouvailles
En décembre, il présente le lieu à son ami, le poète et musicien Alexandre Belliard, qui n’en revient pas: "J’arrivais pas à croire que tout ça existait, et que c’était sous mes yeux. J’étais assailli d’émotions, pas capable de décrocher mon regard des murs."
Nous sommes deux mois après l’ouverture de la médiathèque et, de l’aveu même de Gaëtan Dostie, cette dernière n’attire pas les foules. Un constat qui attriste Alexandre Belliard autant que le lieu l’enchante. "Ça se peut pas que ce lieu reste inconnu, s’emporte-t-il. Il faut que les gens sachent que ça existe!"
Il décide donc de réunir une trentaine de poètes, auteurs, compositeurs et musiciens pour une série de huit concerts-événements dont le premier aura lieu le 10 mars prochain et accueillera, entre autres, Chloé Sainte-Marie, Fred Fortin et Michèle Lalonde. Laquelle, si l’on en croit la vibrante lecture qu’elle a donnée lors du dévoilement de la programmation, devrait nous offrir un pur moment d’anthologie.
Avant tout, ces concerts ont pour ambition de faire venir le public à la médiathèque, explique Alexandre Belliard. Ne reste plus ensuite qu’à laisser opérer la magie: "Il suffit de voir la réaction des gens quand ils viennent pour comprendre que cet endroit doit survivre. Y a personne qui part d’ici en regrettant d’être venu."
Gaëtan Dostie regarde le jeune homme s’enthousiasmer avec un sourire ému, et il pense déjà à l’après. Il se plaît à imaginer une médiathèque interactive associant images, textes et vidéos où l’on pourrait, par exemple, voir les quelque 500 poètes qu’il a filmés en train de lire leurs oeuvres. C’est vrai que ce projet a tout l’air d’une folie, mais une folie désormais à notre portée. Alors courez à la Médiathèque littéraire Gaëtan Dostie, parole, vous nous remercierez de vous y avoir poussés.
Médiathèque littéraire Gaëtan Dostie
1214, rue de la Montagne
514 861-0880
[email protected]