BloguesAngle mort

Comment je suis devenu stupide

 

Un lecteur, Sylvain Racine, m'a envoyé sa critique de l'émission L'avocat et le diable, diffusée en semaine à TQS.

M. Racine n'a pas eu de télévision pendant 10 ans. Ce n'est que tout récemment qu'il s'est remis au tube cathodique. Avertissement: son opinion de la télévision n'est pas hyper-positive. Il embrasse les positions de l'auteur du livre The Problem of the Media, Robert W. McChesney:

L'assise commerciale des médias a des effets négatifs sur la manière dont s'exerce la vie politique en démocratie. Cette situation appauvrit la culture politique, ce qui conduit les citoyens à se dépolitiser, à devenir apathiques et à faire des choix purement égoïstes.

Selon le Mouton noir, L'avocat et le diable se veut "une tribune téléphonique énergique", animée par Stéphane Gendron (remplacé par Geneviève St-Germain cet été) et Richard Desmarais:

Tantôt ils s'obstinent sur des sujets controversés, tantôt ils argumentent sur des questions fondamentales, mais jamais ils ne sont indifférents à tout ce qui préoccupe les citoyens.

D'ailleurs, le sujet de vendredi dernier était tout à fait d'à propos: "Que trouvez-vous sexy chez un homme ou une femme?" Sujet controversé, question fondamentale…

Bref, la critique de Sylvain Racine…

Le concept [de l'émission] est assez simple. Les producteurs donnent leur accord chaque matin à un sujet d'actualité, lequel tend à être la plupart du temps purement sensationnaliste. Une question est formulée et présentée aux téléspectateurs. Durant les 15 premières minutes de l'émission, les deux animateurs prennent position avec virulence et souvent même avec fiel. Chaque matin, sans étonnement aucun, l'un des animateurs est pour et l'autre est contre. En fait, les questions, bien évidemment, sont rarement ouvertes. Lorsqu'elles le sont, il s'agit de question de goût du genre « quelle est votre couleur préférée, et pourquoi? » De toute façon, à la fin de l'émission, le reste du monde demeurera inchangé, sauf que le diffuseur aura réussi à avoir une certaine cote d'écoute lui permettant de vendre de l'espace publicitaire.

Le but de l'émission est de donner un spectacle, de déranger, d'insulter, d'offenser ou encore de choquer. TQS le cache à peine en disant que les animateurs ont des « échanges parfois vigoureux avec les interlocuteurs » et des « discussions souvent corsées qui provoquent des réactions. » Les échanges entre les animateurs sont la plupart du temps rouge ou noir, spectacle télévisuel oblige. Très dogmatique, le discours est souvent une accumulation de clichés, d'aberrations et de sottises stéréotypées, le but étant de garder le téléspectateur collé avec sa propre salive de voyeuriste à son écran. L'argumentation est évidemment en option.

Tout au long de l'émission, les gens peuvent soit téléphoner pour donner leur opinion soit écrire un message électronique en se rendant sur le site web de TQS inc. La plupart du temps, les animateurs laissent parler les interlocuteur quelques secondes pour ensuite les interrompre de façon irrespectueuse, souvent pour les insulter parce qu'ils semblent vouloir exprimer une opinion différente de la leur. En fait, ce que le diffuseur veut, c'est collecter de brefs « oui » ou « non », ce qui fera somme toute sentir aux téléspectateurs qu'ils ont beaucoup de chance de pouvoir « s'exprimer », c'est-à-dire avoir leur petit « oui » ou « non » de gloire matinale dans leur petite vie de consommateurs guignols conditionnés.

Avec un contenu superficiel, cette émission est un divertissement pour abrutis. Il existe malheureusement des dizaines d'émissions du genre. Le seul but de ce type d'émission est de vendre des voitures, des services bancaires, de l'assurance vie et d'autres produits permettant aux individus de se replier encore plus sur eux-mêmes.

[…]

La liberté, c'est vrai, ce n'est pas une marque de yogourt. C'est un hologramme. Les oeillères créées par ce genre d'émission empêchent bien des gens de voir les traits de la liberté!