BloguesAngle mort

La culture du doute

Un commentaire de Serge Bédard sur la culture de la peur

Un autre sujet qui fait partie de la culture de peur est le réchauffement de la planète qui nous mènerait vers une catastrophe mondiale. On rigole des peurs des autres, mais on ne s'aperçoit pas des peurs auxquelles on croit.

Incidemment, le site Wikipedia "Culture of fear" auquel vous nous référez identifie "Global warming" dans sa liste.

M. Bédard, vos interventions portent régulièrement sur le réchauffement climatique, que vous considérez comme une "une théorie qui n'est pas du tout prouvée".

Je ne prétends pas détenir la vérité. Mais je me demande tout de même combien de preuves sont nécessaires pour changer un doute en certitude, une théorie en vérité.

Pendant longtemps, les médias ont cultivé le doute entourant les dangers du tabagisme. On donnait la parole aux deux camps. On prêtait autant de crédibilité aux médecins payés par l'industrie du tabac qu'à ceux qui sonnaient l'alarme. On cultivait le doute. Voici à ce sujet un extrait d'un article que j'ai écrit récemment pour Voir, portant sur le documentaire de Nadia Collot, Tabac, la conspiration.

Le commerce du doute
«Le 15 décembre 1953, le commerce du tabac est devenu le commerce du doute», dit Nadia Collot. Ce jour-là, lors d'une réunion au sommet, les ténors de l'industrie de la cigarette ont décidé de faire front commun pour lutter contre la menace scientifique. À l'époque, des chercheurs commençaient à lier la cigarette à diverses formes de cancers. «L'industrie a donc décidé d'attaquer, avant que tout cela ne se sache trop», poursuit la réalisatrice. L'objectif: semer le doute dans l'opinion publique.

Au cours des années suivantes, l'industrie a donc financé des centaines d'études minimisant les dangers de la cigarette. Des études qui, pendant plusieurs années, ont contribué à brouiller les cartes.

[…]

Il y a maintenant consensus sur la question. Même l'industrie du tabac admet que la cigarette est cancérigène et que la nicotine crée la dépendance. Il aura néanmoins fallu presque cinquante ans pour y arriver.

J'ai l'impression que l'histoire se répète avec les changements climatiques. Enfin, en partie. Les grands médias sont pour la plupart convaincus désormais que la question des changements climatiques n'est plus une théorie. Il faut dire que le nombre de preuves est assez convaincant… Quelques-unes, en vrac:

  • Sans opposer de désaccords importants, la communauté scientifique mondiale conclut que l'activité humaine réchauffe la surface de la Terre. À lire, un article intéressant en format PDF.
  • L'industrie de l'assurance reconnaît l'existence des changements climatiques et aimerait prendre part aux stratégies d'adaptation afin de contrer une tendance risquée et non viable.
  • Selon l'ONU, 50 millions de personnes pourraient devenir des « réfugiés environnementaux » au cours des prochaines années. "Il y a des craintes bien fondées selon lesquelles les populations fuyant des conditions environnementales invivables pourraient croître de façon exponentielle au cours des prochaines années, alors que la planète subit des effets du changement climatique et d'autres phénomènes comme la désertification."
  • Et bien sûr… Après s'être plaints d'avoir de plus en plus chauds en 2006, les Inuit du Grand Nord québécois, ont obtenu une réduction des tarifs d'électricité. En juin, la température ayant atteint 31 °C pendant près d'une semaine, Larry Watt, maire de Kuujjuak, la capitale du Nunavik, a passé commande d'une dizaine de climatiseurs pour le conseil municipal.

Je ne demande qu'à garder un esprit critique. Aussi, j'attends qu'on me fournisse des preuves convaincantes pour discréditer la "théorie" des changements climatiques… D'ici là, je pense qu'il est contre-productif de garder les changements climatiques dans la catégorie des choses "à douter"…

La culture du doute, comme la culture de la peur, ne fait qu'alimenter la culture de l'immobilisme…