Une lecture de la semaine médiatique signée Jean-Claude Bourbonnais. Et mes réponses…
L'affaire Guy Fournier, la couverture du drame au collège Dawson, mais surtout, le congédiement de la journaliste Christine St-Pierre, ne trouve-tu pas que ça fait beaucoup de conneries en peu de temps pour notre très subventionnée Société d'État? Serais-ce là un signe de l'avilissement définitif d'un grand organe de l'information au Québec?
La journaliste Christine St-Pierre n'a pas été congédiée après avoir publié sa fameuse lettre d'opinion dans La Presse. Elle a été suspendue par la direction de Radio-Canada. Je lui ai parlé au téléphone vendredi. Elle avait la voix tremblante. Elle était visiblement bousculée par les événements. Elle devait rencontrer ses patrons pour régler l'histoire et revenir en ondes. Elle soutenait que l'anicroche ne sera pas inscrite à son dossier.
Preuve que même une journaliste peut commettre une bourde. Car c'était une bourde à mon avis. Une journaliste employée d'un service d'État doit tenter de livrer l'information avec objectivité, et ce, en évitant les situations qui pourraient mettre en doute son objectivité.
On peut remettre en question l'utilité de l'objectivité, mais une chose est claire: le respect d'un code de déontologie qui encadre les pratiques journalistiques, c'est le deal qu'on signe en entrant à Radio-Canada. Une deuxième chose est claire: c'est en partie à cause de ce code que Radio-Canada est reconnu comme l'organe d'information le plus respecté et le plus sérieux au pays. Je pourrais vous étayer la preuve en trois volumes. Moi, je me fie beaucoup plus à la qualité de l'information de Radio-Canada qu'à celle de TVA ou de TQS. Sans rancune pour les deux autres, vos écrapous ne m'émeuvent point…
Or, laisser Christine St-Pierre livrer ses opinions personnelles sur toutes les tribunes, au nez du code déontologique auquel elle est soumise en recevant un salaire de Radio-Canada, ce serait là pour moi un signe assez clair de "l'avilissement définitif d'un grand organe d'information au Québec".
Radio-Canada n'avait d'autre choix que de suspendre et discuter avec la principale intéressée. Ce qui a été fait.
Ce qui m'inquiète le plus, c'est le silence assourdissant des journalistes de cette boîte autour du renvoi de Christine St-Pierre.
Pourquoi ce silence de plomb?
Parce que madame St-Pierre, dans sa lettre ouverte, va à l'encontre du dogme pacifiste qui empoisonne la compréhension du conflit en Afghanistan de trop de journalistes qui monopolisent les tribunes de ce média?
Si c'était le cas, ne serions-nous pas ici devant une sorte de complot du silence chez des gens qui font très attention de ne pas contrarier leurs petits boss, qui pensent un peu beaucoup à leur avancement de carrière, et cela au dépens de la plus élémentaire liberté d'expression, dont ils sont, paraît-il, les irréductibles gardiens?
Ou alors, en voudrait-on à madame St-Pierre de pratiquer un journalisme de terrain, chose rare dans un milieu farci de gérants d'estrade qui déconnent sur la guerre en Afghanistan, sans n'y avoir jamais été? Ce que madame St-Pierre a fait, qui a constaté le désastre d'un peuple qui doit être sauvé contre sa volonté. Si c'est cela qui explique le silence des journalistes, alors, je me demande comment René Lévesque, qui est entré dans les camps de concentration, comme journaliste, avec l'armée américaine, comment Lévesque donc qui revient à la mode, aurait réagi face à ce congédiement arbitraire?
Je répète: Christine St-Pierre n'a pas été congédiée. Et les journalistes ont parlé de son cas. En l'occurence Nathalie Petrowski dans un texte paru encore une fois dans La Presse.
Intéressante votre réponse,mais incomplète.
C’est JUSTEMENT parce que Radio-Canada est notre meilleur
organe d’information que je me montre particulièrement
sévère à son endroit.
L’objectivité,maintenant.Vous avez en partie raison,
lorsque vous affirmez que la journaliste a pour premier
devoir d’informer correctement le citoyen des faits donnés
en manchette.
Mais,à mon avis,son objectivité, »le deal » s’arrête là.
Et quand je vous dis cela,je me place du côté du lecteur,
du téléspectateur.
La -dessus,je suis d’accord avec Martineau,et vous ne
m’enlèverez pas de l’idée que « la ligne éditoriale » des
médias,écrite ou non dans le « contrat » de son embauche
est une manière archaïque d’empêcher le journaliste
de discuter ferme avec son lecteur,de lui faire part
de son opinion personnelle,et ce ,en dehors des pages
ou des tribunes éditoriales.
Mais nuance,mon reproche veut surtout attirer l’atten-
tion sur le fait que trop de journalistes,à Radio-Can,et
ailleurs,pratiquent un journalisme frileux de salle de presse,où des opinions de tout acabit(souvent biaisées)
de chroniqueurs vedettes déconnectés de la réalité,ne
tiennent pas compte,ou si peu,du journaliste,de son
expérience,sur le terrain.
C’est peut-être cela,et l’urgence de dire l’urgence,
en Afghanistan,qui ont incité madame Saint-Pierre à
passer outre au fameux code de déontologie.
En ce cas je veux lui dire qu’elle a tout mon appui,moi,
simple consommateur de nouvelles.
Enfin,correction.Nathalie Pétrowski est journaliste
à « La Presse »,pas à Radio-Can,où le silence persiste
et signe…
Gênant d’entendre Stephen Harper tantôt prendre la défense du droit des journalistes à appuyer ses politiques, devant une « mer rouge » de partisans de l’occupation armée de l’Afghanistan.
Aurait-il dit la même chose d’un journaliste qui les aurait critiquées? Une cose est claire, il préfère critiquer Madame Jan Wong que le média qui l’a publiée, le Globe&Mail à qui il doit sa victoire.
Preuve, s’il en était besoin, de la nécessité de balises et de « firewalls » plus étanches entre l’exécutif et la presse…