*AVERTISSEMENT: Ce billet contient de l'émotion.*
Vous savez, le boulot de journaliste-pigiste n'est pas toujours rose. La plupart des jours, il est plutôt morose.
Il y a moi, mon bureau (qui se trouve dans le salon), mon ordi et quelques textes à enfiler.
Prenez aujourd'hui. Lever à 6h du matin. Café. Je dois terminer ma chronique Médias. Trouver le bon mot, la tournure de phrase juste, le rythme intéressant, résister à la tentation de faire autre chose. 12h06, la chronique est livrée. Next.
Une pizza Delissio pour dîner. Ce n'était pas du resto, c'était Delissio.
De retour à l'ordi. L'autre texte: les 20 ans de la mort de Claude Jutra. Ai-je réussi à saisir l'essence de son oeuvre? Aucune idée. Bienvenue dans les tourments du journaliste; ce sentiment perpétuel d'inadéquation qui finit par rendre cynique. 18h28, le texte est livré.
Aujourd'hui fut une journée à 7 feuillets. En d'autres mots, j'ai produit 1750 mots en douze heures. 146 mots à l'heure. C'est dans ma moyenne. J'espère que ma productivité ne fera pas trop honte à Lucien Bouchard.
Il faut dire que les séances d'écriture sont rarement ininterrompues. Décompte de la journée: 123 courriels, deux entrevues téléphoniques, quelques échanges avec quelques relationnistes, une longue discussion avec une recherchiste de Christiane Charette, une autre avec ma boss de ELLE Québec et une autre avec mon autre boss de ELLE Québec.
C'est cette dernière, d'ailleurs, qui a fait ma journée. Car, dans le boulot souvent morose de journaliste-pigiste, on fait rarement l'objet d'un simple compliment.
"Comment ça va, Steve?, m'a lancé tout de go ma boss du ELLE Québec.
–Bien. En fait, un peu de fatigue, lui ai-je répondu…
–Fais attention à toi, t'sais. J'aimerais ça que tu restes journaliste encore longtemps."
Wow.
Qui a dit que toutes les boss de magazines féminins ressemblaient à Michèle Lauzon dans Rumeurs?
Oh vous savez, en principe, on fait du journalisme pour "porter la plume dans la plaie" et "informer le peuple"… C'est sérieux, objectif.
Sauf qu'au-delà des beaux idéaux, on le fait aussi pour se faire dire, de temps en temps, qu'on est bon…
C'est humain.
Merci de cet aperçu quasi-transparent de la passion mais aussi du métier d’écrire, d’un café à l’autre, de courriels en téléphones.
On écrit à l’écran et il est toujours tentant de faire écran, en y projetant des mots pour convaincre, « planter » ou séduire, ou simplement retenir l’oeil de l’autre jusqu’à la fin de la phrase.
Tu dédramatises ça gentiment avec ton billet sur la routine, de café en pizza, de courriel en téléphone, avec ce focus sur les gens qui – au-delà des feuillets – nous apprécient et dont un simple mot fait tellement de bien. Même si c’est d’eux que vient la commande, pas toujours choisie, pour payer la pizza.
Tu parles d’une « longue discussion avec une recherchiste de Christiane Charette ». Laisse-moi imaginer que tu as peut-être essayé de la convaincre que ça n’avait plus de bon sens de laisser Nuovo et surtout Joël LeBigot « planter » quelqu’un de la relève chaque vendredi avant-midi dans la slot de 11h05 de leur émission.
On doit vivre avec ce tic détestable qu’ont les Radio-Canadiens de s’entre-ploguer et s’auto-congratuler. On a l’impression qu’ils et elles ne parlent au fond que d’eux-mêmes. Si ces stars auto-instituées ne faisaient que s’entre-lutiner de bons mots et de souvenirs de leur carrière, ça passerait encore.
Mais le vendredi, les deux mecs chenus plastronnant chez Madame Charette y vont d’une déferlante d’interruptions, d’allusions sexuelles, de commentaires intempestifs et ouvertement agressifs à l’égard de l’invitée. Ho ho ho ce qu’on peut se marrer entre mecs forts de nos accents…
Vendredi dernier, c’était l’humoriste Cathy Gauthier que l’on a piégée à parler d’un livre, dont elle avait préparé une critique qui semblait très intéressante. Mais c’est à peine si elle est arrivée à placer un mot! Ils ont été particulièrement arrogants: http://tinyurl.com/y8fwdb
LeBigot justifie cette attitude en disant qu’après 42 ans en ondes, c’est certainement pour cela que Radio-Canada le paie.
GO LE BIG GO!!!
Ben oui t’es un bon journaliste…! en plus, tu me fais rire! Moi en tout cas, je viens toujours sur voir.ca pour lire ta chronique, ton blogue et celui de Martineau. Mais c’est vrai qu’on a toujours besoin de recevoir des compliments, de savoir que ce qu’on fait, on ne le fait pas pour rien, que c’est apprécié.
Moi aussi j’espère que tu vas être journaliste encore longtemps!! (coudon…j’ai l’air d’une groupie! bientôt je vais me joindre à ton fan club!! :))
Ça fait du bien des compliments, surtout quand on les mérite. Parlant de travail de journaliste. Hier, j’ai écouté Les Grands Reportages à RDI sur la corruption judiciaire en Russie, je trouve qu’ils font un travail vraiment extraordinaire. Même si le résultat m’a empêché de bien dormir. J’imagine que pour eux ça doit être tout aussi pénible, je les félicite et les remercie de tout coeur pour leur courage à découvrir la vérité. Certains en perdent la vie, ce que je déplore haut et fort.
Alors longue vie aux journalistes qui n’ont pas froid aux yeux.
Puis Lucien Bouchard peut aller se faire voir.