Une analyse intelligente de Steve Boudrias sur La poule aux oeufs d'or. Un commentaire qui fait honneur aux "Steve".
Je trouve cette analyse de "la poule aux oeufs d'or" beaucoup trop superficielle pour être plausible ou expliquer le phénomène en entier.
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je dis que votre analyse de cette émission est superficielle, monsieur Proulx, car vous oubliez que ce phénomène ne peut se comprendre si on ne franchit pas, comme le million de téléspectateurs qui la regardent et l'écoutent ET la vivent, l'écran à travers lequel elle est diffusée.
D'ailleurs, pour le comprendre, il faut avoir fait de la politique et fais des sondages radio-télé. Désolé.
Il faut avoir sorti de son 2 1/2 éclairé pas chauffé pour aller encourager des personnes âgées à aller voter pour le PLC dans Mercier ou l'ADQ dans Laurier pour comprendre pourquoi "la poule aux oeufs d'or" est si populaire.
Oui, j'ai eu le même choc que vous, lorsque j'ai vu des personnes de plus de 65 ans vivrent dans un moins grand logement que moi. On a à peine de l'espace pour y entrer un lit, dans certains appartements de résidence pour personnes âgées…
Et vous savez quoi? Ces gens-là (qui ne sont que les grands-pères et grands-mères oubliés d'une famille éclatée) n'avaient rien mais ils étaient toujours prêts à me donner des bonbons ou 45 minutes de leur temps pour que je continue à leur parler en les vouvoyant… alors qu'ils savaient très bien que j'étais en face d'eux pour les arnaquer, pour leur arracher une opinion niaiseuse ou une cote d'écoute archi-super-hyper-méga-giga-extra-supra-archi-ultra importante.
Ce qui me rappelle le t-shirt de ma mère, qui disait: "Le bonheur c'est de crier: bingo!" 😉
Si je lis entre les lignes, peut-on dire que La poule est une sorte d'onguent à posologie hebdomadaire pour calmer un mal social plus profond, le sort des aînés?
Vous visez juste, chères Steve(s), en disant que tout ce fla-fla cache une vérité, un mal plus profond.
Mais au-delà du sort réservé aux ainés (solitude, pauvreté et j’en passe) il faut souligner la maya, l’illusion que miroite la civilisation occidentale, celle de croire que le bonheur existe en format pré-déterminé et surout, qu’il s’achète.
Même dans une ville aussi grosse que Montréal, où il y a plein de choses à faire, les gens s’ennuient; ils s’encabanent dans leur désarroi de vivre. Est-ce normal pour un pays où la culture, les gens, tout y est accessible? Mais les personnes sont-elles encore accessible…? Ne sommes-nous pas justement tous un peu pognés dans notre carcasse individuelle?
Chaque samedi matin, je vais m’occuper de personnes malades en phase terminale, et ce que je vois dans les yeux de certains, c’est le manque…le manque d’amour, le manque paix, le manque de vivre(sic). Le manque.
Tiens, mon père a eu 64 ans aujourd’hui et je lui ai demandé quel disque de sa collection de Led Zeppelin il lui manquait. Il m’a répondu « laisse faire la musique, achète-moi de la boisson, c’est tout ce qu’il me reste » et mon père n’a jamais été alcolo. Seulement, il n’y voit plus grand chose de bon à cette vie.
Fin de ma réflexion qui peut sembler déprimante (nous manquons tous de vitamine D ces derniers temps!).
Petite dernière parenthèse; la révolution tranquille a flushé plusieurs aspects moyen-âgeux de la société québécoise, y compris la religion, il y a maintenant près de 40 ans. Les églises (du moins les catholiques) se vident et se vendent, ce qui à mon avis n’est pas mauvais signe. Toutefois, il semblerait qu’on ait flushé le bébé avec l’eau du bain. L’aspect sacré de la vie dépasse le cadre des religions officielles mais nous avons tort de le chercher dans le hasard. « Le hasard n’existe pas; tout procède de la raison et de la nécessité » disait Leucippe il y a plusieurs siècles passés.
Avons-nous vraiment évolué?
Que les gens aspirent à gagner plus d’argent, c’est normal d’une certaine manière. Quand on voit que pour une trentaine d’années et plus de loyaux services, ils ne récoltent qu’une montre et un maigre revenu de fond de pension. Il y a de quoi mourir de peine.
C’est un peu comme les machines à sous. Ce n’est pas les riches qui s’y accrochent.
…sur les plaisirs des autres. L’absence de sens nous est commune, mais la pointer du doigt dans le jardin des autres – et de préférence chez ceux qu’on dfésigne comme « kétaines » – nous cache notre propre absence de repères.
« …quand on se compare, on se console ».
Le sort que l’on réserve à plusieurs aînés n’est pas un « mal social », monsieur Proulx… et si je me permet de relancer une autre fois un homme qui m’a honoré de sa présence d’esprit avec une association éthymologique prénominale des plus pertinentes, c’est que je crois que les conditions de vie des gens âgés ne sont pas fidèles aux images que l’on retrouve dans le « Bel Âge »… ni dans la littérature reliée au soi-disant « âge d’or »… si bien chanté par feu Léo Ferré…
On pourra m’objecter qu’on nous avait promis la « société des loisirs », dans les années 70, au moment où je suis né, et que c’est la raison pour laquelle je devrais me la fermer… mais je me dis que ce n’est pas parce qu’on est mal traité soi-même en tant que génération ouvrière méprisée à temps plein mais surexploité à temps partiel sur appel, ou à la pige dans des gratte-ciel sans parachute doré pour nous accueillir lorsqu’on se pète la gueule ou lorsqu’on s’engueule avec son patron ou sa superviseure, que cela est juste et bon…
Et après, on se demande pourquoi les jeunes « thrity something » d’aujourd’hui sont suivis par des jeunes intrépides qui font dans le sport extrême!
Peut-être se prépare-t-ils eux aussi à leur manière au marché du travail et à la vie sociale en générale, non??
Enfin, tout ça pour dire que le sort que l’on réserve à trop d’aînés, trop de vieux, trop de grand-pères et de grand-mères désespérés mais pas assez forts pour se défendre encore de notre indifférence ou de notre cruauté -ou bien pas assez fort pour se tuer, comme le soulignait une femme dans un autre commentaire…
Peut-être que ces gens, ces « bibliothèques vivantes » qui ont eu le malheur de ne pas naître en Afrique mais en Amérique… peut-être que ces gens fragiles (immunodéprimés pour la plupart) sont tout simplement des signes avant-coureurs de ce qui attend les babyboomers…
Et toutes les 90 secondes, depuis 2005, un babyboomer atteint l’âge de la retraite… ça devrait les faire réfléchir…