Mon billet sur le sketch du "maudit français" d'Éric Salvail ouvre sur la supposée relation "amour/haine" des Québécois envers les Français.
Marc-André Laferrière écrit:
Il est vrai que nous Québécois (petite généralisation ici) entretenons une relation amour-haine envers les français. Que voulez-vous, on a le sentiment que jamais les britanniques n'auraient laissés leurs concitoyens au joug des français? Alors que les français eux… Mais bon, c'est de l'histoire encienne vous direz (et vous aurez raison), sauf qu'on en paie encore le prix aujourd'hui. Et ça nous laisse un goût amer dans la gorge.
Je délire ou quoi? Quand je vois un Français, je ne vois pas "le peuple qui nous a laissé tomber il y a presque 250 ans", je vois un Français. Et je ne m'amuse pas à juger la personne en fonction de ses arrières-arrières-arrières-arrières grands-parents.
Si l'apprentissage de l'Histoire ne sert qu'à entretenir et perpétuer des rancunes centenaires, alors abolissons immédiatement l'Histoire du cursus scolaire!
Depuis que les cours d’histoire et de géographie ont été abolis du cursus obligatoire au secondaire, les Québécois ont oublié qui ils sont et où ils se situent. Pas surprenant qu’ils manifestent une forme d’indifférence envers leurs racines. Comment respecter ceux qui ont forgé notre histoire si nous ne les connaissons pas ? Comment revendiquer une identité alors que l’on ignore qui nous sommes et d’où nous venons ? En voulant liquider notre passé religieux, nous avons jeté le bébé avec l’eau du bain.
Selon Denise Bombardier, qui n’a pas la cote mais qui, au moins, ne pratique pas la langue de bois, la journaliste du Devoir perçoit une forme de culpabilité dans cette amnésie collective. «La grande nouvelle noirceur, c’est d’avoir tu à nos enfants le rôle fondamental qu’on joué le clergé et les communautés religieuses dans l’éducation. C’est d’avoir fait croire aux jeunes que l’histoire du Québec est une histoire d’exploiteurs, de traîtres, de sexistes, une histoire sans héros et sans modèles, bref une histoire sans source d’inspiration dont il est inutiles de se souvenir.»
Les Français et les Allemands ont mieux fait que d’abolir les cours d’histoire malgré les tragédies qui les ont opposées. Ils ont formé des comités mixtes et rédigé, non sans peine, des livres scolaires où l’histoire respective de chacun de ces deux peuples est fidèlement respectée. Sans culpabilité mais aussi sans l’oblitérer. Nous aurions avantage à prendre exemple sur leur largeur de vue.
Notons toutefois que si la France, comme l’Allemagne, ne cherche pas à taire son passé peu glorieux dans les livres d’histoire, l’enseignement seulement n’est pas à l’origine de l’animosité qu’un peuple peut avoir envers un autre. Les préjugés se véhiculent souvent de générations en générations. Et la France et l’Allemagne en sont un bel exemple.
L’Allemagne ADORE la France et les Français. J’en sais quelque chose, j’ai grandi dans ce pays. Par contre, les Français n’ont pas de sentiments aussi nobles pour leurs voisins allemands… Les raisons en sont évidentes. Le lourd passé d’envahisseurs que traînent les Allemands est encore trop vif dans la mémoire des Français, d’autant plus que la dernière invasion ne date que de quelques décennies.
Si les Allemands d’aujourd’hui s’encombrent de moins en moins de ces souvenirs, il y a encore dans les chaumières alsaciennes des grands-parents qui racontent à leurs petits-enfants qu’on leur interdisait de parler le français, leur langue maternelle, lorsqu’ils allaient à l’école pendant la deuxième guerre mondiale. Mais bien pire, ces mêmes petits-enfants savent qu’il y a 65 ans, les Français d’Alsace ont été enrôlés de force dans l’armée allemande et ont dû se battre contre leurs propres frères…
Cette histoire-là est trop récente pour que la France puisse déjà l’oublier. Mais en ce qui concerne les relations entre les Français et les Québécois, il me semble qu’il y a prescription depuis longtemps. Et si je ne me trompe, les Français ne se sont pas battus contre les Québécois, non ?
Depuis quand enseigne-t-on l’histoire dans nos écoles??? Je croise la génération des vingt ans à tous les jours et très peu d’entre eux connaissent leur histoire.
Rassurez-vous, M. Proulx, ici l’ignorance est maître. L’ironie veut que cette ignorance émane d’un réseau de l’Éducation fondé sur la gratuité scolaire… Quelle pitié!
Cherchez l’erreur. 🙁
Monsieur Proulx, Je suis étonné de votre réaction à mon commentaire qui n’était, au fond, qu’une tentative d’explication à cette manie qu’on a de parler de nos sympathiques cousins en terme de maudits français.
Rassurez-vous, moi aussi quand je vois un français je ne vois pas le peuple qui nous a laissé tomber il y a 250 ans. Et je ne m’amuse pas non plus à juger la personne en fonction de ses arrières-arrières-arrières grands-parents.
Seulement, pourquoi on traite nos cousins de maudits français si collectivement nous n’avons pas, disons, un ressentiment historique à leur égard? Et lorsqu’on croit à tort qu’ils nous regardent de haut (différence culturelle, j’en conviens), ne serait-ce pas en réaction à un sentiment d’abandon bien ancré chez nous? Je sais pas, j’suis pas un psy, juste un gérant d’estrade. Mais je m’interroge. Et si vous avez envie de délirer là-dessus, libre à vous.
Maintenant extrapolons un peu et supposons qu’on aurait vaincu les anglais.
Aujourd’hui, probablement serions-nous toujours français, et non québécois, canadiens, franco-canadiens, canadiens d’expression française. Juste des français, citoyens de la république française, avec un drapeau français et nos gueules de français. Et nous chanterions la Marseillaise en Amérique (pauvre Bush, nous aimerait pas).
Ensuite, qu’est-ce que ça changerait pour nous? Probablement pas de mouvement séparatiste ici. Donc pas de division profonde au sein de notre société par des référendums inutiles. Peut-être nous serions nous divisés entre monarchistes et républicains lors de la révolution, mais ça c’est une autre histoire. Nous aurions un parti de droite et un de gauche, contrairement à maintenant où nous avons droit à un parti souverainiste et un fédéraliste, avec droitistes et gauchistes mélangés dans les deux camps. Anyway. Tout ça est bien futile puisque l’Histoire ne se change pas.
Et je répète ce que j’ai dit dans mon intervention précédente: J’ai généralisé. Capiche?
Toute cette polarisation autour de la question nationnale… Ne serait-ce pas un facteur qui nous porte à revenir sur notre passé de vaincus?
Car sans défaîte, pas de référendums pour réparer le passé. Ça expliquerait peut-être ce ressentiment que certains de nous entretiennent. Car même si on s’est jamais battu contre les français, les divisions que nous vivons aujourd’hui entre fédéralistes et souverainistes découlent directement de l’abandon du Canada au profit de l’Angleterre.
Encore là, ce ne sont que des théories de gérant d’estrade. Ça vaut ce que ça vaut.
Mon intention n’était pas de gratter des plaies qui ne se referment pas. Si j’ai parlé des manuels d’histoire franco-allemands en usage depuis cette année, c’est justement parce que la situation est exemplaire. (La Planète TV5, août 2006). Des points de vue différents d’une histoire commune existent entre la France et l’Allemagne, et malgré des passages douloureux, des milliers de jeunes participent aussi aujourd’hui à des jumelages entre les deux pays. Cette aventure de jumelage ayant été initiée par un Français dont le père avait été fait prisonnier des Allemands, on peut penser que l’évolution des relations franco-allemandes soit largement enviée.
Si le Québec a été épargné par les deux dernières guerres, sauf en ce qui concerne ce qu’il est convenu d’appeler «l’effort de guerre», l’histoire du Québec possède elle aussi ses moments sombres. Le contentieux des «arpents de neige» ne devrait pas teinter les relations franco-québécoises. Mais le concept de nation qui refait surface exige une connaissance élémentaire de l’histoire pour soulever l’intérêt de ceux que ça devrait concerner.
Or, il appert que la façon de percevoir les faits historiques communs aux peuples fondateurs soulève la controverse depuis que, pour des raisons électoralistes, les politiciens déchirent leur chemise pour formuler notre définition.
Que des opportunistes remettent en question l’identité nationale québécoise, on peut le comprendre, mais que le débat sème l’indifférence au sein d’une majorité de Québécois, on peut supposer qu’une part d’ignorance n’y est pas étrangère. Comment peut-il en être autrement lorsque les cours d’histoire obligatoires ont été abolis de l’enseignement secondaire depuis plus de 30 ans. Des générations ne connaissent pas la réalité historique qui unit leur peuple. Comment peuvent-ils, dans ces circonstances, en revendiquer l’appartenance ? Et se percevoir comme nation ?