Avez-vous lu la chronique de Gil Courtemanche hier dans Le Devoir. Le texte s'intitule "Réflexions sur la pratique journalistique". Il résume à peu près toutes les réflexions que je -et d'autres journalistes- nourrissent depuis longtemps. Il parle, entre autres, de la couverture mur à mur de l'insignifiante "affaire Bédard". Quelques extraits:
Nous entrons ici dans une sorte de démesure que rien n'explique, même pas la notoriété de la championne olympique. […] Rien ne justifiait une telle débauche d'"information". Nulle violence, nulle menace, tout simplement la pathétique histoire d'un conflit familial ordinaire, faite d'étourderie, de malentendus, de détresse psychologique. Un triste fait divers transformé en événement national.
Hier matin, j'étais à RDI et j'ai discuté un peu de ce texte avec l'animateur Louis Lemieux. Celui-ci m'a répondu: "Oui, mais c'est une championne olympique tout de même…"
Effectivement. Je pense que les médias avaient raisons de parler de l'affaire. Sauf qu'il y a une subtile différence entre "en parler" et "s'acharner sur le sujet"…
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Il y a quelques jours, à LCN, il fallait entendre l'avocat de Mme Bédard déclarer en ondes: "Le monde est indigné de la façon dont Myriam est traitée…"
Le monde? J'ignore dans quel monde il vit, mais dans mon monde à moi, on s'en sacrait pas mal!
Je voudrais juste faire remarquer qu’à côté de cet article de Gil Courtemanche, se trouvait un article à propos de « l’affaire » Myriam Bédard. Ce n’est pas un reproche, mais c’est plutôt cocasse puisque M. Courtemanche écrivait: « Durant les deux dernières semaines, le Québec tout entier, sauf heureusement les lecteurs du Devoir, a pu satisfaire son voyeurisme et sa passion pour le fait divers en suivant minute par minute la triste histoire de Myriam Bédard. »
Ce n’est pas un fait très important, mais je crois utile de souligner l’inutile quelques fois.
Est-ce le même Courtemanche qui se lançait
dans de pesantes accusations de racisme,
dans sa colonne,contre les Américains,
le lendemain de l’ouragan Katrina,
sans y avoir mis les pieds,sans savoir de quoi il parlait?
ET CE,AVANT MEME QUE LA TOTALITÉ DES SECOURS SE SOIENT
MIS EN OEUVRE.
Des accusations grotesques démenties par les statistiques
qui établissent froidement que le nombre de victimes se
répartit à peu-près également entre Blancs et Noirs.
Katrina,un ouragan raciste,alors?
Lâchez-moi avec Courtemanche,une des pires commères
de notre petit monde médiatique!
Ce que monsieur Courtemanche essaie de mettre de l’avant, je crois, c’est le côté éditorial qu’un bulletin de nouvelles doit avoir.
Faut-il qu’un journal se crée de manière totalement anarchique? Un quotidien ou une chaîne d’informations doit-elle se contenter d’alimenter les « histoires » que les gens affectionnent le plus?
Quel est le rôle et l’impact sur la société de ces machines à fabriquer de l’image mondiale que sont les stations de télévision comme CNN, Newsworld, LCN, RDI, Al Jazira ou Al Arabia?
Comment cette couverture de l’actualité totale et ininterrompue de « ce qui se passe en ce moment » sur le globe influence notre vision du monde? Jusqu’à quel point tout savoir sur tout et partout ou, pire, l’IMPRESSION d’être toujours en liaison avec le monde nous aide-t-elle a mieux le comprendre, mieux y vivre et mieux l’améliorer?
Bref, réfléchissons-nous assez sur le rôle du « quatrième pouvoir » dans notre société post-moderne?
Pour ma part, cela démontre l’utilité d’une chronique médias comme celle de monsieur Proulx. Non pas simplement pour étudier de près la manière dont les médias couvrent une « nouvelle ». Mais aussi pour savoir si ces « histoires » doivent avoir une morale?
Et si oui, où trouve-t-on les fondements moraux sur lesquels on pourrait établir cette éthique? Et, surtout, à l’ère de l’internet, de l’information-rumeur, de l’info-flamboyante, est-il possible de contrôler un médium d’information aujourd’hui?
Bref, l’arrivée d’internet dans le quotidien des gens comme source d’informations repousse sans cesse les limites de ce que l’on peut présenter, de la manière dont on peut couvrir les événements et comment cette source d’information peut être utilisée dans un but bien précis.
Enfin, si on veut rester positif, on peut dire que internet finira par aiguiser EN GÉNÉRAL notre sens critique envers l’information médiatique… mais d’un point de vue pessimiste, on peut se demander jusqu’où va nous pousser notre crédulité collective?