Surprise hier. À la une de La Presse, on annonce que Radio-Nord et Rogers seraient sur le point d'acheter TQS.
Wow! Grosse nouvelle. Je lis l'article et je débande au troisième paragraphe:
Rogers n'a pas voulu commenter les rumeurs d'acquisition. De son côté, Radio-Nord niait formellement son intention d'acheter TQS. "Je n'ai jamais entendu parler de ça", a dit Raynald Brière, président et chef de l'exploitation de Radio-Nord à La Presse.
Et le paragraphe d'ensuite:
Hier en fin d'après-midi, TQS n'avait pas reçu d'offre d'achat formelle […]
Nous sommes donc en présence ici d'une nouvelle non-confirmée -et même formellement niée- par les deux principaux acteurs de la nouvelle. S'agit-il d'un scoop? Euh…
Actuellement, c'est la course.
Ce sera à qui annoncera le premier le sort de TQS. Mais la quête de l'exclusivité ne devrait pas non plus faire place à des ballounes. Le "scoop" d'hier de La Presse n'était rien d'autre que de la spéculation. Un article qui ne valait certainement pas un bandeau en une et un article en page A4. Tout au plus un entrefilet dans la rubrique: "Paraîtrait que peut-être que…"
Faire autrement, c'est mal informer. C'est exciter l'opinion publique.
Enfin, c'est aujourd'hui, alors que TQS passe en cour pour demander un prolongement de 30 jours de la protection accordée le 18 décembre dernier, que l'on en saura plus.
Et on pourra parler de l'avenir du Mouton noir en laissant tomber le conditionnel. Enfin…
MISE À JOUR, 12h05, un communiqué:
TQS obtient un délai supplémentaire
MONTREAL, le 16 janv. /CNW Telbec/ – En vertu de la Loi sur les
arrangements avec les créanciers des compagnies, le Juge Pierre Journet s'est
rendu aux arguments de TQS inc. ("TQS") et de RSM Richter inc., contrôleur au
dossier, pour prolonger d'une durée de 45 jours, se terminant le 29 février,
l'ordonnance émise le 18 décembre dernier.
Le délai supplémentaire accordé permet à TQS inc. et RSM Richter inc. la
poursuite de leur travail pour élaborer un plan d'arrangement avec les
créanciers et pour trouver un acquéreur pour les actifs de TQS.
J’ai pris connaissance de ce superbe exercice de… journalisme (?) dans les pages de La Presse.
Et il me fait penser à l’effet CNN décrit par un journaliste du Times à l’époque où Ted Turner n’était qu’un ti-coune et non le tycoon qu’on connaît aujourd’hui.
Le journaliste du Times disait en gros ceci : CNN est au journalisme ce que mon dernier brouillon d’article envoyé dans ma corbeille à papier est à un article de fond vérifié et approuvé par le comité de rédaction de ma revue renommée (à cette époque, le Times croyait pouvoir résister à l’accélération imprimée par l’actualité en continue sur la profession journalistique en général).
Bref, je fais cette petite parenthèse « historique » pour trois raisons :
1) les journalistes, après s’être fait traiter de « courroie de transmission du pouvoir en place » risquent maintenant d’être entraîné dans une tendance bien plus pire : celle de véhiculer des rumeurs et de fausses informations servant des intérêts purement stratégiques plutôt que de servir le fameux « droit du public à l’information » ;
2) l’accélération de transport et de la révélation de l’information par le biais des médias électroniques force les journalistes ET les chefs de pupitre à tourner les coins ronds lorsque vient le temps d’aborder l’actualité ;
3) les médias (électroniques ou autres) qui ralentiront volontairement la cadence infernale de l’information spectaculaire et choisiront d’éviter le scoop (en laissant ça aux fabricants de tendances) afin d’investir dans la réflexion, la mise en perspective et la saine distance par rapport aux sujets abordés seront ceux qui feront avancer la profession du journalisme.
***
Je profite du moment où je parle de ce qui fait avancé le journalisme dans une direction autre que le sacro-saint « scoop » afin de souligner l’excellente émission présentée à la SRC et animée par monsieur Lépine.
Sans oublier celle de Masbourian à la radio, chaque soir à 20h00… et qui parlait justement du « slow movement », un mouvement de protestation contre l’accélération du rythme de vie occidental qui cherche à désacralisée la vitesse comme valeur de base de notre société civile.
Et, tant qu’à y être, pourquoi ne pas mentionner le « vieux » livre de Kundera, dans lequel il y fait « L’éloge de la lenteur » ?
Un cadeau à offrir à bien des journalistes et blogueurs… et pas seulement à La Presse ou Cyberpresse.ca…