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Voici à quoi sert Radio-Canada

Il est vrai qu’il était malhabile de la part de Radio-Canada d’indiquer dans  son communiqué que le Bye Bye 2008 (promis, c’est la dernière fois que j’en parle) se situait «au cœur» du mandat d’une télévision publique.

D’ailleurs Richard Martineau a tiqué là-dessus. Mais de là à grimper dans les rideaux et se demander si Radio-Canada a toujours sa place… Respirons par les narines.

Dans sa chronique du 8 janvier, Martineau écrivait :

…plus ça va, plus on a l'impression que la télé française de Radio- Canada joue dans les plates-bandes de la télé privée.

[…]

…quand on syntonise Radio-Canada, on ne sait pas si on regarde la télé publique ou privée. Parfois, on est à TVA. Parfois, à TQS. Parfois, à The Comedy Channel.

À mon avis, Richard ne regarde pas souvent TVA. Et encore moins TQS.

Parce qu'il y a quand même deux ou trois subtiles différences entre TVA et Radio-Canada, à commencer par Claude Poirier.

Pour Martineau, une télévision publique doit ressembler à Télé-Québec.
Et si j’ai bien suivi son raisonnement, les chaînes privées devraient avoir le monopole des affaires pas bonnes (comme les grosses comédies bien grasses).

C’est un avis.

Richard Therrien, du Soleil, a aussi répliqué au curieux raisonnement de Martineau :

Non seulement je ne comprends aucune logique dans ce raisonnement, mais je vois totalement l’inverse. Les nostalgiques de la «grande époque culturelle» de Radio-Canada, qui ont une mémoire sélective, ne retiennent que Les beaux dimanches, L’heure du concert et les grands téléthéâtres, et oublient comme par enchantement Les Coqueluches, Allô Boubou, Louvain à la carte, Les démons du midi et Le travail à la chaîne. En réalité, Radio-Canada n’a jamais présenté aussi peu de «quétaineries» qu’à l’heure actuelle. Il suffit de voir un seul épisode d’Ici Louis-José Houde pour le constater.

Je me permets d’ajouter mon grain de sel à ce micro-débat : la télévision française de Radio-Canada n’est pas seulement une chaîne publique, elle est aussi la SEULE chaîne de langue française véritablement généraliste au pays.

Pas dans les termes du CRTC, mais dans les faits.

Une télévision généraliste est une télévision qui ne s’interdit aucun genre, qui présente un éventail varié d’émissions. De la comédie bien grasse aux émissions scientifiques.

Or, TVA n’est plus à proprement parler une télévision « généraliste ». Elle a délaissé ses émissions jeunesse depuis longtemps. On compte sur les doigts d’une main ses émissions d’affaires publiques. Ses émissions culturelles se résument à parler des vedettes de Star Académie. On la dit généraliste parce qu’elle vise un public moyen, en présentant «des émissions divertissantes qui plaisent à un peu tout le monde sans s'adresser à personne en particulier.»

TQS non plus n’est plus une chaîne généraliste. Les frères Rémillard l’ont bien spécifié en achetant ce money pit : le Mouton noir sera désormais une «chaîne généraliste "précise et ciblée". TQS veut parler aux hommes de 18 à 49 ans, avec des émissions viriles, des combats extrêmes, des affaires de char, etc.

Et Télé-Québec n’a jamais été une chaîne généraliste. C’est une chaîne éducative et culturelle.

Radio-Canada est donc la seule vraie chaîne généraliste au Québec. Pour combien de temps encore? Je l’ignore.

Mais j’ai toujours pensé qu’une chaîne qui a pour mandat d’offrir une véritable diversité d’émissions a un rôle à jouer dans une société comme la nôtre.

Cela peut donner, une fois par année, un show raté comme le Bye Bye 2008. Mais il ne faudrait pas que ça nous fasse oublier la quantité d’enquêtes, de séries audacieuses, d’émissions d’affaires publiques solides, de comédies qui respectent notre intelligence, d’émissions culturelles et d’émissions pour enfants que cette antenne diffuse tout au long de l’année.

Ce mandat-là, aussi diversifié, ni TVA, ni TQS, ni Télé-Québec n’est en mesure de l’assumer pleinement.

Voici donc à quoi sert Radio-Canada.