Photo: TMR |
Samedi en fin de soirée, devant la gare, c'est le grand moment pour Samuel Bianchini et les étudiants de son Atelier de recherche et création de l'École nationale supérieure d'art de Nancy. Ils nous dévoilent enfin leur Poursuite 30X30, un dispositif qui porte bien son nom: il prolonge en effet, symboliquement, la présence de Paul-André Fortier ici, et est strictement constitué d'un projecteur de poursuite (follow spot).
Le concept est simple: sur la paroi d'un grand immeuble, un projecteur cherche quelque chose. Un prisonnier qui se serait évadé? Un suicidaire sur le point de passer à l'acte? On lit ces questions et bien d'autres dans les yeux des passants. Des interrogations qui font écho à celles provoquées par un certain danseur sur sa cabane.
Voilà déjà l'une des résonnances de l'entreprise de Fortier Danse-Création, dont tout le monde ici dit qu'elles seront profondes et nombreuses. Quant à Daniel Denise, il sait que son Solovidéophoto conjuguera un élément vidéo avec des portraits de Nancéiens en tenue de travail, mais se pose encore des questions quant à la facture finale. Or à parcourir le splendide catalogue de son expo Stanislas Urbi et Orbi, qui comprenait en outre une série de portraits des habitants de Nancy, on ne doute pas qu'il trouvera un ciment pour lier tous ses motifs.
Peut-être pourrons-nous en juger à Montréal, qui sait? Certains parlent de l'éventuel projet de faire venir tout ce beau monde chez nous, c'est-à-dire non seulement Bianchini et Denise, mais aussi tous les autres artistes ayant passé un moment en orbite autour de Paul André-Fortier. Ce serait l'occasion de voir comment une vision artistique peut en engendrer une autre. Engendrer, oui, parce que ces projets connexes ne sont pas d'ordre documentaire, il sont du domaine de la création pure, et Paul-André Fortier le précisait d'ailleurs dès les premiers contacts avec ses collaborateurs: «Je ne suis pas nécessairement le sujet de votre création, je n'en suis que l'occasion.»
De Nancy, ville qui n'aura finalement mis que quelques jours à me séduire tout à fait, je repars avec des souvenirs forts: l'étonnant dialogue entre les quartiers médiévaux, les perspectives XVIIIe et les legs arts déco de l'École de Nancy, dont nous avons visité le musée samedi; les rencontres avec de grands passionnés de création, qui nous rappellent que Paris n'est pas le seul phare culturel de France; enfin, je repars avec en mémoire les gestes singuliers d'un minuscule géant, qui nous a convaincu que la beauté pouvait pousser partout.