J'ai déjà reçu quelques réponses intéressantes à la question: quel livre aimeriez-vous voir porté à la scène ou à l'écran, et brièvement, pourquoi? En voici des extraits:
1) Pierre Yergeau, publié chez l'Instant Même, pour le deuxième volet de sa "neptuologie" Abitibienne – il y a un scénario hallucinant à sortir de là, ça c'est certain ! 2) Réjean Ducharme, "L'avalée des avalés", pour le défi d'adaptation d'une rage adolescente se rapprochant de l'univers de Peter Jackson (dans son incroyable film sur le délire meurtrier de deux jeunes amies fusionnelles néo-zélandaises) – Steve Boudrias
Nancy HustonJ'oserai un roman qui m'a beaucoup impressionnée: «Lignes de faille» de Nancy Huston. Je suis sans ménagement pour le réalisateur, je sais. Quatre différents enfants de 6 ans que l'on doit un moment donné voir adulte… et puis, une plausible chaîne des générations. Non décidément, il faudrait beaucoup de talent et beaucoup de millions ! – Venise Landry
Je pense à des fêtes de la parole et je trouve mes meilleurs exemples en Afrique ou aux Antilles. Mon 1er choix: Allah n'est pas obligé (Ahmadou Kourouma, 2000). Déjà monté au théâtre à Avignon puis à Paris. Mais, j'aimerais entendre ici une adaptation originale de ce récit plein d'humour sur un sujet si grave. Autrement, Texaco (Patrick Chamoiseau, 1992): la déferlante d'une parole marquée, sonore, vivante. Et cette fable: une femme forte qui tient tête au commerce du pétrole. – Jacques Julien
La question est ouverte jusqu'en début de semaine prochaine… D'ici là, comme on dit, bon Salon!!
Je verrais bien La grosse femme d’à côté est enceinte ou Thérèse et Pierrette à l’école des Saints-Anges au cinéma. À la réalisation, pas Denise Filiatrault svp, mais plutôt quelqu’un comme Jean-Marc Vallée ou Émile Gaudreault… Ou peut-être André Melançon, à qui l’on droit l’excellente adaptation (pour la télé) d’Albertine en cinq temps.
Je suis très souvent déçu par le passage de l’écrit à l’écran mais je prendrais une chance pour la proposition d’un bon réalisateur pour
1- Cochon d’Allemand de Knud Romer. L’auteur tout en décrivant sa famille tout en nuance laisse à un réalisateur une marge de manoeuvre pour nous présenter une belle oeuvre.
2- Les oeuvres d’Aki Shimazaki qui nous plongent dans un univers fascinant et qui nous permettraient de voyager, dans tous les sens du terme, pour pas trop cher.
Si le dicton dit qu’une image vaut mille mots, avec ses deux auteurs, l’inverse est aussi vrai.
Depuis que j’ai lu ce roman d’Hubert Aquin, il y a une quinzaine d’années, je me meurs d’envie de le voir à l’écran. Je sais que « Prochain épisode » a déjà été porté à la scène, par je ne sais plus qui malheureusement, et depuis des années, des rumeurs de tournage me parviennent aux oreilles. Hélas! J’attends toujours! Pour ce projet, je verrais bien Philippe Falardeau derrière la caméra… À suivre…
J’aimerais vous donner raison dans votre choix de réalisateur mais… je ne sais pas si la personne dont vous me parlez est assez hanté, oui, littéralement hanté par une idée particulièrement fendue par le travers de ce que peut être, de ce qu’a été et de ce que pourrais devenir le Québec.
Pour moi, « Prochain épisode » pourrait facilement devenir le « Apocalypse Now » d’un réalisateur québécois.
Ce que ce texte-là charrie entre ses lignes tectoniques, ça tient à la fois de la guerre et du mythe.
Enfin, c’est ce que j’ai ressenti lorsque j’ai terminé le livre.
Le profond sentiment d’inachèvement paradoxal qui se grave profondément dans l’accomplissement du discours qui se plaque sur l’inconscient d’une nation somnambule.
C’est l’émotion dont je me rappelle et qui me reste de ce roman énigmatique. Un roman qui contient plus de questions que de réponses sur ce que nous sommes.
Et l’adapter aujourd’hui demanderais qu’on suggère en arrière-plan des réponses que très peu de gens seraient prêts à accepter, je crois.
Sinon, madame Dumais, le risque est très grand que nous aboutissions à une réalisation convenue où la reconstitution des lieux et la beauté des costumes finiraient par prendre le pas sur le discours foncièrement politico-désespéré de ce livre-là.
Ça demande un homme (ou une femme, peu m’importe) qui comprenne et qui intègre une volonté créatrice d’adapatation cinématographique à la Kubrick.
Si « Prochain épisode » était porté à l’écran, il faudrait qu’il soit « paint it black » comme « Full metal jacket » et cauchemardesque comme « The Shinning ».
Sinon, ça ne vaut pas la peine de déranger un homme qui s’est endormi éternellement sans utiliser de somnifères.
On ne peut pas toucher à l’oeuvre d’un homme qui a fermé ses yeux sur le monde qui lui a donné naissance sans plonger dans un abyme absorbant et volcanique.
Pour moi, « Prochain épisode », adapté au grand écran devrait s’appeler « La faille de San Andreas » tellement c’est puissant. dsl
Soyons clairs : les meilleurs livres sont inadaptables au cinéma. En témoigne la déception que nous ressentons devant ces adaptations qui enlèvent souvent à leur objet ce qui en faisait des oeuvres d’art, devant ces films qui ne sont souvent que des commentaires réducteurs d’oeuvres qui s’en seraient bien passé. Pourquoi? Parce que les meilleurs livres sont, précisément, littéraires.
Traduire la langue folle, le style de Céline, dont le Voyage au bout de la nuit fourmille pourtant d’images aguichantes, par une narration hors-champ? Lourd.
Adapter Neige noire d’Aquin, ce chef-d’oeuvre qui adopte pourtant la forme du scénario? L’intertextualité, qui est au fondement de bien des oeuvres contemporaines et qui en fait souvent la force, sera forcément éludée.
Les sept solitudes de Lorsa Lopez? L’esprit, parcourant ce roman baroque et loufoque, se crée son propre scénario. Chapeau au cinéaste qui saura mettre en images ces temps et ces lieux multiples, cette langue exquise et grotesque.
Sans parler de la poésie… Et les plus grands livres sont poétiques.
Adapter la littérature au cinéma demande une réécriture totale, une traduction à la Artaud, transformant son Carroll comme bon lui semble. Les rares réussites en cette matière – Raoul Ruiz et son Temps retrouvé en tête de file – ne se sont pas risquées à respecter le texte au pied de la lettre. Parce que le texte, s’il est réussi, se suffit, amplement, à lui-même.
Quels livres adapter au cinéma, à moins de vouloir les repenser et les réécrire pour l’oeil de la caméra? Les moins bons, donc, qui gagneraient, eux, au change.
Je proposerais toutes les chroniques du Plateau Mont-Roayl, pas seulement les deux romans proposés par votre collègue Kevin Laforest. Il serait intéressant de voir à l’écran l’évolution des personnages.
Je songe aux Nouvelles d’Édouard, où on fait un retour dans le passé de la duchesse après un événement particulier. Ceux et celles qui l’ont lu savent de quoi je parle. Quant aux autres, j’espère avoir assez titillé votre curiosité pour que vous ayiez envie de pénétrer ce monde à la fois si réaliste et si spécial.