La prochaine téléréalité de la chaîne britannique ITV, à laquelle on doit la déconcertante émission «The People’s Garderner», dont le but était d’élire le meilleur jardinier, s’intitulera «The People’s Author». Les candidats recherchés? Des auteurs en herbe qui rêvent de diffuser leur œuvre naissante.
Ces derniers, qui doivent résider en Grande-Bretagne et ne pas être écrivains professionnels, ont jusqu’au 30 juin pour soumettre un texte de 5000 mots. 16 participants seront retenus, que les téléspectateurs verront ensuite évoluer à l’écran.
Enfin une téléréalité intelligente? Mmmh, quand on lit bien les directives données par la chaîne, il devient clair qu’on ne recherche pas le prochain Kundera… En outre, le projet de livre défendu doit être «une histoire vraie inspirée de faits que le participant a vécus».
Mon petit doigt me souffle de craindre le pire.
Enfin, voici une très bonne façon de briser le mythe de l’écrivain solitaire, asocial et snob. J’ose espérer de tout mon coeur qu’un tel projet voit le jour au Québec et que seuls les étudiants de Lettres, de littératures; diplômés ou pas seront invités à poser leur candidature.
Combien de fois trouve-t-on dans les offres d’emplois des employeurs à la recherche d’artistes diplômés en Lettres ou littératures avec un ou trois années d’expérience? J’en ai jamais vu. Les gens de lettres ne sont pas très bien reçus dans la société. Même lorsqu’il y a des lancements et d’autres grands projets publics qui rassemblent un grand nombre des amis des gens de lettres, rares sont ceux et celles qui arrivent à capter l’attention des médias afin de donner à cet art sa marque de noblesse. Donc, une telle émission donnera le goût d’écrire aux spectateurs et montrera que la littérature a une valeur musicale plus juste que la musique instrumentale et que par elle tous les voyages sont possibles, tous les rêves peuvent se réaliser et c’est le premier moyen par lequel l’homme peut s’extérioriser avec justesse, précision et ausi avec un brin de pudeur.
La littérature est l’essence de base de tous les autres arts. De plus, la littérature puise sa source dans le vécu de soi et des autres. Àprès, tout dépend de la manière que les participants vont libérer le génie qui dort en eux pour aller séduire le coeur du public. L’idée est bonne.
Marie-Michèle,
Je suis comme vous ravi qu’on parle de littérature à un large public. Ce qui m’inquiète, c’est cette exigence initiale, celle d’un texte qui soit obligatoirement « une histoire vraie ». La littérature emprunte toujours à la réalité, mais elle devient en général intéressante quand elle va au-delà des impératifs de description et du souci de véracité ou même de crédibilité.
Je pense en fait que les organisateurs sont convaincus d’avoir besoin du côté sensationnaliste de l’histoire vraie pour faire de l’audimat. Est-ce que ça sert bel et bien la littérature et la compréhension de ce que c’est qu’écrire vraiment? Pas sûr.
Et pour tout dire, je m’attends surtout à ce que cette émission, dont l’animateur sera le même que pour «The People’s Garderner», soit super kétaine.
À suivre. Mettez-moi au courant lorsque cette émission sera sur la grille horaire. Je prendrai le temps de suivre les épisodes, de voir la façon que les participants vont transcender leur vécu en exercice de création afin d’apporter une nouvelle vision basée sur la petite chose qui échappe aux autres mais qui prend un tout autre sens pour celui et celle qui s’en approprie…
C’est à suivre. C’est souvent le petit côté kétaine qui permet de séduire les gens. Il suffit d’être capable de les prendre par surprise. N’oublie surtout pas mon cher que ces téléréalités montrent la façon que notre société fonctionne et les critères de sélection des candidats. C’est aussi une forme de progrès régressifs pour certains et bénéfiques pour les nouveaux adeptes qui prendront goût à l’écriture expérimentale. Ne reconnaissez-vous pas Zola dans cette littéréalité ?
C’est probablement contre l’animateur que vous avez une dent.
Chère Marie-Michèle, je mets ma main sur mon coeur et promets de faire preuve d’ouverture… Nous jugerons sur pièce, en septembre!
Vraiment, moi aussi, il m’en faut beaucoup d’ouverture pour y croire ne serait-ce qu’un brin.
De la littérature accolée à de la performance, je m’en méfie. Je pense à une compétition féroce entre celui qui a le plus plus souffert et qui arrive à l’exprimer le plus efficacement. Déjà que je trouve que la littérature truffée de drames, celle qui donne la latitude pour beurrer épais d’émotions, a tendance à avoir la cote. Personnellement, je me penche surtout vers l’habileté à dévoiler l’intimité, le soi vulnérable, l’intériorité.