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Festival Eaux Claires au Wisconsin: la musique, les étoiles et l’orage

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Ma photographe et moi avons pris la route la semaine dernière pour assister à la toute première édition de Eaux Claires, festival mis sur pied par Justin Vernon (Bon Iver). Après avoir traversé 6 états américains et avoir passé 3 jours à Chicago (je suis tombée en amour avec cette ville), on est arrivé dans la canicule au Wisconsin.

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Pas facile, la chaleur accablante lors de festivals extérieurs, mais heureusement, il y avait moyen de se reposer sous les arbres et boire 1L d’eau entre deux bands.

Le site d’Eaux Claires était parfait pour accueillir les 20 000 festivaliers, surtout dans la catégorie d’âge 20-35, mais aussi de nombreux couples et groupes un peu plus vieux ainsi que des familles. Ça longe la rivière Chippewa et c’était très bien aménagé pour l’occasion. Deux scènes principales en bas et deux autres plus petites en haut du sentier (ainsi que des tentes où il y avait performances et arts visuels). J’ai entendu dire qu’il y avait d’autres festivals à cet endroit pendant l’année, ce qui a dû faciliter l’organisation d’Eaux Claires.

Vendredi, on attrapé en premier lieu la dernière chanson du jeune band brooklynois métal Liturgy. Ça nous a donné un petit boost d’énergie après de longues heures de route.

Ensuite, le trio féminin britannique The Staves ne m’a pas tant impressionnée. Quoique les harmonies vocales des jolies demoiselles étaient réussies, la musique n’était pas très enlevante et tombait souvent à plat. Un peu plus tard, une toute autre énergie régnait sur la scène Flambeaux alors que le collectif rap Doomtree nous a bien fait bouger. Il y avait 5 MC, je crois – dont une fille très efficace! – ce qui faisait beaucoup de roulement sur scène.

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photo Joanne Geha

Après ça, le highlight de cette première journée: Spoon. J’aime beaucoup le groupe mais n’avais pas encore eu la chance de les voir live. Ils ont de l’expérience dans le corps et ça paraît. Le groupe d’Austin au Texas a livré la performance la plus énergique et divertissante du week-end. Très cool d’entendre de vieux hits comme The Way We Get By ou des plus récentes pièces comme la très entraînante Do YouBritt Daniel est tellement un bon frontman, ç’a a pas d’allure. Je ne manquerai pas de les revoir sur scène.

À 20h, Tallest Man on Earth a donné une super perfo sur la scène Flambeaux. Il a débuté avec des pièces plus récentes avec son band avant d’y aller de quelques pièces plus connues solo à la guitare. J’avoue que j’ai préféré le deuxième volet en solo parce qu’on voyait toute l’intensité et l’authenticité de l’artiste suédois.

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photo Joanne Geha

The National a clôt la soirée de vendredi avec un set qui a fort mal débuté alors que le chanteur Matt Berninger a coupé le band pour recommencer la première chanson parce qu’il n’était pas satisfait. Sufjan Stevens est venu faire un tour en tant que choriste sur quelques pièces mais c’était étrange de le voir chanter timidement aux côtés de Matt Berninger, qui jouait le jeu du leader trop «crinqué», qui lance son micro par terre. Bof, ce genre d’attitude sur scène n’est pas trop ma tasse de thé. J’aime bien The National sur disque, mais sur scène, nope. C’était le temps de partir.

Dans la nuit de vendredi à samedi, on a très peu dormi puisqu’un violent orage rageait à l’extérieur. Il y avait tellement d’éclairs, de vent et de tonnerre que j’ai remercié le ciel de ne pas avoir choisi l’option camping.

Samedi matin, la pluie était passée, mais la chaleur était restée. On a commencé la journée avec le sublime Colin Stetson. C’est la troisième fois que je le vois sur scène et chaque fois, ça me subjugue. La foule, très nombreuse pour un début d’après-midi de dur lendemain d’orage, était totalement au rendez-vous, épatée et aspirée par les prouesses respiratoires de Colin et de ses sax.

La légende soul-funk qu’est Charles Bradley est ensuite arrivée sur scène à 16h pour nous dégourdir. Le chanteur américain à la voix magnifique bougeait un peu moins qu’à son habitude en début de perfo, mais il faut dire qu’il était habillé en col roulé et veston et ne devait pas être très confortable. Hop, après un changement de costume en milieu de performance, il était prêt à nous chanter l’amour et la séduction comme il le fait si bien au son de son excellent band.

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photo Joanne Geha

Ensuite, on a remonté le sentier pour voir quelques chansons du mythique groupe noise-rock japonais Melt-Banana. Je ne connaissais pas le band et y suis allée par curiosité, sous la recommandation de l’ami Vincent. Quel beau divertissement! Ça crache le feu, ce band. Les oreilles chauffaient. Mais c’était trop tôt encore pour le bodysurfing.

À 18h, c’était l’heure du repos dans l’herbe, la soundtrack de fond: l’électropop du groupe de Minnesota Poliça. La chanteuse Channy Leaneagh, enceinte de quelques mois, a donné ce qu’elle a pu, mais force est de constater que malgré du matériel bien fignolé et accrocheur, le groupe manque d’un je-ne-sais-quoi. C’est pas plate, mais je trouve qu’ils sont un peu trop dans leur tête et qu’ils ne réussissent pas à nous entraîner complètement.

Plus tard, Sylvan Esso ne m’a pas du tout convaincue. La musique électropop est dansante, accrocheuse, énergique. La chanteuse était juchée sur des souliers-plateformes de 10cm (j’exagère à peine) et le DJ ne faisait que peser sur quelques boutons à l’occasion. Je n’aime pas du tout ce genre de formule, mais bon… je comprends tout à fait qu’ils veulent offrir un party sur scène. Des quelques pièces entendues, je préfère de loin lorsque le groupe s’aventure dans un son plus «minimaliste» dans le genre du single Coffee.

Finalement: les deux pièces de résistance de cette édition inaugurale d’Eaux Claires: Sufjan Stevens et Bon Iver. Les deux ont donné de super performances, pleines de douceur et de bonne énergie.

Sufjan était tout sourire, même an avouant qu’il ne fait habituellement pas de festivals parce qu’il est trop craintif des grosses foules. Il a livré un très bon spectacle – que j’ai même préféré à la version en salle lors de son récent passage à la Place des arts à Montréal. Il a su bien doser entre des pièces plus douces et acoustiques de son plus récent album Carrie & Lowell, et des jams bien sentis autour de ses plus vieilles pièces, retravaillées.

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photo Joanne Geha

Finalement, le maître de cérémonie Justin Vernon (Bon Iver) s’est amené sur la scène principale à 22h. La foule était fière – le musicien est natif d’Eau Claire – et chalereuse. Avec raison, puisque le musicien à la voix de falsetto nous a royalement comblés. Il a débuté sa performance d’1h30 avec le trio de choristes The Staves avant de s’entourer du guitariste de The National Aaron Dessner et de yMusic. Mais ce ne sont pas les invités qui ont fait la réussite de ce show. Bon Iver a livré ses hits de For Emma, Forever Ago (2007) et Bon Iver (2011) avec beaucoup d’aplomb, de passion et de justesse. Aussi, les musiciens de Bon Iver ont à peu près tous pris le micro pour chanter à un moment dans la soirée, Justin Vernon leur laissant le spotlight. Cette confiance, communion entre eux était belle à voir. En terminant la soirée avec Skinny Love sous le ciel étoilé du Wisconsin, c’était tout simplement parfait.

Merci Eaux Claires!

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