BloguesÀ la gonzo

La fois où j’ai Occupé Philip Barclay.

Dépassé midi, rendez-vous sur Skype. On s’ajoute, attend j’enfile un t-shirt, qu’il me dit, la voix endormie, avant d’activer la caméra. En robe de chambre et toute couettée, j’avais presqu’oublié ce rendez-vous post-fin de session.

Philipbarclay.com est né il y a un an et demi, entre les réflexions musicales et personnelles d’un universitaire qui avait envie de pratiquer son écriture tout en se faisant un nom via le marketing web. Des quatre lecteurs quotidiens, il cumule un lectorat impressionnant : au-delà de 10 000 visites par jour, selon les jours. On le connaît surtout pour L’amour moderne (21 059 likes) et Hommage à la fin de session (6 600 likes). Il explique son succès par une ligne éditoriale tranchante, irrévérencieuse, jeune, basée sur la pop culture. Mais encore? 

Il y a tellement de contenus sur le web, les gens se désintéressent vite. C’est facile d’écrire, mais c’est dur d’être lu. C’est un processus de séduction constant. J’étudie les statistiques, j’affine le style et la longueur des textes selon ce qui est le plus lu. Ça m’indique le nombre de mots, le nombre de paragraphes idéal, ce que les gens aiment lire.

As-tu trouvé la combinaison parfaite, la recette magique?

Faut que tu lises The Tipping Point, de Malcolm Gladwell, ça explique bien le moment où quelque chose devient adopté par une masse.

Le contexte est important. Par exemple, Hommage à la fin de session, c’est du contenu recyclé. Je l’avais écrit il y a un an et demi et je l’ai ressorti au bon moment. Il y a deux jours dans l’année où tu peux publier ce texte, le moment où les étudiants sont à bout juste à la veille des examens. Ça représente ce qu’ils sentent et donc ils le partagent.

Les connecteurs sont importants. Quelqu’un qui a une bonne fan base comme Alexandre Champagne et qui partage ce que j’écris, ça me permet de m’approprier une partie de ses 18 000 fans.

Le contenu doit être accrocheur. Je ne fais pas de nuance, c’est oui ou non, ce qui fait que les gens s’approprient ce que j’écris et commentent. Je tire mes exemples de la culture populaire et non de la haute culture, c’est important.

Il y a une dizaine de types de contenu viral, moi je suis dans la catégorie qui génère une émotion en décrivant un état, sans valeur scientifique.

As-tu appris ça à l’école?

Pas exactement. Philipbarclay.com, c’est mon laboratoire de marketing. Si tu veux qu’un blog lève, faut que tu analyses les résultats, faut écrire par intérêt personnel et consommer beaucoup de contenu web.

Penses-tu que ton blog change le monde?

(Il hésite) Je pousse à la réflexion, si quelqu’un change de position pendant qu’il me lit, qu’il pense autrement, c’est déjà ça. Je suis pas engagé socialement, mes textes permettent d’alléger la journée, j’arrive à mettre des mots sur des réalités que les gens vivent, c’est une qualité.

Qu’est-ce tu penses du mouvement Occupy? C’est intéressant, tous ces gens qui se mobilisent… Toi, tu t’indignes de quoi?  Je m’indigne du capitalisme sauvage, du néo-libéralisme, c’est là que naît le creux entre les riches et les pauvres, à cause des gens qui se foutent des impacts négatifs de leurs actes. Le système est tellement compliqué, il y a une inégalité dans les connaissances. C’est un problème d’éducation économique.

Le mouvement est dur à suivre…

Ça sort tout croche dans les médias, c’est pas juste un type de personnes, c’est plein de problèmes et il n’y a pas de porte-parole. Un jeune qui s’indigne avec son macbook sur ses genoux devant la caméra, c’est pas très convaincant. Jusqu’où il faut aller pour être un vrai puriste? C’est un paquet de monde qui s’indigne pour un paquet de causes. En fait, je respecte ceux qui sont assez nobles pour tout quitter et vivre en s’indignant. Moi, je serais pas capable de le faire.

C’est inspirant, mais pas en vain, hein?

Dans The Tipping Point, on voit comment une étincelle peut amener un changement drastique dans la société.

Merci!

Je lisais le guide de l’usager pour demander l’impossible insérer dans le dernier numéro de la revue Inter Art Actuel et ça coïncide pas mal avec la fin de l’entrevue :

Commencez petit, pensez grand

C’est facile de se sentir paralysé par la complexité du monde, d’avoir l’impression qu’aucune des choses que vous accomplissez ne fera une différence. Les gens au pouvoir veulent que nous croyions cela, même s’ils sont minoritaires. Mais lorsque nous regardons l’histoire, nous voyons bien que chaque mouvement, chacun des changements dans la société a débuté avec un petit groupe d’amis discutant d’une idée qui semblait alors impossible à réaliser.

(Copier ses mots sur cette chanson, c’est parfait. Surtout que l’anticopyright à la fin me dit en majuscule de faire circuler le contenu du guide)

Petite plug : Au détour d’un commentaire Facebook, j’ai découvert ce texte. Comme quoi procrastiner fait partie du processus de recherche de tout blogueur qui se respecte! À lire sur Automne québécois, le site de nos occupants:

Le problème qui a été esquivé à travers les siècles, et pour lequel il faudra se battre tôt ou tard, c’est le conflit qui oppose le peuple aux banques.

– Lord Acton