J’étais sur le point de tenir une promesse mais sans contexte, ça fera pas de sens. Ceux qui lisent ses mots ne résident pas tous à Montréal et/ou n’ont pas (encore) lu la dernière édition du journal Voir. Vous qui ne savez pas que j’ai promis de donner la parole aux Indignés, je vous invite à lire la chute de mon article:
(Si vous comptez lire l’article au complet, sautez les deux prochains paragraphes. Sinon, c’est comme déballer ses cadeaux en cachette le 23, pis faker la surprise le 25… C’est moins le fun.)
Jeanne brise la glace : Faut se parler. Je crois aux assemblées de quartier! Changer le monde? On va le faire ensemble. François précise : Y a personne qui arrive avec les problèmes et les solutions sur une liste avec tout le monde qui appuie; il faut réapprendre à se parler. Le mouvement Occupy, en permettant les échanges, change le monde. Alain utilise une image forte : Ce monde-là est embarqué sur le Titanic, on s’en va vers l’iceberg pis ça me tente pas. Faut voir le capitaine, lui dire de changer de directions, faut oser! Avec d’autres, faut être en groupe, sinon on va se faire écraser. Lyna : Ça fait moins mal de pas savoir, c’est facile de fermer les yeux… Avec Occupy, je me sens puissante comme 1000, on a un pouvoir de masse, c’est plus facile de faire face.
626 mots, stop! J’ai plus d’espace ici pour vous aider à comprendre les indignés mais ça continue sur le blogue Dehors Décembre. Bombardez-le de commentaires, histoire qu’on réfléchisse ensemble. Le 25 décembre, je vais publier mon 1h47min53sec, en attendant, je vais en parler, tous les jours, online. Le débat est là. Toi, t’es où?
Maintenant que vous savez, je vais me permettre d’être hors sujet (mais pas hors contexte) :
Noël c’est la fête du petit Jésus, pas des centres d’achats, là là. J’ai entendu ça des centaines de fois. Sur tous les tons, en anglais, en français pis même avec un là là du lac st-jean. Ignorons la mention religieuse et focusons sur le sens; c’est pas parce que c’est Noël qu’il faut magasiner. C’est un sophisme!
Voici deux idées-cadeaux pour avoir la conscience tranquille :
Peut-être que les enfants comprendront pas pourquoi le Père Noël leur offre ce billet jaune. L’incompréhension risque de doubler lors du retour en classe, alors que tous les autres vont énumèrer les fusils, Barbies et autres Ipods qu’ils espéraient et qu’ils ont reçus. Pour les petits, j’ai une suggestion (un poil) engagée: Occupy Wall Street Lego
Je crois qu’il y a un malentendu. Ce certificat exempte la personne qui le reçoit (idéalement longtemps avant l’événement) de me faire un cadeau. Il n’y a donc aucune raison qu’un enfant ne reçoive pas de cadeau en raison de ce certificat.
L’indignation est le prolongement naturel de l’égoïsme
Par Raphaël Enthoven, publié le 23/03/2011 à 15:00
http://www.lexpress.fr/actualite/societe/l-indignation-est-le-prolongement-naturel-de-l-egoisme_983152.html
Pourquoi l’indignation est-elle si consensuelle? Parce qu’elle n’est pas une valeur, mais une réaction. Elle ne relève pas de la réflexion, mais du réflexe. Elle est, à cet égard, compatible avec tous les discours, toutes les opinions.
Pourquoi l’indignation est-elle si consensuelle ? Comment se fait-il que, de toutes les valeurs, de toutes les attitudes, l’indignation soit la seule qu’on ne conteste jamais ?
D’abord, parce que l’indignation n’est pas une valeur, mais une réaction. Elle ne relève pas de la réflexion, mais du réflexe. Elle est, à cet égard, compatible avec tous les discours, toutes les opinions : on peut s’indigner des violences policières comme de l’agression d’un CRS, des attentats du Hamas comme des bombardements israéliens, des propos d’Eric Zemmour comme de sa condamnation… L’indignation, c’est comme le sel : on peut en mettre partout et ça fait battre le coeur. Simultanément plastique et stable, l’indignation s’adapte à tous les combats, dignifie toutes les luttes, embellit tous les dogmes. C’est merveilleux. Quelles que soient vos certitudes, il y a toujours une indignation qui leur convient.
Ensuite, parce que l’indignation est une myopie délibérée, une cécité volontaire. L’indigné refuse d’aller au-delà du spectacle qui l’indigne : séparant les faits des mécanismes qui leur ont donné le jour, l’indignation permet à tout un chacun de juger sans comprendre, d’émettre un avis qu’aucun raisonnement n’invalide. Comment remettre en question un discours qui ne s’occupe que des effets ? Comment argumenter face à celui qui, disqualifiant a priori l’objet qu’il désigne, s’épargne la peine de le penser ? C’est le tour de force de l’indignation : elle s’appuie sur les faits tout en se rendant hermétique à toute réfutation. L’indignation ne prend aucun risque : quel qu’en soit le motif, s’indigner, c’est avoir raison.
Dès lors, autre avantage : l’indignation est indéfiniment renouvelable. N’ayant, face au réel, que la ressource de l’anathème et de la déploration, puisant la matière de sa rage dans le hiatus entre le monde comme il est et le monde comme il devrait être, l’indignation se trouve toujours une raison d’être. Peu importe que, comme toutes les morales, l’indignation culmine dans l’impuissance : l’essentiel est de s’indigner, ce qui n’engage à rien.
On présente souvent l’indignation comme un antidote à l’égoïsme, alors qu’elle en est le prolongement naturel. A l’image du père de Lady L., dont Romain Gary raconte qu’il s’indignait de la condition des femmes tout en lutinant sa propre fille, l’indignation est essentiellement conservatrice et de mauvaise foi. Car l’indignation a besoin de causes comme la charité a besoin de pauvres : son propos n’est pas de changer le monde, mais d’y trouver l’occasion de s’en plaindre. D’ailleurs, avec l’indignation, on peut perdre, l’honneur est sauf. Tout en se donnant l’air de porter le monde sur les épaules, l’indignation est irresponsable de tout. Seule compte la bonne conscience, la tranquillité vindicative qu’elle garantit à celui qui s’indigne. L’indignation, c’est le pansement du bobo.
Enfin, et pour toutes ces raisons, l’indignation a ceci de génial qu’elle procure le sentiment d’être iconoclaste tout en appartenant à la majorité. Elle consiste à hurler avec la meute tout en se persuadant d’être seul de son camp. Elle a l’air de la révolte, mais c’est un sédatif. Dormez, braves gens, faites comme tout le monde, indignez-vous !